30 septembre 2017

Le lac miroir

Ornithopoème.







Au bord du lac. Les épaules caressées par l’enveloppe du vent.
Le miroir de l’eau me renvoie mon sourire. Mes pieds volettent au-dessus de l'herbe rase.
Sous la voûte des saules, les colverts disputent leurs plumes-velours aux feuillages. Leur nage criante troue le fil de la surface en harmonie. Concert de claque sons.
Qui sera le plus beau, miroir ? Des branches faisant la révérence ou, des canards, l’irrévérence ?
Leurs prises de becs rompent la digue de ma mémoire.
Et je me souviens. Je me souviens que vivre, c’est toujours intrigant.
Mille questions surgissent de ma perplexité que je chasse ce matin comme on chasse les mouches obstinées des échoppes.
Elles s’en vont. Elles s’envolent.
Je suis la berge emmitouflée dans ses ajoncs, roses d’aurore.
Je suis ce ciel ombré de nuées.
Je suis devenue l'eau et le ciel. Je me fonds.
Comme il est lumineux, ce vol d’oies en partance !
Cette fièvre impétueuse, impatiente, frénétique, bouillante, déferlante et violente et  qui tourne la tête et qui me rend vivante.
Là-bas le tumulte s'éloigne. Je sais qu'il reviendra. Comme les oies. Comme l'été. Je l'espère. Je ne sais vivre sans. En un mot comme en cent. C'est mon sang. Je veux vivre avec le V de vertige.
Les oies...Fugaces. Royales. Etirant leurs ailes blanches. D’autres oiseaux encore. Sarcelles et fuligules. Plouf ! Des poules d’eau qui pouffent. Des aigrettes au-dessus des aigreurs.
Torrent de plénitude me hissant le cœur comme on porte un flambeau. 
Le miroir du lac souriant.

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Pour les Impromptus littéraires sur La Magie des Miroirs

27 septembre 2017

Big Sur

Par Joseph Plotz — Travail personnel









Je lisais « Sur la Route »  au soleil, tout en sirotant négligemment un mojito sans alcool, à la terrasse du Loup qu'sort, quand j'aperçois un homme, plutôt pas mal de sa personne, quoi qu'un peu genre bellâtre, qui vient s'asseoir à la table à côté de la mienne. 
Sans timbre ni enveloppe, il m'adresse la parole. Tout de go. 
« Excellent choix! » 
Il faut dire que j'arrive rarement à lire plus d'un chapitre sans que quelqu'un me demande si ce que je lis est intéressant. Etrange question.  Je me retiens en général de répondre : 
« Non, non, c'est inintéressant au possible, mais j'aime bien me flageller » 
Mais mon inconnu de l'après-midi semble plus subtil, quoi qu'un peu infatué de lui-même.  (mais peut-on être infatué de quelqu'un d'autre que soi ?)
Je pose mon livre et l'observe dans un rayon oblique de soleil qui m'oblige à froncer le nez.
« Je comble mes lacunes en littérature américaine... » lui dis-je pour être polie, espérant qu'il comprendra mon grand besoin de me replonger illico presto dans ma lecture.

Mais il se lance dans un grand mélimélo panégyrique de tout ce qu'il connaît de Kerouac, puis Miller, Brautigan, Huxley, la beat generation, Gregory Corso et la côte Ouest des Etats Unis. Avec un luxe de détails un peu redondants, comme s'il voulait m'étaler sa culture en  confiture.  Et soudain, il me demande si je connais Big Sur. 

Il se trouve que par un hasard extraordinaire, mon ami Patrick vient juste d'ouvrir un blog au titre éponyme et mystérieux de Big Sur.
Alors moi, vous me connaissez, ne voulant jamais louper une occasion  de m'instruire, j'étais allée voir de quoi il retournait, épluchant mon wikipédiatre préféré. 

« Bien sûr, que je connais Big Sur » réponds-je, et je lui parle de son emplacement californien, de ses falaises ourlées d'un océan de jade, de son aqueduc, de ses résidences luxueuses et de ses panoramas imprenables sur le Pacifique. De ce lieu mythique où l'écriture toute en puissance de ces géants plane et nous fracasse comme la mer sur les rochers. De Romain Gary qui en a fait un décor de sa « Promesse de l'aube »  de Sharon Stone dont le personnage dans Basic Instinct y habite une maison. Et même des Red Hot Chili Peppers qui en parlent dans une de leurs chanson.

Vous savez quoi ? Je crois que je lui en ai bouché un big coin.
Merci Patrick. Voilà un coin qu'il ne me déplairait pas de visiter...C'est loin l'Amérique ?
- Tais-toi, et rêve...

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Pour rendre visite à mon ami Patrick, c'est ICI.
Musique: Road Trippin' Red Hot Chili Peppers






25 septembre 2017

Le dos rond

Sous titre: Orage, oh ? des espoirs ?


