31 mars 2014

Mieux vaut en rire





Les femmes, je ne sais pas, mais moi, là, je n'y arrive plus. Je sature grave. Et je ne voudrais pas vous lasser avec mes coups de mou, mes vieux qui partent de la caisse, et se refilent le relais pour garder la même chambre d'hôpital  chacun son tour (là c'est mon dabe qui a voulu faire du gymkhana entre les barrières municipales, résultat un fémur cassé, bingo! retour à la case départ, rha la la!)  Mon boulot que j'adore (mais un peu comme Alain en ce moment. Alain Deloin* ! Rapport à tout ce que je vous ai déjà causé auparavant).... Ajoutez-y quelques petites peines de coeur, de trèfle, de pique et de carreau par-ci par-là. Des prises de tête inutiles, des suppositions, des déceptions, des inquiétudes qui me reprennent, des bisbilles sans réelle importance...vu que tout le monde il a les mêmes! Je vous dis ça pour que vous soyez pas étonnés si malgré mon addiction à ce blog, je m'arrêtais quelque temps...

Alors je préfère vous faire sourire. Enfin j'espère.


Dialogue. Pouf. Pouf.

-Mais au juste, qu'est-ce qu'elle a eu Mamie?
-Euh...c'est compliqué. Quelque chose dans son cerveau. Ça s'appelle...
-Oui je sais: un bug de son disque dur!
-Euh...
-Ben oui,  elle a dû rebooter la bécane, et réinstaller en hardware Mamie.8.4 avec toutes les M.A.J ** de la carte mère ! C'est pour ça que c'était long!
-...Ben...Oui, c'est un peu ça, effectivement!
-Et Papi il est parti à la maintenance parce qu’on ne pouvait pas traiter son problème de pièce en hotline.

Ben évidemment ! Comment on n'y a pas pensé plus tôt, alors que c'est d'une logique tellement implacable... ;-)
J'adore discuter avec les jeunes...

Faudrait que je m'occupe un peu de Célestine.5.0 avant de cramer mon hardware, moi...Besoin d' une petite MAJ  ...


Les Cherubins ou l'amiable Lazure by François Couperin on Grooveshark
* sketch culte des inconnus
* *Mise A Jour (ben oui, y a des nuls en informatique)
photo du net

Je dédie mon billet à Ambre, la reine des petits dialogues d'ados...

28 mars 2014

Croquer la Pomme

Cette semaine la ville est à l'honneur chez Asphodèle.

***

Voiture, rue, immeuble, abeille, théâtre, anonymat, animation, pavé, visite, parc, asphalte ou bitume, bus, fuite, flâner, embouteillages, urbain, gare, cohue, chuter, constant ou constance. 



***



Pour retrouver cette fille, j'avais abandonné la tiède langueur de mon ouest natal, planté là  ma ferme, mes bêtes, ma vie, et ce léger vibrato des bourdonnements d'abeilles, à la tombée du jour. J'avais troqué le réveil au chant du coq pour les embouteillages, et découvert ahuri la hauteur insensée des immeubles new-yorkais.
Pour retrouver cette fille, j'avais débarqué un matin à Penn Station,  sur l'asphalte brûlant d'une rue emplie de ce son urbain si particulier, un free-jazz de pneus crissants, de sirènes de voitures de police hurlant dans l'ombre des colosses de béton, d' avertisseurs de taxis pestant dans la cohue de la foule.  Moi le plouc aux allures de cow-boy mal léché, j'avais renoncé à ma notoriété au village pour un anonymat total, j'étais devenu fourmi parmi les fourmis arpentant sans flâner,  sans relâche, le pavé et le bitume, avec pour seul indice un numéro de téléphone à moitié effacé. J'avais évalué la maigreur de mes chances de la retrouver à peu près égale à zéro. Environ mille deux cent cinquante combinaisons possibles. Mille deux cent cinquante coups de fil à donner, dans mon mauvais anglais rocailleux de l'Oregon. Il me semblait que visiter avec constance, chaque musée, chaque théâtre, chaque librairie, chaque arrêt de bus, chaque lieu de vie ou d'animation, me prendrait moins de temps et serait moins fastidieux...Peu à peu, l'écrasante beauté de la ville, cette ville musicale, bluesy à mort, eut raison de moi et m'instilla son venin dans le sang. Après des mois à regarder chuter le soleil derrière Manhattan, à m'arracher le plexus à gueuler sur chaque pont,  à sentir l’odeur poisseuse et aigre des heures de taf et de métro derrière les sourires fades et désespérés…Ma fuite en avant me sembla absurde. Je n'eus plus un dollar en poche et renonçai à retrouver la fille. La fille qui m'avait embrasé l'âme.

