La question se pose. Et plutôt urgemment ces temps-ci. Peut-on avoir sans être? Peut-on être sans avoir? Version plus moderne de l'ancienne maxime moliéresque:
"Faut-il manger pour vivre ou vivre pour manger?"
On approche de Noël, la fête aux mille contradictions. Tant de bonheur dans les yeux des enfants, d'espoir dans les messes dites, tant de générosité dans les dons, tant de lumières, de luxe, de cadeaux, d'attentions, de promesses.
Mais aussi tant de gaspillage, d'orgie de consommation, de déballage de richesses indécentes. Tant de mercantilisme vaniteux et oublieux des vraies valeurs de la fête.
Et par un contraste implacable, toute la misère du monde qui n'en est que plus accrue, comme les éclats de silex de la route sont rendus soudain terriblement coupants par la pluie fine du matin.
Des tonnes de nourritures, des monceaux de mets raffinés, de dindes farcies, de poulardes rôties, de homards et de fruits de mer, des montagnes de chocolats, et derrière les fenêtres , toujours des petites marchandes d'allumettes qui tremblent, des petits ramoneurs qui meurent de faim et de froid.
Des tentations à profusion dans les vitrines chatoyantes comme des gerbes d'étincelles, des ordres publicitaires péremptoires: "N'attendez pas, courez acheter votre voiture avant le 31 décembre!" et devant ces vitrines, des gens qui n'ont pas de quoi s'acheter une paire de chaussures...
Depuis toujours, c'est cette contradiction qui m'étouffe un peu à Noël, comme une arête qui a du mal à passer. Alors j' avale de la mie de pain, je bois un grand coup et je m 'amuse quand même, parce qu'il y a les enfants, les étoiles, le sapin, la magie...Les vacances en famille, les jeux de société, les feux de cheminée, la buée qui coule sur les vitres quand cela sent si bon dedans, et qu'il fait si froid dehors...
On a beau faire, on a tous cette petite voix qui nous agace, qui nous titille, qui nous oblige à chanter, à crier bien fort pour ne pas l 'entendre. Cette petite voix qui s'appelle culpabilité. Qui de nous ne l'a jamais entendue?
Alors arrive à notre secours la bonne conscience. On se trouve toutes sortes de bonnes raisons d'oublier notre honte et de profiter de notre bonheur. Et on a raison, quelque part. On a travaillé dur, on a gagné notre croûte à la sueur du front (avec ou sans clim) on a donné aux pauvres, on a donné au téléthon, au sida, aux handicapés, aux restos du cœur, on mérite bien de faire un peu la fête, de gâter les enfants, de faire quelques agapes.
Mais, quand même, la petite voix est toujours là. Elle continue son ostinato lancinant, en sourdine, et ressort de temps à autre pour nous rappeler qu'il est urgent d'être, plutôt que d'avoir...Moi, c'est aujourd'hui, en traversant les boulevards illuminés de ma ville enrubannée dans ses paillettes, dans les effluves de parfums chics et de crêpes chaudes, que j'ai croisé un sdf dont le regard m'a glacée parce qu'il n'exprimait plus aucun sentiment: ni peur, ni haine, ni même résignation. Juste rien. Le vide intégral. Comme déserté par son humanité.
Bon voilà, ça , c'est fait, je voulais écrire ce billet suffisamment tôt pour ne pas trop vous plomber l'ambiance. Désolée, fallait que ça sorte...
photo internet
chère célestine ,
RépondreSupprimernon ça ne plombe pas , c'est le réel, pour de vrai ;
Ça ne plombe pas : je ressens peu ou prou la même chose... La période des fêtes, sa folie commerciale, sa frénésie d'achats, me dépriment complètement. Je rêve de sobriété et de partage, mais je crains que ces valeurs ne soient plus dans l'air du temps !
RépondreSupprimerincroyable " sainte Chronycité " qui vient me voir ce matin à la lecture de ton blog...
RépondreSupprimerNous venons de regarder le dvd du film que nous n'avions pas vu à sa sortie et tellement l'aimer et je suis comme chaque année en train de me démoraliser dans l'ambiance de ces fêtes de Noël qui ne veulent plus rien dire, sinon : sortez vos sous. Alors comme chaque année je vais essayer de faire plaisr à mes proches, sobrement, à la mesure de mes moyens et de retrouver des valeurs enfouies sous la montagne de pubs qui encombrent la boite aux lettre...
j'aime vraiment beaucoup, beaucoup tes textes, et suis heureuse de cette rencontre au détour de la toile.
C'est le regard que je voyais chez les anciens de l'hospice avant guerre. La plus part étaient déjà dans l'au delà.
RépondreSupprimerNous avions réussi à ce que chacun ait une pension décente et maintenant j'ai bien peur qu'on ne revoit cette misère......D'ailleurs elle est déjà là, chez des plus jeunes...
Bises !
Depuis deux ans, j'ai opté pour ne pas aller en ville au mois de décembre. simplement parce que "tout ça" me donne la nausée...
