A l'est du Rhône, à la hauteur de Valence, des falaises monumentales barrent l'horizon telles des sentinelles. Ce sont les contreforts du mythique Vercors, ce haut-lieu de combats pour la liberté dont on se souviendra longtemps, je l'espère.
Ici, on les appelle Les Monts du Matin.
J'aime la poésie de ces mots. On y entend la lumière rose se faufiler entre les rochers, et illuminer l'aurore comme un décor de théâtre. En toute saison, c'est un spectacle changeant et féerique dont on ne peut se lasser. Si vous êtes observateurs, (avec un peu d'imagination) vous distinguerez, vers la gauche, une forme allongée. Les gens d'ici l'appellent la Momie du Vercors.
Allez, je vous la montre de plus près. Regardez cette mine patibulaire, ce cou décharné, et ce corps bien entamé par l'érosion. Et pourtant, les Drômois l'aiment bien, cette vieille bique.
Je vis là, à la juste lisière entre plaine et montagne. L'air des cimes vient baigner les soirs d'été de sa fraîcheur bienfaisante, loin de la fournaise de la ville. L'hiver, en revanche, les nuages s'accrochent au relief et nimbent le village de leur brouillard tenace.
Mais qu'importe. J'aime voir, chaque jour, passer les saisons dans ce décor qui me parle au coeur.
Des centaines de sentiers s'élèvent rapidement jusqu'aux plateaux herbeux, longent des à-pics d'où l'on aperçoit toute la plaine. Parfois l'on se retrouve roi du monde au-dessus d'une mer de nuages. Et tout cela, à seulement une demi-heure en voiture...
Les animaux s'y ébattent en liberté, chamois, vautours, gypaètes, renards, et le cerf y brame à gorge déployée chaque automne.
Au détour d'une combe, on peut découvrir une abbaye cistercienne nichée dans la verdure.
Ou une barque bleue sur un étang gelé.
J'aime cet endroit. Je vous en parlerai encore.