Mais un jour, dans Central Park...

Time After Time by Chet Baker on Grooveshark

26 mars 2014

De battre, mon coeur s'était arrêté





Il est un bonheur subtil: c'est ce moment de rigoureux équilibre où la folle course semble s'arrêter rien que pour nous. 
C'est ce soir, pour moi. La pendule aux aiguilles emballées comme des chevaux marque un temps d'arrêt. Enfin. Après tous ces mois que je viens de vivre dans la tempête d'un automne et d'un hiver qui ne m'ont pas beaucoup laissé respirer. Non que je fusse malheureuse. Il faudrait pour cela oublier que le vrai malheur ne se dit même pas. Qu'il est au-delà des mots. Mes mots à moi ne se sont pas taris. J'ai continué à écrire pour exprimer, au sens de "faire sortir le jus". Exprimer le jus d'un citron, ou le pus d'un furoncle...
Parlons alors de petites contrariétés. Malgré tout, et même en disant "petites",  je connais bien ce vacarme intérieur, cette in-quiétude au sens littéral, qui m'ont agitée depuis quelques mois. Ça fait un bien fou quand ça s'arrête! Cela fait quelques jours déjà que je vais mieux. 
Mais ce soir, je ne sais pas pourquoi. Une transparence dans l'air. Une pause dans le continuum. Comme à la fin de l'expire,  cet instant d'apnée où l'on sourit d'avance à la goulée d'oxygène qui arrive.
Bref. Je revis vraiment, en profondeur.
L'épisode maternel a brassé en moi des choses ah oui!  profondes et nouvelles. J'ai eu froid, tellement froid intérieurement, de ce froid qui prend quand on regarde une tombe. J'ai réalisé que sa mélancolie passagère mais violente, sa prostration silencieuse m'avait arrachée à elle avec un sentiment de stupéfaction, comme une sorte de deuxième coupure de cordon, mais pas naturelle, celle-là. J'ai réalisé que je n'avais pas eu le temps de lui dire au revoir. Et si elle ne revenait plus à elle? Si la folie l'emportait pour toujours dans cette conque où elle s'était murée? Je me sentais volée de tout un tas de projections fantasmatiques que je m'étais faites sur son départ, un départ dans la douceur, l'apaisement  et les sentiments vrais. Heureusement, son cerveau n'avait été que simplement et subitement  privé de ses molécules du bonheur, par une de ces inadvertances inexplicables que l'on peut avoir et ce que la chimie a défait, la chimie l'a refait. Une guérison qui nous laisse quand même tous épantelés, ébranlés par la fragilité de celle que l'on croyait immuable. La mamma. Et tous irréversiblement changés. Avertis. Préparés par cette répétition générale, en quelque sorte, à l'acte tragique du destin. Bien décidés à être vigilants. On ne devrait jamais être surpris par la seule certitude de la vie…et pourtant quand elle nous frôle, avec son cortège de stupeur et de tremblements, et son long doigt recourbé, on sursaute comme si on n'en avait jamais entendu parler...
La Vie avec un grand V n'en prend que  plus de goût, de valeur, d'importance. Comme au sortir d'un coma. Tout paraît soudain brillant de rosée, endiamanté par la beauté de ce miracle: être vivant. J’ai envie de tout. J’ai des envies qui se bousculent, aller au cinéma, voir un film de Lelouch, un film de vie étourdissante,  marcher dans une ville, manger des gâteaux, courir dans le soleil,  écouter un concert de jazz,  rêver au clair de lune. Parler à un ami, serrer mes amours dans mes bras, sourire à ma mère, écouter mon cœur battre à nouveau, quitte à reprendre, tant pis, sa tachycardie et entendre affluer le sang à mes joues comme Scarlett O'Hara quand elle embrasse Rhett Butler.

 Et sentir sourdre au fond du ventre l'envie de vivre à en mourir.




