- Maîtresse, parle-nous de la ponctuation.
- Eh bien, la ponctuation, voyez-vous, c'est le sel et le poivre. Si vous l'oubliez, votre texte sera fade.
J'aime la ponctuation
particulière que la vie pose sur nos phrases.
Les phrases que nous choisissons afin de remplir la page blanche dont chaque jour nous fait le cadeau.
Ne froncez pas les sourcils, voyons! C'est évident...Ecoutez:
La vie est faite de
pleins et de déliés, de longues phrases et de mots isolés, d'exclamations joyeuses ou effrayées et d'interrogations curieuses ou inquiètes, de pauses
ténues comme des virgules,et de points sur les i. L'avenir est suspendu au-dessus de nos têtes comme au
bout de trois points de... suspension, comme un souffle momentanément
retenu. Jusqu'au point final.
- Pas tout de suite, le point final, maîtresse!
- Non, pas tout de suite, mes chers enfants. Il vous faudra d'abord développer de longues années votre sujet...
Et de temps en temps, ne pas oublier d'ouvrir une parenthèse. Ce mot est un peu austère. On dirait le nom d'une
technique médicale ou d'une figure de style. Il recèle pourtant des
trésors et sa musique est douce à mon oreille.
Comme deux jolis bras arrondis levés vers le ciel.
C'est l'escapade imprévue
avec une amie, alors que l'on broyait du noir, le jeu de société
qui s'improvise avec vous les enfants, alors que maman avait trois tonnes
de travail très important, mais pas tant que ça finalement...c'est un invité que l'on n'attendait pas et qui arrive à l'improviste. On ouvre la porte et
l'on oublie les obligations. Il est là, on est bien. La vie prend du
sens, la vie prend du sel.
Parfois, au hasard d'une
promenade, on tombe en arrêt devant deux mouettes qui picorent
insouciantes sur le sable mouillé. Ou un arbre centenaire. Ou une fourmilière qui s'agite. Le temps s'arrête. On
rêve une demi-heure devant un tableau, seul dans le Musée, les yeux
noyés de brume. Quand on se "réveille", on a l'impression de ne plus savoir l'heure qu'il est.
Les parenthèses, il faut
se les octroyer, se les offrir comme une récompense, parce qu'il est
bon de se cajoler soi-même.
Ce sont des instants
volés à la routine, aux conventions, à la lassitude, aux devoirs. De
petits grains de poivre dans le plat un peu fade des jours gris. Des
étincelles de magie pure dans un monde rectiligne et qui manque
parfois sérieusement de fantaisie. Il n'est que de regarder la
tête triste du présentateur du journal télévisé pour avoir envie de
partir très loin...( en courant dans un champ de coquelicots, courir au milieu des fleurs, les cheveux défaits avec dans l'air un parfum de foin coupé et de bergamote et de pin cembro, à respirer en riant comme si c'était un gaz hilarant, en sentant les abeilles vous frôler doucement et tout l'univers se pencher pour vous faire une révérence... )
Voilà, c'est cela, une parenthèse.
Quelques grammes de poésie qui ne demandent qu'à jaillir.
Il est des parenthèses
enchantées, des parenthèses étoilées, des parenthèses secrètes. Cela demande parfois un peu de courage, de l'audace même, et une bonne ouverture d'esprit. Quelque part, cela se mérite.
Personnellement,
certaines parenthèses m'ont laissé un souvenir ébloui, et, par une
sorte de persistance rétinienne, l'empreinte de ces bonheurs furtifs reste à jamais gravé sous mes paupières.
Je ne saurais trop vous
conseiller d'ouvrir les parenthèses, avec bonheur, avec fougue, avec
joie. Et sans l'ombre d'une hésitation, ou l'once d'un sentiment coupable. Simplement parce que vous le valez bien...
Et quand vous les refermerez,
je vous l'assure, il vous semblera que l'air se soit empli soudain de menthe
et d'aneth.
On respire. On repart plus jeune, et grandi(e) à la fois.
(Jusqu'à la prochaine parenthèse...)
(((^_^)))
RépondreSupprimerj'ai adoré.
Moi aussi. ^ ^
SupprimerC'est très très chouette !
SupprimerOui, je confirme!
SupprimerLes parenthèses..... c'est tout un monde à part, une deuxième vie que l'on s'accorde à l'intérieur de la première. C'est parfois un voile de tristesse sur un instant de bonheur, mais c'est aussi cette irrépressible envie de rire dans les enterrements.
