« Un frais parfum sortait des touffes d'asphodèles
Les souffles de la nuit flottaient sur Galgala.»
Victor Hugo, Booz endormi.
Chez Asphodèle |
C'est beau, chez Asphodèle.
La maison a ce charme fou des demeures dont les murs se sont
nourris de sentiments humains. C'est la maison d'une amoureuse. C'est la maison de la vie, de
l'amour. Et des livres aussi.
Presque l'antre d'une écrivaine. On pourrait se croire chez Colette ou Virginia Woolf. Il y flotte un air étrangement mélancolittéraire.
Ils sont partout, les livres. Ils font ployer les étagères, les tables,
le piano. Ils envahissent les chambres, s'entassent, comme en transit, dans les
corridors, et jusque dans la cuisine.
Comme ses petits carnets, où elle écrit tout ce qui lui passe par
la plume, de sa belle écriture sensible, et où se mêlent poésie et gourmandise.
Les planchers craquent délicieusement, ils disent les secrets des pas étouffés, les chagrins sous les châles, les mains usées par les lessives et tous ces labeurs qui courbaient ces femmes fortes qui se sont sans doute succédées ici pendant des décennies.
Elle m'offre une chambre donnant sur le jardin, spacieuse, avec un
cabinet de toilette un peu désuet. Il y a même un bidet, cet objet qui a
disparu alors qu'il était si pratique.
Les objets racontent eux aussi des histoires. Le bois, l'étain, la porcelaine. La lumière est belle quand l'aube dorée éclaire les vitres de la
cuisine.
Son petit jardin exquis frémit sous l'orage, fourreau de verdure percé de
fleurs. Le potager cache de grosses citrouilles de contes de fées. Les pots d'herbes aromatiques parfument le soir.
L'air sent le jasmin et la terre humide.
La maîtresse de ces lieux est belle d'âme et de visage. Délicate et généreuse. Comme sa table. Elle m'accueille à bras ouverts, à coeur ouvert, elle
épanche sa vie comme on raconte une histoire, belle et parfois triste.
Je lui confie des bribes de la mienne, en confiance. Le feu qui me brûle. Les embruns de l'existence. L'écume de mes jours. Et peu à peu éclôt le petit miracle des relations humaines.
Le début d'une amitié a quelque chose de ce moment subtil, vous savez, oui, ce moment de la première fêlure, quand le poussin fendille sa coquille, mû par le désir de vivre.
Le début d'une amitié a quelque chose de ce moment subtil, vous savez, oui, ce moment de la première fêlure, quand le poussin fendille sa coquille, mû par le désir de vivre.
C'est fragile et beau. C'est porteur d'énergie.
Asphodèle, je la connais depuis longtemps, c'est elle la « grande
prêtresse » des Plumes, cet atelier d'écriture que j'adorais,
où l'on jouait avec les lettres, avec les mots...
J'aime rencontrer les gens « en vrai » , décidément. J'ai aimé rencontrer Asphodèle, sous son ciel byzantin à la douceur de rose et d'opaline.
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Musique: Diana Krall Night and day