River Flows in You by Yiruma on Grooveshark

22 mars 2014

Maéva




Photo Christophe Clarysse






















Tu es petite, je suis grande. Tu possèdes les yeux sombres d’une fille d’Espagne, j’ai le regard clair de mes lointains ancêtres des landes de Galway.
Tu n’as pas encore d’enfants, moi j’en ai trois, dont un fils de ton âge. Tu commences ta carrière et j'entrevois au loin le fanion à damier.
Et pourtant, Maéva, qu’est-ce qu’on se ressemble ! Comme je retrouve en toi les fougues et les impatiences de mes débuts !  Comme je sens bouillonner dans tes paroles les mêmes convictions, les mêmes enthousiasmes qui m’animent encore au bout de trente ans. Le même goût du travail bien fait.
Comme j’ai envie de te dire, à l’instar de Gabin dans « Un Singe en Hiver », s’adressant à un Belmondo ténébreux et flamboyant « Tiens, t’es mes vingt ans ! »
Peu à peu, j’ai découvert que nous étions en phase : même humour, même amour de la langue française, même goût des bonnes choses et des plaisirs de la vie. Comme moi, tu es aimée par tes élèves. Je le vois bien.
Et puis, aujourd’hui, je t’ai vu pleurer, déstabilisée par un de ces malandrins de l’administration, un de ces ronds-de-cuir pisse-vinaigre qui se croient autorisés à démonter les jeunes collègues en leur imposant leur point de vue étriqué de « bureaugratte » et en les décourageant du haut de leur fausse autorité.
 Mais que savent-ils du plaisir, du bonheur d’enseigner ? Ne t’inquiète pas : leurs pinaillages de psychopathes flexionnels sont peanuts. Ce n’est que l’écume de leur bave devant ton talent naturel. Moi je sais que tu ne te décourageras pas. Que tu seras une institutrice exceptionnelle. Une de celles qu’un enfant n’oublie jamais.
Aujourd’hui, j’ai compris que dans mon école, tu étais, malgré les apparences, celle qui me ressemble le plus. 

Pour le défi du samedi, qui s'assemble se ressemble.

Andante cantabile by Sviatoslav Richter on Grooveshark

20 mars 2014

Ouessant

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Ce matin, deux heures de réunion pour écouter la sainte parole nous parler dans un jargon de plus en plus insupportable pour moi, au fil des ans, des "modalités de mise en place du projet d'école"...Depuis vingt cinq ans, les Jargonos de l'Eduknatt nous bourrent le mou avec ce "machin".  
-Rhôô! Célestine!
-Mais si! pas d'autre mot pour désigner cette usine à gaz à laquelle il nous faut nous coller régulièrement, tous les trois ans, rempli de chiffres imbitables, et qui nous fait suer sang et eau pendant des heures, pour finir dans un placard. De précieuses heures volées à ce qui fait le sens de notre métier. 
Mon projet d'école à moi, il est simple. Il tient en quelques aphorismes qui ont été inventés par de géniaux prédécesseurs. L'art du questionnement de Socrate,  Mens sana in corpore sano chez Juvénal, la substantifique moëlle de Rabelais, et " je n'enseigne pas, je raconte" de Montaigne. Enfin le lire, écrire, compter de Jules, auquel j'ajouterais volontiers penser, créer, rêver.
A certains moments, ce matin, j'ai pratiqué l'évasion intérieure. Arpentant mes landes bien-aimées, buvant à grands traits l'air chargé de bruyère et de sel en tremblant sur mes jambes, ivre de trop d'oxygène. Pour éviter de me noyer dans les barbarismes à deux balles, synergie, ressources, conceptualisation, indicateurs, cadre de référence...
Je sais, madame l'Inspectrice, je n'ai pas le positionnement idoine. Est-ce ma faute si vous ne parvenez pas à m'émouvoir avec vos tournures alambiquées, si j'ai le syndrome de Zazie qui me chatouille gravement, et qu'à toutes vos phrases j'ai envie de répondre "Mon cul" d'un air ingénu et frondeur?
Alors j'ai rêvé. J'ai fait la mauvaise élève. Tout ce que les "conseilleurs" pédagogiques nous somment d'éviter chez nos élèves: je me suis ennuyée avec bonheur. Et j'ai trompé mon ennui en m'asseyant devant l'océan, les yeux emplis de vert, de bleu et de gris. Ouessant... ce mot est venu me caresser l'âme de ses sonorités cotonneuses...C'est impressionnant, cette force mentale qui nous permet de nous abstraire au point de devenir sourd. La logorrhée de Jargonos s'est perdue dans le fracas des paquets de mer sur le phare de la Jument.
Et ce soir, sublime hasard, un beau film, qui se passe dans le paysage-même de ma rêverie. Et une petite phrase
"Qui voit Ouessant voit son sang". 
Bigre! J'espère survivre quand même à la rédaction du projet d'école...


photo du net.