RépondreSupprimerEn écriture, j'aime les parenthèses (il m'arrive d'en mettre à l'intérieur d'une autre (si si, c'est vrai)). Elles déroutent parfois, obligent à relire la phrase sans elle(s), puis de nouveau l'intégrer, mettant en valeur le propos.
C'est une sorte d'écrin pour mettre à part un propos ou un instant de vie.
Blutchiamo
PS: (Tiens, le PS (rien à voir avec le parti socialiste (quoique la politique de maintenant ressemble un peu à une parenthèse)) est une autre forme de parenthèse...) Mais non, chez moi le drapeau noir ne flotte pas toujours sur la marmite... Bon, il n'en est jamais très loin non plus...
J'ai tout compris. Il faut dire que je suis commence à me débrouiller un peu avec les parenthèses...
Supprimer(Au fait, tu as vu (enfin j'espère) je t'ai répondu dans mon billet précédent...)
C'est gentil" blutchiamo"
J'ai vu ta maitrise des parenthèses. J'ai vu aussi ta réponse concernant le billet précédent (où j'ai laissé un complément de commentaire).
SupprimerBluchiamo (c'est fait pour être gentil et utilisé hors des coups de gueule...)
Moi aussi je t'ai répondu sur ce billet là...
SupprimerOui pour réussir un plat, comme pour réussir sa vie, tous les ingrédients sont nécessaires: les ponctuations et les parenthèses!
RépondreSupprimerAprès tout dépend du grain de folie du chef cuisinier...
SupprimerJ'ai oublié de te souhaiter la bienvenue ici:Selon ma tradition, je t'ajoute à mon totem.
SupprimerEt si l'on décidait que ce n'est pas la touche de poésie qui doit être entre parenthèses, mais tout le reste. Il suffirait pour cela de changer légèrement les règles typographiques )mais ce n'est pas compliqué(...
RépondreSupprimerMilitons pour l'inversion des parenthèses )et le triomphe de la poésie( ! :~)
Voilà une idée qu'elle est bonne...Quoi que, malgré tout, ne penses-tu pas comme moi que ce qui fait le sel des parenthèses, c'est leur caractère exceptionnel? Sinon, la routine risque de s'installer à nouveau!
SupprimerJ'essaie de faire attention aux ponctuations. Mais, dans la vie : vive les parenthèses. Cela permet de reprendre souffle. Amitiés. dinosaure80.
RépondreSupprimerJe respecte énormément la parole des anciens( et je pense que tu ne le prendras pas mal, bien au contraire) la sagesse coule de tes paroles.Reprendre souffle, que c'est bien dit!
SupprimerJe me demande si Orsenna ne t'a pas volé ta place à l'Académie, ta leçon de ponctuations est drôlement meilleure que la sienne. J'ai tout bien compris !
RépondreSupprimerAlors là, tu me flattes vraiment. Sais-tu que Monsieur Orsenna est quelqu'un que j'admire beaucoup , et je ne pense pas lui arriver à la cheville question littérature.Mais si ma leçon de ponctuation était claire, j'en suis la plus heureuse.
SupprimerLes seules parenthèses qui vaillent, ce sont les lèvres des femmes ... Elles sont le sel de la vie ! ["instants volés à la routine, aux conventions, à la lassitude, aux devoirs"]
RépondreSupprimerC'est très poétiquement dit. On dirait du Paul Eluard...
SupprimerDélicieux essai sur la parenthèse, un joli thème philosophique que je n'hésiterai pas à t'emprunter. Mais dis-donc, tu ne serais pas un peu philosophe sur les bords ? En tout cas, ceux qui ont bien de la chance, hormis tes lecteurs, ce sont petits philosophes en élèves !
RépondreSupprimerJe t'embrasse
Mes petits philosophes en herbe adorent cela. Il existe des ateliers "philo" pour le cycle 3 qui sont remarquablement bien faits.j'avais travaillé une année avec Oscar Brenifier" , j'en garde, ainsi que mes élèves de l'époque, un souvenir étonnant.
SupprimerBien sûr que tu peux "emprunter" ce que tu veux ici: les grands thèmes sont à tout le monde et c'est un plaisir pour moi qu'une spécialiste soit sensible à mon côté philosophe. D'ailleurs chacun trouve ici ce qu'il y apporte: c'est un peu le blog espagnol...
erratum : "ce sont tes petits philosophes en herbe"
RépondreSupprimerDis donc, ma belle, heureusement que tu es là, on dirait que tu es la seule fille...le sujet a l'air d'intéresser davantage les messieurs ce soir... ;)
SupprimerTiens, c'est marrant, ça m'a rappelé une réflexion d'un prof :
RépondreSupprimer« ferme ta parenthèse, ta phrase va s'enrhumer… »
Un prof qui avait de l'humour... çà existe, donc...
