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Nous sommes des êtres in-carnés. Au sens littéral, nous existons grâce à une enveloppe de chair.
Un bagage commun, tout le monde possédant les mêmes éléments de constitution de l'ensemble, et pourtant combien de déclinaisons!
Je suis toujours immensément surprise de la variété des visages et des corps.
Sur la plage, c'est un sujet d'observation inépuisable.
N'allez pas croire à un quelconque voyeurisme malsain de ma part (oh, et puis, croyez-y si vous voulez) j'ai une tendresse pour tous ces êtres qui sont unis par le même amour de l'eau, du sable et du soleil, sans souci de montrer leur corps.
Chaque déformation, chaque boursouflure, chaque plissement de peau est un peu de notre histoire commune, un livre ouvert sur ce qui nous attend à plus ou moins brève échéance, rien qui permette de se moquer ou d'afficher une quelconque supériorité complètement imbécile. Ce serait un peu comme se moquer de celui qui passe avant nous sur la chaise électrique.
Les diktats de la mode (comme on appelle cette horrible dictature médiatique qui consiste à magnifier la jeunesse et la sveltesse en en faisant les seuls canons de la beauté) embrument et faussent le jugement des uns et des autres.
Mais cette vieille dame fragile et ridée, dans son maillot une-pièce devenu un peu trop grand, assise à côté de moi sous son parasol rose passé, ses mains diaphanes tenant un livre de Somerset Maugham qui semble trop lourd pour elles, je la trouve belle.
Elle ressemble à Madeleine Renaud.
A côté d'elle, un couple. Les cheveux sont rares et gris. Le vent a relevé ceux du monsieur, et collés par le sel, ils lui font une petite huppe un peu ridicule. La dame a ses deux seins posés sur son ventre.Ils témoignent ainsi d'une longue existence de bons et loyaux services, à être choyés, gonflés de lait, crevassés, tétés, caressés et ballottés en tous sens. Leurs deux ventres possèdent plusieurs étages de graisse forment des vagues, on dirait des rouleaux de tissu empilés. Pourtant, la défaite de leurs corps, avachis par le temps, n'est pas importante. On ne voit que leur amour transparaître dans tous leurs gestes attentifs à l'autre. Rien n'existe à part eux. Ils sont en vacances, ils s'aiment.
Je les trouve beaux.
De l'autre côté, une bande d'adolescents à la grâce insolente, lisses et fermes et insouciants, courent sur le sable en se renvoyant un ballon. Leur peau rutile, éclate, brunie comme un pain chaud. Je les trouve beaux, évidemment.
Étendue sur ma serviette, entre mon passé côté jardin et mon avenir côté cour, j'observe mon enveloppe charnelle qui n'est déjà plus ce qu'elle était et qui n'est pas encore ce qu'elle sera.
Et finalement, je me trouve belle.
Ah, le genre d'expérience que je ne pourrais partager... je ne m'allonge jamais sur une plage. Je préfère y marcher, surtout en hiver. Ben oui, je suis fou !
RépondreSupprimerJ'y suis allé très peu... Jamais de vacances en été. trop de travail pendant que les usines ferment pour réparation des installations...
RépondreSupprimerbelle journée bises
Moi aussi.
RépondreSupprimerC'est un texte absolument délicieux... j'aime ta description pleine de tendresse de tes voisins de serviette... j'y serai dans un mois et je ne suis pas sûre du tout de me trouver belle mais... bon
RépondreSupprimerj'aime énormément la description que tu fais de tes voisins de serviette... tes mots réconcilient chacun avec leur corps: c'est peut-être plus important que tu ne le crois
RépondreSupprimerMERCI Célestine
Que de vérités dans ce texte
RépondreSupprimerTu vois , je ressens exactement la même chose dans les vestiaires avant nos spectacles , j'entrevois des corps qui ont vécu , filles sveltes qui pourraient nous faire pâlir , et ...étrangement , j'accepte le mien , ce corps ni vieux , ni jeune
ah oui , c'est bien de te lire , c'est tellement bien décrit ces traces du temps sur la peau
merci
la plage ...grr , là , tu m'énerves avec notre temps de Novembre ;)
Tu donnes envie de s' asseoir à côté de toi...Ici, pour le moment, t' arrives, tu te déshabilles, et tu te baignes sous les yeux ébahis de 3 ou 4 personnes emmitoufflées dans des K-Way ....Quand on leur dit qu' elle est bonne , font une tit' moue .....
RépondreSupprimerBon farniente, Célestine.
Et comme tu as raison! Je vois ce que tu veux dire... les gens sont beaux s'ils sont bons et paisibles...
RépondreSupprimerEt puis le temps qui court. Et puis l'enveloppe charnelle qui se déforme, s'agrandit ou rétrécit. Seul l'âme reste immuable, si parfois l'esprit laisse aussi quelques plumes dans la bagarre.. Le corps de l'homme ainsi comme un meuble trouve son sens au-delà du temps. Et le miracle se renouvelle qui sait trouver la vraie beauté dans l'autre.