18 mars 2014

Gouttelettes

Photo Alain X




















Il n'aura pas échappé à votre sagacité que les derniers événements m'ont rendue bien mélancolique. Quand je suis en mode "éponge", on m'appuie dessus du bout de l'index, plop!  Et je me déverse. Je m'épands. Je me fontainise. Je deviens une résurgence de type vauclusien.
Du coup, ces larmes pluriquotidiennes ont bien éclairci mes yeux, ce qui est un doux euphémisme pour dire que le rimmel qui a fait couler de l'encre (et réciproquement) dans mon avant-dernier billet n'est plus qu'un lointain souvenir.
Chaque gouttelette d'humanité alors m'éclabousse et vient rapetasser mon cœur en morceaux. Et une puissante envie de sourire monte du tréfonds du creux de moi-même.
Mais ai-je droit de sourire, au regard des aleas douloureux que je viens de traverser ? C'est comme si deux forces contradictoires luttaient en moi, se déchirant comme deux coqs au combat, comme si je m'interdisais de sourire, alors que la vie et l'espoir bouillonnent en moi.       
-Mais oui, grande bête, tu as le droit de sourire, allez, ta mère elle-même te le dit, ça ne sert à rien de s'escagasser!! (Mais pourquoi ma conscience prend-elle  la voix de Raimu dans le rôle de César?)
 Ce matin, le petit ramasseur de feuilles en gilet jaune (pas les feuilles, le ramasseur) me fait son grand sourire de Forest Gump, et me dit "petite demoiselle". Il ne m'en faut pas plus pour avoir envie de grimper au platane en lançant le cri de Tarzan. Mais c'est une métaphore, je ne l'ai pas fait, hein...
-Ah bon?! Dommage…
-Ben non. Je sais. J’aurais peut-être dû.
A midi je reçois un sms plein d'amour de ma chère Eva, une de mes amies fidèles parmi les fidèles, et il me vient soudain l'envie de lui déclamer combien elle m'est précieuse, elle qui ne m'a jamais déçue, ni trahie, ni dit aucun mot méchant en dix-huit ans.
On ne dit jamais assez aux gens qu'on aime qu'on les aime. (P'tin! c'est beau ça! c'est de qui déjà?)
Cet après-midi, dans la cour, un petit mouflet haut comme deux pommes à plat ventre se plante devant moi, l’œil roux d'un écureuil et la mèche rebelle.
"T'es trop belle, directrice!" 
Vous avez vu ça, vous? Faire du gringue à la dirlo? A huit ans?
J'en reste comme deux ronds de serviette. Ou de cuir. Ou de flan. Enfin bref, interloquée. Je ne me serais pas imaginé dire ça, à huit ans, à l'espèce d'épouvantail gris et revêche qui nous servait de directrice... (C’est mon souvenir, il est peut-être un peu déformé par la courbure parabolique du temps...) 
 A part ça, j'ai aussi reçu deux e-miels, un d’Ambreneige et un autre de Candide. 
Et pour finir cette belle journée-eu, nous irons nous asseoir... mais pas sur un banc. Sur le sofa ensoleillé d'Olga, qui m'a invitée à boirleter. A cinq heures, comme de juste. Nous boirletons souvent après le boulot. Aujourd'hui c'était pour fêter la rentrée de la zone C.(comme la vitamine du même nom)
Le merle s’entraînait pour un futur casting de "The Voice». Le soleil déclinait lentement sans avoir l'air de trouver ça dramatique. 
Il faisait bon.
Tranquille. J'ai senti à nouveau couler le long fleuve...


Fernando Sor by Etude N°5 - Moderato in B minor on Grooveshark

14 mars 2014

Maman




Temps, vie, chanson, rien, diva, furibond, montagne, souffle, pollution, tempête, ballade, léger, envoyer, courant, bulle, prendre, gonfler, voleter, brèche, blesser, balançoire.