SupprimerMoi, ce serait plutôt en l'absence de ces fameuses parenthèses que je tomberais malade...
Le point à souligner c'est deux points, ouvrez les guillerets, et surtout, oubliez le renfermé ! d:)
RépondreSupprimerTrès joli, ouvrez les guillerets!
SupprimerJ'ai relu deux fois et j'ai bien fait, car j'ai failli passer à côté de ton jeu de mots.
J'ai adoré..............
RépondreSupprimerJe dis à mes CP de ne pas oublier le point sur le i car il s'enrhume sans son bonnet!
C'est mignooooon! Merci Cathy, ça y est, les filles se réveillent! lol
SupprimerBonne rentrée demain. Pour la période la plus fatigante de l'année...
Ta parenthèse , comme ma légèreté, cela serait ce nuage de lait qui donne un si bon goût au thé ! Mais pas de nuage de lait sans thé ;-)
RépondreSupprimerVoilà, c'est tout à fait cela! Pas de parenthèse sans phrase dans laquelle l'inclure, pas de yin sans yang, pas de plaisir sans corvées, pas d'été sans hiver...j'arrête là une liste qui pourrait être éternelle. Tout est relatif.
SupprimerBonne rentrée ma belle bulle.
Courage.
Bisous
C'est tellement cela!!! Tellement bien exprimé sous ta plume...
RépondreSupprimerMerci Brizou...passe une bonne journée.
SupprimerCe fut notre mode de vie, vivre pour vivre. Pas de luxe, juste l'indispensable, mais vivre.... Et maintenant, je m'aperçois que, malgré certaines "privations", les enfants nous le rendent bien.
RépondreSupprimerBonne journée avec bises
Tu as vécu avec sagesse et un grain de folie: cela, les enfants ne l'oublient jamais. belle soirée!
SupprimerToutes les semaines, une émission de Frédéric Lopez offre "une parenthèse inattendue", une rencontre "intimiste" à la campagne entre différentes personnalités, sensées de se révéler un peu plus, loin des projecteurs... Paradoxe que d'étaler ainsi sa vie au grand public. Mais bon, j'aime bien quand même...
RépondreSupprimerhttp://www.france2.fr/videos/72106663
Parfois, j'aimerais que les parenthèses soient inversées : La vie serait LA parenthèse enchantée et [ les accidents, la maladie, les tristesses des crochets vite refermés ], tout est question de point de vue peut-être, ça dépend du moment...En ce moment, c'est vrai, je dépends...
Bonne rentrée Célestine et merci pour les jolis billets sur Paris, je vais les relire pendant mes "vacances" prolongées...
Ces vilains crochets ne seront bientôt plus qu'un mauvais souvenir, chère Cathy. Je n'ai jamais vu l'émission mais plusieurs personnes m'ont dit qu'elles l'avaient aimée...J'essaierai de voir la prochaine.
SupprimerMerci de prêter attention à mes petites notes de voyage. J'espère apporter un peu de pittoresque à ceux qui ne peuvent pas voyager en ce moment.
Pensées toutes douces comme du coton.
Je reviens, la mer m'a offert une parenthèse salée, une parenthèse mouillée d'embruns... Une parenthèse étoilée dis-tu ? Comme c'est joli ];-D
RépondreSupprimerOui, n'est-ce pas...c'est un ami à moi qui m'a prêté cette douce expression.
SupprimerAh! la mer...elle console de bien des choses!
Chère Célestine:
RépondreSupprimerje suis en phase complète avec tes réflexions, étant moi-même en pleine parenthèse obligée, imprévue, mais qui tombe à point nommé , et peut-être pas par hasard, finalement.. Je te souhaite bonne reprise du travail, avec toujours autant de patience attentive, enthousiasme et invention.. pour ma part , je prends du temps , je me roule dedans , et mets au repos mes cordes vocales piteuses!
Bises
Rien ne tombe jamais vraiment par hasard, je crois.Il faudrait que tu cherches, dans ton passé proche, quelle est cette chose assez ahurissante qui t'a laissée sans voix...Heureuse de faire partie de ta parenthèse!
SupprimerLa lecture de ton joli texte a été pour moi une jolie parenthèse dans ma matinée ménage:-)!