RépondreSupprimerQuestion petits cadeaux, j'ai tout acheté par Internet. C'est terminé depuis un moment.
Noël sera une occasion de rencontres familiales.
Mais ce n'est certainement pas « une fête »...
Disons que ma conception de la fête n'a rien à voir avec ça...
http://blogborygmes.free.fr/blog/index.php/2008/09/08/1015-la-jettatura
RépondreSupprimerCe petit lien qui te conduira sur un "conte" de Noël à ma façon.
Nous aurions plusieurs raisons de ne pas aimer Noël chez nous... Et pourtant nous le fêtons toujours dans la joie ! Ne serait-ce que pour les enfants, et maintenant les petits enfants.
Bonnes fêtes ];-D
moi aussi je déteste cette atmosphère exacerbée de bouffe, de clignotements et de rubans...
RépondreSupprimeret là par terre du monde qui mendie et devant lesquels on passe, en regardant ailleurs..
Ca me fait mal au ventre aussi
Et pourtant je ferai une table de fête, un sapin que je décorerai avec amour, pour réunir toute ma petite famille
J'ai toujours un coin de mon coeur qui se sent coupable
Ton billet rejoint par le thème celui de Damien ainsi qu'un mien billet pas encore publié... C'est un peu la saison de cette remise en question, lorsqu'on touche du doigt le contraste de plus en plus grand entre notre société de consommation et la pauvreté de plus en plus dure qui règne dans toutes nos villes... Mais comment te dire, étant donné que Noël représente pour nous avant tout la naissance de Jésus, la dimension religieuse et de partage a toujours été très présente, les cadeaux et les repas étant relevés certes, mais sans tomber dans l'orgie non plus; j'essaie de maintenir cet esprit. de même pour les cadeaux qui représentent un budget raisonnable (en plus, étant donné que nous sommes très nombreux, ce ne serait pas tenable...). Ce qui me glace, ce sont ces personnes qui détestent Noël parce qu'elles n'ont personne à aimer ou qui peuvent les aimer ou parce que cette fête est porteuse de mauvais souvenir. J'aimerais pouvoir inviter chaque année une de ces personnes afin que ces yeux puissent briller à nouveau. Nous le faisons tout au long de l'année, je vais proposer à Amaury qu'on le fasse aussi pour Noël. J'espère que tu te portes mieux. Bises un peu moins froides d'ici.
RépondreSupprimerJe n'aime pas Noël. Pour plein de raisons, certaines rejoignent les tiennes et d'autres : à Noël, on ne voit pas le jour, je veux du soleil, il fait froid, je n'aime pas me coucher tard.
RépondreSupprimerChaque année, nous invitons une personne seule. Entre avoir et être, il y a partager. Du coup, on agrandit le cercle de lumière qui fait trop souvent défaut malgré la profusion de guirlandes.
RépondreSupprimerDans ma famille paternelle, depuis le décès de mes grands-parents paternels en 1993 et 1997, tous leurs enfants, beaux-enfants, petits-enfants et maintenant arrières-petits-enfants nous réunissons le 25 décembre à midi dans un restaurant (plus possible dans les maisons car on dépasse les 35). Et pas de cadeaux pour personne, ce qui semble soulager tout le monde... Quel gain de temps! Alors pour moi Noël est une fête que j'apprécie car je n'ai aucun cadeau à acheter (on ne s'en offre pas), aucun préparatif culinaire à préparer (vu qu'on est au resto), mais c'est l'occasion de revoir mes 14 oncles et tantes, mes cousins, mes filleuls. Et au niveau de la décoration, chez moi, c'est juste un sapin décoré et rien d'autre.
RépondreSupprimerNoël est ce que nous voulons qu'il soit (excepté pour les personnes seules ou malades bien entendu).
Ouais trop bien il neige sur le blog de Célestine!!!! Yeeeees !!!!
RépondreSupprimerCe qui est bien chez Célestine, c'est qu'on peut y venir à n'importe quelle heure du jour et de la nuit !!! c'est toujours ouvert!!!
RépondreSupprimerJ'ai vu une femme le regard perdu comme ça dans le néant sur les grands boulevards vendredi.
RépondreSupprimeroui! tout cela est vrai!cette année,j'ai envie d'un noel vrai,sincere,sans fioritures et arriere pensées..non, je ne peux pas donner..moyens restreint mais cette envie de faire plaisir aux enfants; de voir leur visage s'illuminer, d'etre en famille et le savourer, cette joie simple que d'etre ensemble...et une bougie qui brulera sur la table pour indiquer la presence de ceux qui nous manquent tant..la vie n'est pas toujours juste! mais bonnes fetes a tous!!
RépondreSupprimertu as raison..bien sur...