Quel joli thème que celui de l’air, Asphodèle ! Comme j’aurais aimé laisser éclater mes mots en bulles de rire doux, vous lancer des fleurs de vie en étincelles, en gerbe sur les chemins d’herbe, semblables à ces bouquets que l’on jette à une diva après le spectacle et qu’elle ramasse avec des grâces de phalènes voletant autour d’elle. Mais ce soir, le temps me blesse à me faire mal, ce temps furibond qui ne laisse rien passer, à part nos jours qui eux, passent trop vite, bien sûr, qui partent au fil du courant comme des bateaux de papier.
J’aurais aimé vous parler de la montagne que j’aperçois de ma fenêtre, de sa coupole de givre, du souffle du vent sur les cimes gonflant les cheveux en les poudrant de blanc et faisant osciller les mélèzes comme les balançoires de l’enfance. Vous envoyer un peu de cet air pur qui se rit des pollutions parisiennes ou anglaises. Mais ce soir je pleure encore de te savoir dans ton hôpital, maman, où tu essaies de récupérer ton esprit un peu enfui par une brèche béante que je tente de colmater, à coup de douceur, à coup de patience dans l’azur infini de ce ciel de printemps, à coup de souvenirs retrouvés un à un, et à petits pas de trotte-menu, de petits progrès, des riens imperceptibles mais je les sens, moi, maman, de toute la force de mon espoir. Je te sens revenir doucement à la vie.
J’aurais aimé prendre ma guitare, vous jouer une chanson légère et gaie comme celle que tu aimais, tu te souviens : « J’aime bien mes moutons-on-on… j’aime mieux mes dindons-on-on...»  Et l’on riait… oh, comme l'on riait !

Mais ce ne serait, je crois, que la ballade mélancolique de la lampe-tempête qui vacille  un peu dans l’air du soir. Toujours allumée mais comme épuisée d'avoir trop veillé.




****




Merci à toutes celles et à tous ceux qui m'ont adressé depuis le 23 janvier des messages privés, des commentaires chaleureux, des signes, des petits mots d'amitié, qui m'ont formidablement aidée dans ce moment difficile. Je crois que le plus dur est derrière nous, ma petite maman est entrain de remonter doucement la pente. On ne peut jurer de rien, mais je l'espère de tout coeur en tous cas. Merci vraiment. A tous.
Je vous aime. 

écritoire vanishingintoclouds(3)
Love Me by Yiruma on Grooveshark

09 mars 2014

La poésie des choses





Remarquez-vous comme les choses transpirent d'une poésie qui leur est propre? Une sorte de méta-existence,  indépendante de celle que notre bon vouloir un peu étriqué leur donne. Nous qui aimons les étiquettes. Non, vous ne le remarquez pas...forcément, il faut avoir le goût de se pencher naturellement au-dessus du vide. Le goût du vertige existentiel. Ce n'est pas gagné dans ce monde de terreur rationnelle... 
Si, vous le remarquez? Ah! Tout n'est pas perdu alors.
Alors vous devez comme moi aimer regarder luire un trottoir mouillé à la lumière des lampadaires de ville, non?  Vous commencez à saisir le vertige? ...De petits zig-zags de lumière humide se forment alors en tremblant et en variant de forme et de couleur. C'est divinement beau, pour peu qu'une tache d'huile vienne ajouter de l'arc en ciel à l'ensemble.
Une éruption de parapluies multicolores sous l'ondée printanière, et l'asphalte s'exalte soudain, comme s'il respirait, d'une respiration  joyeuse et inattendue.  Tels des centaines de  champignons ayant poussé d'un coup au signal de l'orage.
Des drapeaux qui claquent, comme des flammes de soie au vent du soir.
Des verres de cristal alignés sur le zinc d'un bistrot, fragile cathédrale de sable.
Les objets du quotidien ont leur vie secrète, autonome, et quand nous dormons, c'est bien connu, ils s'animent. Ce qui est moins connu, c'est qu'ils le font aussi quand nous sommes éveillés. 


Et l'on est alors ébahi par la poésie des choses. 

Ne riez pas. En ce moment, j'y puise ma force, et une ou deux certitudes qui m'aident à affronter mes doutes.



















Photos du net



It Never Entered My Mind by Chet Baker on Grooveshark

07 mars 2014

Le premier sourire du matin


Elle aime se maquiller. Elle aime ce rendez-vous secret et tendre avec elle-même, cet instant de douceur, ce chouchoutage bi-quotidien. Maquiller...démaquiller... Sentir les parfums, les crèmes de maintenant, aux textures soyeuses, fondantes, étonnantes. Masser doucement sa peau, se caresser, suivre les contours du visage, souligner l’œil, sublimer les lèvres. Mettre du brillant, de l'étoilé, du scintillant sur les ternes et mortelles pâleurs. Divine mission d'embellissement, elle ne dit pas encore de ravalement, mais c'est une façon de se préparer à l'inéluctable. Et aussi de le reculer. 

