23 mai 2022

Maintenant








A l'aube, j'ai entendu comme la voix d'un ange. Elle disait.
« Maintenant. Là, tout de suite. Tu sais, le gérondif latin « manu tenendo » est clair. (C'était un ange érudit et linguiste) Il signifie : 
« Pendant que l'on tient quelque chose dans sa main ». Main, tenant. Tenant dans la main.
C'est joli comme étymologie, non ? C'est comme une évidence.
Mais que tiens-tu de si précieux dans ta main, qui donne à ce moment-cadeau le doux nom de « présent » ?
Mais la Vie, tout simplement. La putain de Vie.  (C'était un ange brut de pomme, qui ne mâchait pas ses mots)
Le fait de ne pas être allongé dans une boîte obscure, figé sur l'infini, décomposé, ou dispersé en poussière dans la mer ou au pied d'un arbre. Y penses-tu chaque matin, en ouvrant les yeux sur ce miracle ? 
La mort aura son tour. Elle le sait. Elle gagne toujours à la fin. Mais pour l'instant, tiens-la en respect. Traite-la en amie, apprivoise-la, je connais pour cela un moyen génial (C'était un ange sûr de lui) : prête ton attention à la Vie.  Profite. (Et hédoniste, avec ça !)
Ressens. Bouge, même si ce n'est que d'un battement de cil. Tu as un corps qui dégage de la chaleur, frissonne,  produit des fluides, des bruits, des borborygmes même. Nourris-le de belles et bonnes choses, bichonne-le, tendrement, car il héberge ton Être. C'est la plus belle des maisons. Ton vaisseau dans l'aventure. (C'était un ange poète, assurément)
Ecoute battre ce petit morceau de chair palpitante qui te maintient (encore cette idée de la main qui tient) droit·e sur ton fil d'Ariane, toujours étonné·e. 

La chance, c'est le principe actif infinitésimal d'une dilution magique. ( C'était un ange se soignant à l'homéopathie). Même quand tu traverses d'horribles tempêtes, elle est là. Ouvre ta main. Saisis-là, ne la laisse pas s'envoler.
Et dis-moi ce qui te rend vivant.  Maintenant. » 
Je le lui ai dit. 
Mais la liste est trop longue pour que je vous l'écrive.

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15 mai 2022

Lettres d'Italie (12) Epilogue

 





Ces trois jours à Venise furent un enchantement. Et l'apothéose d'un voyage de douze jours, un long rêve éveillé. Aujourd'hui, pour le dernier jour, levée tôt pour apprécier la place saint Marc presque vide, et puis, un petit tour en gondole, parce que quand même, c'est incontournablement agréable. Un long moment à l'Accademia, pour se nourrir d'art vénitien. Des milliers de pas, comme chaque jour, sur la longue promenade des Zattere, un quai ensoleillé donnant sur la lagune côté sud. Jusqu'à la Punta della Dogana, où l'on se sent les rois du monde. Et quand on se sent fatigué, on va prendre un latte macchiato sur le rooftop du Carlton, juste pour la vue. Je me suis emplie de belles choses. 

Je sais, j'ai tendance à exagérer, à tout peindre de couleurs vives comme celles des maisons de pêcheurs de Burano. Mais j'ai vraiment aimé partager avec vous, mes chers lecteurs, ces quelques moments quotidiens parmi tant d'autres. Quelques clichés, quelques mots, quelques poudres d'étoiles scintillantes rien que pour vous.
Je vous en offre encore quelques unes, en vrac. Parce que je sais qu'elles seront appréciées.
























