22 avril 2024

C'est mon coeur













Mon dériveur a mouillé l'ancre voilà bientôt six ans, dans une rade paisible et calme, où les questions trouvent réponse. 
Réponse en moi, d'abord, depuis que j'ai pris l'habitude de me faire confiance, et puis en l'Autre aussi, en pratiquant, un peu comme on enseigne le bouche-à-bouche dans les cours de secourisme, je dirais le coeur-à-coeur, mieux encore : le « âme-à-âme ».
Même plus besoin de parler par moment.
Je constate à quel point tout s'aplanit quand on a fait la paix avec soi-même, et que l'on ouvre son être en grand.
Être dans l'amour, c'est comme respirer dans une forêt.
C'est aussi, chaque jour, étendre ses bras vers les amis chers, leur offrir ce coeur justement, qui bat et qui sait s'accrocher pour eux aux branches de leur arbre. 
Parce qu'ils ont su être là, à un moment où le moral s'effondrait comme les bords d'un glacier dans la mer gelée.
Hier, c'était l'installation d'Anne-Sophie dans son nouveau nid. Parmi les escholtzias et les bouquets de sauge, le glou-glou d'une fontaine, et derrière la barrière un troupeau bondissant de petits moutons. Un paysage biblique. Un petit paradis greffé dans la verdure, dans lequel elle pourra oublier peu à peu les affres du passé, les vertigineux malheurs qui ont griffé son âme depuis l'enfance. Et se dessiner une nouvelle vie. Je suis si contente pour elle. 
J'ai revu Nathalie, un brin de petite bonne femme qui se bat comme une louve alpha contre l'adversité qui peu à peu s'éloigne, pour elle aussi. Combien de mes amies luttent ainsi pour retrouver leur flamme intérieure ensevelie sous des cendres de turpitude ? 

J'ai fait la connaissance, enfin, du grand amour de Sophie, dont elle nous parle avec les mêmes étoiles dans les yeux que lorsque j'évoque Paul.
Martine était là aussi, et Sylvie, et Gabriel, et Daniel, et Bruno, j'ai pensé : comme c'est important, ce réseau serré de chaleur humaine, comme c'est doux de pouvoir compter les uns sur les autres...
Et ce grand-père plein de sagesse, avec son petit éclair coquin au coin de l'oeil, contemplant les flammes du poêle, et cette grand-mère qu'il appelle Renette, parce qu'elle n'aime pas son prénom Renée... 
C'était tout simplement un moment parfait dans l'immense imperfection des choses.
Vendredi, j'étais à un concert hommage à un très grand poète, Claude Nougaro. J'ai redécouvert ses textes ciselés, ses jeux de mots claquants, ses rimes rutilantes, son jazz envoûtant. Nougaro qui ressemble tant à un autre Claude qui m'est cher.
En compagnie de notre ami Louis, un amoureux de la vie au coeur bondissant comme un tigre en boîte, toujours prêt à s'émouvoir pour les mystérieux bonheurs que l'existence nous offre à chaque pas. Une espèce de Célestine au masculin en somme.
Louis, je te dédie la chanson « C'est mon coeur », elle te va bien je trouve.
Dolce Vita et son mari sont passés me souhaiter mon anniversaire avec un peu de retard mais beaucoup de sincérité. Autour d'un café fort comme notre amitié. 
Et puis vous, mes amis, qui m'attendez fidèlement, qui vous inquiétez de moi dès que je reste un peu trop silencieuse. La petite musique de vos emails bercent ces jours refroidis par la lune rousse, d'une chaleur douce et agréable.
Comme Louis, j'ai envie de dire « Bravo la Vie » !

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Toute ressemblance avec des personnages existants n'est pas totalement fortuite.


08 avril 2024

Surprises




 De temps en temps, mon père, ce héros d'un autre temps, nous rapportait de la ville une pochette-surprise. Il n'y avait pas vraiment de raison, ni d'occasion particulière. Il était comme ça, le dabe. Il aimait faire plaisir, voir s'allumer dans nos yeux cette petite flamme de bonheur enfantin. 
C'était une sorte de cornet de carton, aux couleurs vives, soigneusement différenciées entre filles et garçons. Les remises en cause des stéréotypes de genre n'avaient pas encore émergé dans les consciences. Epoque étrange où chaque chose semblait immuablement à sa place. 
J'avais déjà cette curiosité d'esprit qui me faisait me poser la question : ai-je le droit d'avoir une pochette bleue, celle réservée aux garçons ? Mon père me connaissait bien, puisqu'il me fit ce plaisir transgressif plus d'une fois, autant qu'il m'en souvienne.
 Mais peu importait : c'était la fête quand j'ouvrais fébrilement cette corne d'abondance, le coeur battant. Ce qui s'y trouvait avait moins de valeur que ce simple geste plein de suspense et de joie... Je sentais tout l'amour paternel enrubanné dans le papier de soie.

En retour, j'ai aimé très vite surprendre mon entourage. Préparer en secret ces infusions de coeur, ces embuscades d'amour qui font pétiller la vie des autres. 

J'en ai gardé le goût profond des surprises : rien ne m'enchante plus que de préparer soigneusement ces petits riens qui feront plaisir à leur destinataire. Jouer les pères Noël, les Mary Poppins, les Amélie Poulain, voilà mon truc. J'y trouve un plaisir subtil. Préparer le gâteau de Peau d'Ane, et y glisser un diamant.

Alors pour toi, dont l'horloge va sonner demain un nouveau tour de soleil, j'ai mijoté une escapade dont tu ne sais rien. J'ai hâte. Hâte de voir tes yeux, d'entendre tes exclamations confondues, ébahies, éberluées. Tu es si beau quand tu souris.

Et vous, me raconterez-vous vos surprises, que vous fîtes ou que l'on vous fit ?

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