J’avais dix-sept ans ; j’aimais déjà le monde et sa lumière. La rage au front, le bonheur imprudent et volage, je baladais mes illusions en oriflamme. Me frottant à la perfidie, au sarcasme et aux airs supérieurs de certains de mes compagnons d’étude, qui m’appelaient le bébé. J’avais un an d’avance, il faut dire. J’étais naïve, de la naïveté troublante des filles qui découvrent le pouvoir de séduire sans vraiment y croire. Comme impressionnées d’elles-mêmes, et d’une pierre un peu magique qu’elles auraient tenue dans leur main et qui aurait lancé des étincelles vertes.
Qu’il
était beau, cet Alexandre qui surgit tout à coup dans ma vie. Un cou puissant
de taureau, des boucles brunes et des yeux de braise. Des bras forts, un
sourire…Et bon sang, quel sourire … Dès que je l’aperçus le monde vacilla, et
mon journal intime devint le théâtre secret de mes complots d’amoureuse :
il me le fallait. Je voulais ces mains, ce regard, cette peau burinée par des
nuits de bamboche.
Mais Alexandre était un bad boy, et puis il y avait cette Daisy Léonaud qui se suspendait à son cou comme une araignée venimeuse. Je rêvais souvent que je la giflais. J’aurais aimé qu’il la jette comme un mouchoir, qu’il me remarque, mais j’étais trop lisse. Trop bien élevée. Alors, commença pour moi une longue période de stratégie, et je m’encanaillai sérieusement pour le conquérir.
Mais Alexandre était un bad boy, et puis il y avait cette Daisy Léonaud qui se suspendait à son cou comme une araignée venimeuse. Je rêvais souvent que je la giflais. J’aurais aimé qu’il la jette comme un mouchoir, qu’il me remarque, mais j’étais trop lisse. Trop bien élevée. Alors, commença pour moi une longue période de stratégie, et je m’encanaillai sérieusement pour le conquérir.
C’est
l’époque trouble où mes jupes raccourcissaient, où mes pulls caressaient mon corps
sans aucun obstacle entre eux et ma peau, érigée, sensible, frémissante.
L’époque
où je me couchais de plus en plus tard, traînant dans des soirées interlopes où
les substances illicites dispensaient des nuages délétères qui déridaient les
lèvres et faisaient ciller les yeux.
Un
soir où Ramona, la sombre Ramona, me lança à nouveau une pique, comme à sa détestable habitude, Alexandre la
rabroua vertement et me prit dans ses bras pour me consoler. Son air vainqueur
et le parfum fou de ses doigts sur mes mains finirent de me faire chanceler. Je
me donnai à lui avec la fougue de mon impatience et de la passion dévorante qui
me consumait comme une torche. Il m’éblouit par son génie sexuel. Il faut dire
que je n’avais pas beaucoup de recul à l’époque, mais même maintenant j’en
garde un souvenir ému et il me suffit de l’évoquer pour prendre un air rêveur.
Il était doué et me donna sans doute une belle image de l’amour. Il aurait pu me demander n'importe quoi, je lui avais littéralement aliéné ma raison...
Hélas,
après quelques mois d’une relation qui me réduisit en cendre, il me fallut me
rendre à l’évidence. Ce n’était pas un garçon pour moi. Il me le dit d’ailleurs
lui-même, un soir de détresse où je sentis mes pieds s’effondrer sous mon
poids.
Il
m’embrassa tendrement en me disant que je méritais mieux que lui. J’eus beau me
défendre d’une telle idée avec énergie, rien n’y fit. Il m’abandonna à mon
chagrin et disparut de ma vie. Définitivement. Et quelques semaines plus tard,
ma voiture toute neuve termina sa route contre un rocher. Je pensais trop à
lui. Je ne crois pas avoir voulu mourir...Mais est-on sérieux quand on a dix-sept ans ?
Mon père conclut que je n’avais pas assez d’expérience après l’obtention de mon permis. Mais je savais moi, que j’avais quitté les rives ouatées de l’enfance pour me jeter à corps perdu dans l’âge adulte, et que j’exprimais là le désespoir de mon cœur et de mes tripes d’avoir brûlé d’un amour impossible et sauvage.
Mon père conclut que je n’avais pas assez d’expérience après l’obtention de mon permis. Mais je savais moi, que j’avais quitté les rives ouatées de l’enfance pour me jeter à corps perdu dans l’âge adulte, et que j’exprimais là le désespoir de mon cœur et de mes tripes d’avoir brûlé d’un amour impossible et sauvage.