14 mai 2022

Lettres d'Italie (11) Murano e Burano

 




Apercevoir constamment,  sur le visage de l’être aimé, cette capacité d'étonnement que l'on ressent soi-même au creux du ventre. Voilà le plaisir suprême du voyage.
Ainsi, cette journée très colorée fut partagée dans une harmonie totale.
J'ai préféré Burano à Murano. Les maisons de pêcheurs aux façades intenses forment un tableau irréel. Dans la vraie vie, on hurlerait de ces associations improbables de teintes, mais là, ça passe.
La traversée dans la lagune fut elle aussi un grand moment.
L'eau y a une couleur indéfinissable, ponctuée de goélands et de cormorans, telles les pièces noires et blanches d'un échiquier invisible.
De retour à Venise, nous nous sommes perdus des heures durant dans les ruelles. Découvrant toujours plus de merveilles. Et puis la soirée s'est prolongée fort tard, sur le Campo san Geremia, une des nombreuses placettes animées de la Serenissima. L'air était doux et transparent. Le vin pétillant et fruité. On a regardé passer des dizaines de gens, différents, joyeux, excentriques, pressés, amusants, sévères, en groupe, seuls, enlacés, jeunes, vieux, grands, maigres, sophistiqués, souriants, affairés, indifférents ou émus.
J'étais bien. On est rentrés tard. Il n'était plus temps d'écrire un billet.

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13 mai 2022

Lettres d'Italie (10) : Venise



A Myosotis



 

J'ai l'impression que je ne peux pas raconter cette première journée. Tout fut trop intense. De mon  émotion quand j'ai aperçu pour la première fois le Grand Canal, aux larmes que je n'ai pu retenir sur la Place Saint Marc, quand tout s'est mis à tourbillonner en moi, la chance d'être là, la fragilité de l'existence quand on pense à cette chance. Et l'orchestre du Florian jouait une de ces mélodies romantiques qui font chavirer le coeur...
J'en rêvais depuis si longtemps... je suis vraiment trop sentimentale !
Venise n'est pas racontable. C'est un lieu unique. Aucun équivalent. 
Mon amie Myosotis a su trouver les mots pour me parler de sa ville fétiche, et je lui ai fait confiance, avec raison. Se perdre dans les ruelles est un étonnement permanent. Des trésors de beauté s'y dévoilent à chaque coin de rue. Façades ocres, églises secrètes, ravissantes terrasses de restaurant, boutiques surprenantes. Et puis ces ponts, tous différents, enjambant les canaux où glissent les gondoliers. Ces portes au ras de l'eau, qui ont tant à raconter...Et ces gondoles omniprésentes, si symboliques de l'insouciance, de l'amour, de la dolce vita...
Le mariage des couleurs vives est récurrent, partout. Des bleus, des rouges étincelants. 
Je ne peux pas tout dire, de la lagune aux eaux turquoise, du palais des Doges, de la Fenice, du Rialto, du Danieli, des vaporettos, des verreries de Murano, ni du merveilleux hôtel où mes yeux se ferment ce soir, au terme de cette folle journée.
Heureusement il y a deux autres jours. 

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12 mai 2022

Lettres d'Italie (9) : Vérone

 



J'ai toujours beaucoup d'émotion à découvrir une ville fortement empreinte d'histoire. Et celle de Vérone est pour le moins époustouflante. Roméo et Juliette, même s'ils ne furent que des personnages de légende, restent le symbole de cette folie des hommes que l'on nomme la haine, et qui mène à tant de débordements outranciers. 
En flânant dans les rues et ruelles de cette majestueuse cité, je n'ai pu m'empêcher de songer à ces riches familles qui s'entre-dévoraient. A ces luttes de pouvoir et d'influence qui empoisonnent l'humanité depuis si longtemps. Où sont-ils, à présent, les Cappelletti, les Montecchi qui ont inspiré Shakespeare ? Un peu de poussière de tombe dans le vent de l'oubli... Leurs murailles leur ont largement survécu. Et le balcon de Juliette.
Heureusement, ces sombres relents d'histoire n'ont pas entamé ma bonne humeur et mon émerveillement continuels depuis le début de ce voyage.
L'étape d'aujourd'hui s'est achevée sur Mantoue, une autre belle cité regorgeant de merveilles.
Il faudrait plusieurs vies pour tout voir de ce coin d'Italie. 
Demain, je serai à Venise...

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