Elle sait combien cela peut paraître futile, superficiel même.
Et pourtant...sourire dans son miroir, n'est-ce pas le premier geste bonheur du matin? S'aimer soi-même, infiniment, se câliner, pour aller vers les autres et leur sourire...le premier acte d'amour?
Elle sait que prendre soin de soi, soigner son image, lui donne bonne mine et de la joie dans le ventre, même et surtout quand les matins sont boudeurs et que la vie grisaille. 

Elle sait que certaines restent naturelles. Soit elles sont sublimes, soit elles s'en foutent. Mais elle, elle ne s'en fout pas. Et elle  n'est pas assez sublime pour se passer de ses précieux accessoires. Sa trousse magique. Sa palette. 
Elle aime le silence de son alcôve où se trame la transformation, elle sait bien que c'est seulement dans les films que la fille se réveille le matin avec un rimmel impeccable, et un teint de fleur, elle voit bien que cela lui demande bien plus de temps qu'à vingt ans, mais quelle importance? Elle se maquillera toujours. Elle jettera toujours un coup d’œil furtif dans la lame de son couteau, ou dans une vitrine, pour vérifier le juste ordonnancement de son visage. 
Et puis, elle aime les hommes. Les hommes qui aiment les femmes qui se maquillent. 
 Elle aime adoucir le monde dans un nuage rose et doré.  Alors, même en traversant le jardin de ville, même en achetant le journal, elle se sent Lauren Baccal, Sophie Marceau, Demi Moore. Une diva des parkings, une diva de province. Mais une diva quand même.
Lauren Bacall




Petite ouverture à danser by Erik Satie on Grooveshark

04 mars 2014

La Vallée aux Loups




















Me promenant dans le parc entourant la maison de Chateaubriand, dimanche, je laissai volontiers mon esprit vagabonder comme il avait dû le faire lui-même, en son temps, au long de ses jours de mélancolie romantique.

Le cadre s'y prête. Une demeure somptueuse, au perron encadré de deux belles Cariatides. Un jardin anglais peuplé d'oiseaux et d'arbres rares.  La pensée m'effleura qu'il devait être certainement plus facile au propriétaire d'un tel lieu d'écrire de la poésie, que pour l'ouvrier du dix-neuvième siècle se rendant à la mine... 

Cependant, c'est plutôt sur ma propre vie que je me suis retournée alors, m'arrêtant pour souffler au bord de ma route, après les événements des dernières semaines dont je n'ai pas trop parlé ici, ne sachant pas forcément m'épancher dès que cela touche à l'intime. 
Des événements? 
Rien d'extraordinaire. Des choses banales qui arrivent à tout le monde. Juste de la vie coulant comme de l'acier fondu dans mes veines, l'entrelacs embrouillé des relations humaines, pas toujours faciles, pour ne pas dire jamais, et l'impression parfois pénible de ne plus m'appartenir. La fugace sensation un peu amère de donner beaucoup sans vraiment recevoir, alors que je sais bien qu'il ne faut rien attendre, jamais, lorsque l'on donne de soi. 
Des choses banales qui arrivent à tout le monde, oui, bien sûr, mais quand elles arrivent, on croit qu'on est le seul, la seule à les éprouver,  à se débattre dans cette vallée aux loups qui hurlent en vrillant les tempes. 

Et puis, au détour d'un sentier chez François-René, un champ de jonquilles, comme une gerbe de promesses éclaire soudain la prairie, symbole d'un renouveau, d'un espoir que j'attends, et auquel j'aspire: la paix du coeur et de l'âme, et la plénitude de mon corps apaisé de ses tensions. La simple caresse du vent dans les magnolias. Le cri perçant d'un corbeau. Toutes ces choses simples qui ancrent pourtant la vie profondément. Et l'immense chaleur qui m'envahit toujours au contact de mes chers enfants. Mes amours éternels.
Tout cela me redonne la force , et la certitude que le souci va s'éloigner. Que des êtres bons et généreux m'entourent. Et que mes frayeurs ne sont que le résultat d'une trop vive imagination. 
Il me semble que mes mauvaises pensées se sont un peu envolées dans le ciel plombé de la Vallée aux Loups.


Photo moi.




Andante by Schubert on Grooveshark