RépondreSupprimermais pourtant je fêterai Noël.;avec ma tribu.;au chaud chez moi...
mais samedi prochain on fête Noël dans l'EHPAd où je travaille.;et je vais mettre une jolie robe,des bijoux fantaisies,je vais leur servir un bon repas,les aider,les faire sourire.;ma modeste contribution..mais je pense que ce sera bien..;
Bien sûr, ce billet j'aurais pu l'écrire,comme bon nombre d'entre nous ici, (sans la classe et le style qui te caractérisent bien sûr) mais sans chercher de bonne conscience, je me dis aussi que réunir les siens, sans disputes, autour d'un bon repas et de cadeaux offerts avec amour (deux par personne, on tire au sort), c'est déjà inestimable et je me sens très riche de tout cet amour qui se renouvelle à Noël. Et cet amour restreint aux proches me permet d'aller vers les autres.
RépondreSupprimerCette petite voix je l'ai en moi aussi!
RépondreSupprimerIl ne faut surtout pas ignorer toute cette misère peut-être déjà en ne tombant pas dans le démesuré!
C'est terrible cette course à la consommation! je le ressens tout le temps et très fort. alors en ce moment, je fuis les rues commerçantes et n'achète que le nécessaire.
RépondreSupprimerla contradiction c'est le plaisir des lumières et des décorations qui ramènent à l'enfance
Vous avez raison, bien sûr, à cent pour cent. Pas facile de rester dans le juste milieu, faire plaisir aux enfants sans les pourrir, se régaler sans gaspiller, illuminer sans trop dépenser, et s'amuser sans oublier aussi que Noël est une fête mystique. J'essaie de faire tout cela, et ainsi, quand je me retrouve en accord avec moi-même,la petite voix disparaît un peu, car ce que je m'efforce de distribuer en amour la rend un peu moins insupportable...
RépondreSupprimerMerci à tous, et je crois que ,chacun à sa façon, nous allons fêter un Noël équitable, écologique et recueilli.Bonnes fêtes à tous avec un peu d'avance.
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Bon ça se voulait être un sapin de Noël, bizarre...il n'y en a qu'un bout...Ce n'est pas concluant! Mais le cœur y était.
RépondreSupprimer*******Célestine*************
Cette petite voix revient chez moi depuis que je suis toute petite ... j'espère un jour avoir enfin le courage de l'écouter et inviter à ma table un ou une inconnue ! Maintenant, va falloir dépasser la méfiance, les réflexions ... mais je ne désespère pas, peut être me mettrai je à aimer Noel !
RépondreSupprimerJ'ai trois tâches noires sur ma chemise blanche, que font-elles là, comment peut-on arriver à être « poser là » sur toute cette blancheur et encore une foule de questions sur ELLES.....?????
RépondreSupprimerLes réponses : un questionnement, des problématiques !!!
Pourquoi toute cette blancheur, pourquoi pas une tâche blanche et pourquoi de blanc pour disparaître et se fondre, pourquoi pas une chemise noire, pourquoi une vision unique du noir, pourquoi n'avoir d'yeux que pour le blanc, pourquoi les réponses sont des questions, pourquoi les questions sont des réponses, pourquoi,
POURQUOI ????????????
Faire des constats, être réaliste, qui a eu l’idée de me créer « être pensant » ???
Alors je me dis :
- tes épaules ne sont pas assez larges pour porter tout ce noir et tout ce blanc donc vis !!
Et vivre m’apporte le bonheur
et LUI, je le partage !!!!!
Avant, dans ma trépidante vie de travailleur laborieux,
avant de manger à la « va-vite » un kebab frites,
avant, en prendre un deuxième avec un chaud café et d’un sourire le donner à cet homme au regard sans flamme, assis au coin d’une rue dans la froidure cinglante de l’hiver !!!
AVANT ET AVEC partager !!!!!!!
Vivons avant que de mourir.
La vie, heureusement, foisonne de mille couleurs, pour nous faire oublier le gris...
RépondreSupprimerDe Noël émerge bien une atmosphère d'opulence par rapport à la misère qui nous entoure et que souvent nous ignorons beaucoup trop.
RépondreSupprimerTu as bien raison de le sougligner avec des mots qui jonglent si facilement.
Génial ta nouvelle mise ne page que des bulles comme des boules de Noël - magnifique!
Ca réchauffe certaienemtntes lecteurs qui sont parfois pris en otages par la neige qui pour info persiste depuis 19 jours au plat pays. (C'est un record depuis 1901)
J'espère que ce beau manteau blanc profitera beaucoup aux entreprises spécialisées dans la location de skis de nos ardennes.
Car ces gens doivent avoir la vie dure en l'attendant.
Makem
Qu'il est beau ton texte !
RépondreSupprimerMoi aussi je suis prise dans cette contradiction...
Cette année, moi l'athée ex-bouddhiste que je suis, et bien j'ai accompagné mes beaux-parents à la messe de minuit. C'était magique, le sermon d'un abbé théologien, féru d'exégèse, de mots simples et humanistes sur la richesse, la pauvreté, le dénuement, et l'essentiel...
Oui, rien n'est jamais figé, et rien n'est plus mortifère que les idées arrêtées sur les choses; comprendre et agir en conséquence, et en harmonie avec mon moi profond, voilà comment j'essaie de concevoir toute mon existence. Merci de tes mots.
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