28 octobre 2025

J'ai roulé










Dans le giron tranquille de ma cage 
de farfadet
J'ai roulé sur les derniers airs de 
Benjamin Biolay
La tête encore étourdie 
Des derniers cris, 
des belles joies explosives
de mes étoiles en apprentissage. 
Elles ont bercé ma vie cette semaine.
Dans leur douceur angevine et leurs regards d'eau claire.
J'ai roulé, j'ai roulé,
Repensant au bonheur comme à cette chose fragile et tendre
Qui va se nicher dans les endroits les plus discrets
Les plus secrets
Les moins attendus
Au fond d'un ciel d'octobre en feu
Une miette sur un pull de laine
Au bord d'une Loire en miroir
Dans la chaleur des bras aimants
 De ceux qu'on appelle ses proches, 
Même quand ils sont loin.
Glissant sur les toboggans de l'enfance 
Tellement là, en moi
Petite fille qui se balance
 abasourdie 
par le bruit 
nauséabond 
du monde

J'ai roulé doucement, sans à-coup et sans hargne,
Laissant filer les pressés, les agités, les mécontents
L'aiguille du compteur sur celui de mon coeur
Apprendre, apprendre,
toujours porter un regard neuf, écarquillé sur l'extraordinaire
en écoutant aussi la voix d'Etienne Klein,
Parler de la magie des nombres 
des arcs-en-ciel de chiffres devant mes yeux
D'un certain Alexandre Grothendiek
Sa théorie des motifs, sa vie en dents de scie, 
son destin ébahi
D'une certaine Ada Lovelace, une femme au cerveau puissant.
Un plus un égale mille
Mille façons d'aimer
Un plus un égale nous.

Dans le giron paisible de ma solitude choisie
J'ai roulé vers toi, mon amour,
J'ai pris mes jantes à mon cou
J'ai couru à toutes roues
Retrouver ma vie, le jardin, ses dentelles d'automne, son air transparent.
Les rhus étincelaient rouge sang 
dans le chemin, 
En bas.
Et le feu crépitait, jaune soleil.
L'âme en éveil, l'esprit troublé, le coeur tremblant, le corps en fièvre
J'ai roulé comme un galet
en pente 
vers 
Une mer vert émeraude
Equanime et mouvante 
à la fois
Cette mer, ces flots, c'est la vie.

La vie toujours là, impérieuse, magnifique,
 malgré les trombes et les gros temps.
Malgré ce fichu temps qui coule en nous
Qui nous tape en sarabande 
comme sur des tambours du 
Bronx. 
Et laisse, parfois, 
sur nos peaux 
des bleus qui s'étalent.







03 octobre 2025

Sac et ressac

 

Le coeur des Calanches de Piana






Je suis partie sur l'île de Beauté. C'était tellement beau que j'y ai laissé un bout de mon coeur. Effiloché par les Aiguilles de Bavella, engourdi par la douceur du soleil, égratigné de myrtes et d'arbousiers, épantelé par les chants corses, qui te bradassent les tripes, le soir, dans les ruelles de Bonifacio. Mon coeur a pris une vraie claque.
Avec tout ça, je me suis débloguifiée. Je n'ai pas eu envie d'écrire. Pas que je vous aie oubliés, lecteurs adorés, ça non... J'ai juste été emplie d'une langueur moite, avec ce bizarre sentiment de vibrer comme un roseau. J'étais tellement bien, là-bas, dans le silence, à contempler les villages perchés de Balagne, à marcher dans les forêts, à me baigner dans une mer chaude aux reflets turquoise et dorés. Avec des plages immenses et quasi désertes... Non, je n'exagère pas. 
Tant que tu n'as pas fait toi-même l'expérience de la Corse, tu ne sais que ce que l'on en dit.
Et on en dit, des bêtises... Mais il faut voir, toucher, sentir l'âme corse dans chaque pierre. Dans chaque rue, chaque maison. Il te faut parler avec les gens, pour qu'ils extirpent doucement du fond d'eux-mêmes ce qui fait leur particularité. Une fierté un peu farouche. Un attachement à la terre. Une rugosité cachant un coeur souvent passionné. Un profond sentiment d'îliens, le même qu'en Irlande, ou au Japon.
Et cette sensation d'être dans un pays étrange, singulier. Unique. Où jamais une seule fois je ne me suis sentie en insécurité. Au contraire, il m'a semblé que cette terre me protégeait, et me montrait un chemin nouveau vers moi-même.
Je suis partie. Je suis revenue. La vie est une vague, qui va et vient sans relâche. La lune, le sang, la mer, la sève, impriment leurs mouvements à tout ce qui est.
J'ai ressenti très fort cette fois le sac et le ressac des deux bonheurs du voyage : celui de s'éloigner, de découvrir un ailleurs, et celui de revenir, tel Ulysse, à ses racines. Riche de tout ce qui ne s'achète pas.


La marine de Bonifacio



Les Îles Sanguinaires

Ce ne sont que quelques extraits parmi des dizaines de souvenirs...