RépondreSupprimerCourrir après la beauté parfaite ou laisser le corps se dégrader : entre le deux, la sagesse de ralentir l'usure par un sage entretien, de travailler aussi son regard à l'indulgence, d'apprendre enfin à lire les âmes au delà des corps. Et l'élégance, et la dignité, dernier refuges, derniers barrages.
Aimer n'a pas d'âge, ni de couleur non plus, ni d'odeur seul l'immense respect de l'autre qui remplit son être et se repaît de lui.
Cueillir la beauté des gens, la collectionner, se fabriquer avec ...des santons.....et reconstruire le monde.
OUI, c'est exactement le sentiment qui m'anime à la lecture de votre commentaire, cher anonyme, cher collectionneur de santons.
RépondreSupprimerEDMEE la méchanceté est d'une laideur repoussante, je suis d'accord avec toi.
PIERROT BÂTON tu vis au pôle, ou quoi? désolée , mais je suis sûre que tu es très jolie avec ta 'tite moue.
JEANNE Ah les vestiaires de filles, voilà encore un excellent lieu d'observation de nos semblables. Euh...je vois que toi aussi tu vis au pôle!L'été finira bien par arriver chez vous aussi, les filles!
COUMARINE oui, les gens ont besoin de l'être, réconciliés.Même et en premier lieu avec leur corps.Je suis heureuse que mon billet te touche.
BRIZOU si, si je t'assure, tout le monde peut se trouver beau en se mettant dans l'état d'esprit de mon billet: tout ce qui ne nous paraît pas conforme aux idéaux de beauté doit être reconsidéré comme des traces de notre histoire personnelle. Et se dire aussi que personne n'y échappe. Après bien sûr, il y a le minimum d'entretien de notre corps, qui est une sorte de respect que l'on a pour lui. Certaines personnes font hélas plus attention à leur voiture qu'à leur corps.Nous sommes les premiers spectateurs de nous-mêmes: Si nous ne nous regardons pas avec tendresse et indulgence, qui le fera?
RépondreSupprimerCEDRIC J'ai le droit de te croire, pour une fois?
RépondreSupprimerPATRIARCH Quelque chose me dit que ça ne t'a pas vraiment manqué de ne pas aller aux Bains de Mer...
WALRUS Tu me rappelles le poème de Jules Supervielle "la mer secrète". J'aime aussi énormément, comme toi, la mer en janvier.
En somme tu ressembles à la Vénus de Milo.... Fais voir ?
RépondreSupprimerANDIAMO oui mais avec des bras...
RépondreSupprimer:-)
Y'a pas à dire : la tendresse reste la plus efficace des crèmes de beauté ! :~)
RépondreSupprimerNan! pas au pôle mais le Bout du Monde c' est dans la Manche (et tout de suite dans la Manche, c' est pas dans la poche au niveau température...) Mais l' eau est bonne, j' te jure!
RépondreSupprimerPB Ah! okkkkayyyy! la Manche. Brrr! déjà que je trouve la Méditerranée encore un peu frisquette...ok , je sors--->
RépondreSupprimerTANT BOURRIN C'est très joliment dit!
Je suis belle dans le regard de mon mari et ça me suffit!
RépondreSupprimerEh oui, CATHNOUNOURSE, c'est exactement ça! Bonne journée pleine de petits bonheurs!
RépondreSupprimerBonjour !
RépondreSupprimerCe billet me rappelle des souvenirs d'autrefois....pouvoir aller a la plage, quelle chance !
Philosopher sur la plage en observant ses voisins. Et penser à ce qui a été, ce qui est et ce qui sera peut-être. Et un peu de narcissisme pour conclure. Pas de mal à ça, mieux vaut se trouver beau ça rend content.
RépondreSupprimerBonnes vacances. dinosaure80.
J'aime observer également à la plage,mais je n'y vais que trop peu, je crois que ce que je prefere c'est encore à la terrasse d'un café capter les conversations. J'y resteraiS des heures.
RépondreSupprimerContente que tuto aille mieux !
C'est exactement ce que je n'aime pas trop à la plage...
RépondreSupprimerJe n'aime pas trop être vu, ni observer les autres, cela me dérange un peu... et pourtant, c'est la vie : nos corps et leurs transformations.
Je préfère une petite crique déserte, bien tranquille.
Moins de grains de sables... moins de regards... je me coupe un peu du monde c'est vrai.
Bisous
✰✯✮ Laure ✮✯✰
http://suivre-mon-etoile.blogspot.fr/
souvent je me dis que notre visage est le fruit de nos expériences... le corps, celui des vies de nos ancêtres... pensées irrationnelels je te l'accorde !
RépondreSupprimerMais comme toi j'éprouve beaucoup de tendresse pour les corps....