RépondreSupprimerTu m'en vois ravie. Ainsi cette noble tâche mais néanmoins pénible t'a été agrémentée de petits filaments de rêve...
SupprimerBel éloge de la ponctuation,une petite parenthèse,avec le piano de Frédéric.C'est très beau,...et l'homme de pleurer un peu.
RépondreSupprimerJ'aime les hommes qui pleurent en écoutant Chopin.
SupprimerA mon amie qui n'arrive pas à prononcer le mot "cancer" , je lui ai dit , appelle ça une parenthèse , de vie , pas aussi douce que celles que tu décris , mais quand elle sera refermée , ensemble , on en ouvrira d'autres douces et sucrées
RépondreSupprimerc'est toujours d'une délicatesse tes billets , ça fait du bien Célestine
Ah ma Jeanne, comme je souhaite que ton amie referme très vite ses vilains crochets. Oui je dis crochets, comme mon amie Cathy qui lutte aussi contre ce crabe maléfique.Parce que le mot parenthèse est trop joli pour désigner ces entourloupes de l'existence.
SupprimerMerci, tes mots me vont droit au coeur. La délicatesse est aussi un mot-bijou.
C'est si juste ...
RépondreSupprimerPlus que les parenthèses, je cultive les guis aimés ... :)
Belle nouvelle journée de vie pleine de parenthèses, Célestine !
Tu as été druide, dans une autre vie?
SupprimerEn ce moment même, j'attends mes collègues pour aller manger, et je m'offre une mini-parenthèse "bloguesque".Quel bonheur de te trouver là!
Merci de tes commentaires où le jeu des mots est toujours subtil.
En ponctuation, j' aime aussi beaucoup l' accolade: je m' appliquais à en faire de belles, bien régulières. Et aussi la cédille qui met de la douceur sur ce qu' elle touche.
RépondreSupprimerBon courage pour cette fin de trimestre, petite Célestine.
Ah, oui, bien sûr , l'accolade! comment ai-je pu l'oublier...
SupprimerPour la cédille, c'est pas faux. C'est ce que diront tous les maçons de Macon.
Oui, pour moi il s'agit de parenthèses enchantées mais étoilées est également si bien approprié. J'ai parfois l'impression qu'en prenant de l'âge, les parenthèses deviennent moins enchantées, mais disons que cela doit être juste mon humeur du jour.
RépondreSupprimerSur nos amours, les vraies seulement des points de suspension...pas de point final et sur nos blessures point de suture...(ces cinq derniers mots ne sont pas de moi).
C'est joli, ces cinq derniers mots, c'est de qui?
SupprimerLes parenthèses enchantées ou étoilées, il faut y croire: elles n'ont rien à voir avec l'âge...J'en connais qui ont toujours vingt ans dans leurs yeux et leur cœur.
Ce soir chez Célestine, une ronde se forme. Une ronde de parenthèses qui se tiennent par la main et mènent une danse joyeuse. Une danse de folie, une danse de rêve. Elles se posent au bas du dos et en menant la vive farandole emportent avec elle sur un air de Chopin, plus savamment que le plus affuté des massages, une douleur sourde, une douleur d'angoisse qui ne demandait qu'à s'enfuir loin, ...très loin. L'accord en Do enlève la douleur du dos. (vieux proverbe chinois...entre parenthèses...)
RépondreSupprimerLa douleur s'en va. Et seul demeure le rêve.
Il est des douleurs qui disparaisse rien qu'avec des mots...et un peu de Chopin. Une musique qui fait s'envoler tous les poins d'interrogation pour ne laisser que la douce chaleur des parenthèses. Ces Chinois, quand même, quels philosophes! ;)
SupprimerUne vie entre parenthèse, comme un chemin sans horizon...
RépondreSupprimerEt puis tu es là, à écrire que des parenthèses sont du bonheur à découvrir. Qu'elles nous offrent un autre chemin, doux à parcourir...
Tu as raison, mais pour ce faire il faut que le brouillard écarte les mains et nous laisse courir.
Ton écriture est belle...
Bonne soirée.
Merci pour le compliment. J'aime tes mots aussi. Le brouillard finit toujours par se dissiper. C'est mathématique...
SupprimerGrrr!!!!
RépondreSupprimer(((^_^)))
Supprimer
RépondreSupprimerVoilà une superbe texte écrit avec l'apparente aise qui vous caractérise, chère Célestine !...
L'apparente aise... Vous êtes génial.
RépondreSupprimer