Photo du net



Quel joli mot que météore ! Un mot de lumière et de givre.
Un mot ancien, du temps où les hommes observaient apeurés les soubresauts du cosmos, les associant dans leur obscurité à quelque courroux ou caprice neptuniens. Dieu jouait à la pétanque, avec nos nerfs ou les allumettes.
Savez-vous que tout ce qui surgit dans le ciel, devant nos yeux éblouis, les phénomènes brillants et furtifs, les foudres et les tonnerres, l’eau dans tous ses états, pluies bénéfiques, neiges ouatées ou glaces scintillantes, précipitées sur le sol en chutes vertigineuses, les aurores boréales et les merveilleux nuages, les arcs-en-ciel et les tourbillons, tout, absolument tout, porte le nom de météore ? D'où le nom météoro-logie. La science des météores.
Science qui sait maintenant de façon certaine que le dérèglement climatique n'est pas qu'une vue de l'esprit, hélas ! Même si cela déplaît à certaine grosse autruche à perruque, ensablée dans sa suffisance aveugle et son pouvoir de petit roi du monde, ainsi qu'à ses zélateurs.
Aux Antilles on a parlé récemment de maisons semi-sphériques comme solution anti-ouragan. Des maisons qui feraient en quelque sorte le dos rond contre la rage de l’orage. Des maisons sans prise au vent. Au premier abord, on se dit que les architectes ont des idées géniales pour protéger les gens.  Parce que la lutte de l'homme contre les éléments n'est pas d'hier. Et qu'il y a eu et aura toujours des cyclones. 
 Mais cet enthousiasme technologique empêche-t-il de s'interroger en profondeur sur notre responsabilité collective dans ces phénomènes de plus en plus intenses, fréquents et meurtriers  ? Et ceux qui gouvernent vont-ils un jour se rendre à la raison en prenant de vraies mesures contre les outrances énergétiques et le sciage de la branche sur laquelle on est assis ?
 En attendant, on va poser de jolies maisons en demi-lunes sur le sable blanc.Enfin, pour les riches, hein. Parce que j'ai oublié de vous dire que ça coûte bonbon, ces petites merveilles. Les pauvres, eux, continueront faire le dos rond, à payer les tôles brisées de l'injustice sociale, et à mourir dans des fracas de boue. Quel monde parfait...

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22 septembre 2017

Au diable vous partîtes



Au bar du Blue Note. L'air est épais comme un mastic. Fumées. Alcools. L'ombre de Chandler plane sur les verres alignés derrière le comptoir. Un vieux saxo baveux, poussif, catarrheux, et un vieux pianiste arthritique et myope éructent un dernier air de blues.
Jim l'a. Le blues.
Jim contemple son whisky d'un oeil vitreux.
Le barman essuie ses verres d'un oeil torve.
Des clients comme lui, qui se laissent aller aux confidences après deux heures du matin, il s'en colle dix par semaine. Des allumés. Des ténébreux. Des affligés, inconsolables même après quinze verres bien tapés. Des dépressifs à la gomme. Il connaît.
Jim s'excite.
Elle était là. Tu vois, mon gars, juste là, dans le chaud de mon bras. Belle, putain qu'elle était belle. Plus que ça. T'aurais vu, mon pote, les yeux de cette fille. Sa bouche. Sa peau comme du lait. Ses seins comme des pommes. Bon dieu ses seins, à pleurer à genoux, à croire en dieu...Et ses cheveux, des flammes. Comme celles qui sortaient de la cabane du vieux Wilson quand il a foutu le feu à son réchaud et qu'il a failli se faire rôtir la carcasse comme une châtaigne, tu vois ça, petit ?
La châtaigne, c'est elle qui me l'a mise. En plein coeur. Paf! une décharge de dix mille volts dans les ventricules. Rien qu'en me regardant dans les yeux...Putain ! On était bien ensemble. Ça collait entre nous. On touchait les nuages. On pissait des étoiles quand on partait au ciel ensemble. C'était beau comme un tableau.
Elle s'est barrée. Non mais tu crois ça, mon pote ? Qui peut croire ça ? Elle m'a planté là comme un clou rouillé dans une planche pourrie. Je me souviens bien, on était le 22. Tiens, comme aujourd'hui, tu vois. Ouais, le 22 septembre. Ben j'vais t'dire, mon gars. Aujourd'hui, je m'en fous. Mais alors je m'en fous, tu peux même pas savoir comme je m'en fous. Qu'elle parte au diable !
- Vous dites ça...
- Non, j't'assure, mon gars, j'ai assez chialé. Elle est où elle veut, elle voit qui elle veut, je m'en tape.  
- Ben pourquoi vous êtes triste, alors ?
- Ecoute ça, mon gars, mets-toi bien ça dans ta p'tite cervelle de piaf boutonneux. Une fille comme ça, quand elle part, on est triste, et quand on n'est plus triste, et ben... on est triste quand même. 
- ...
Ouep ! on est triste... de plus être triste.
- C'est compliqué, votre truc !
- Tu l'as dit, bouffi. Mais tu peux pas comprendre. Faut avoir aimé une fille comme elle. Et ça, c'est pas donné à tout le monde.


A Brassens.
Musique: le 22 septembre, version Michel Zenino


16 septembre 2017

Emancipation

« Eduquer ce n'est pas remplir un vase, c'est allumer un feu. »
William Butler Yeats






« Quelle chance de vivre au siècle de la photographie…Ainsi, l’on peut retrouver dans une boîte en carton bleu, des images enfuies dont l’émotion nous étreint un instant. Je regarde les visages de mes trois enfants, je caresse du doigt leur blondeur dans la lumière si belle du matin.  Je suis fière. Mais soudain, dans le silence, et le brouillard qui monte de mon café fumant, mes yeux se troublent et il me semble que nettement, j’entends leurs cris dans le jardin...
Je le savais, depuis le début,  en regardant leurs petits bras blancs et doux dans leurs langes, qu'ils me feraient ce coup-là. Je ne suis pas triste. Juste un peu abasourdie que cela soit venu si vite. En un éclair. En un éternuement. »
*
J'avais écrit cela un jour de mélancolie. Certains d'entre vous auront peut-être reconnu les mots d'un ancien billet. 
Mais aujourd'hui, je voudrais dire que cette nostalgie des premiers départs du nid heureusement se dépasse. Je n'éprouve plus qu'une joie intense, délicieuse, indicible d'avoir allumé ce feu en eux. Qu'on les ait  accompagnés, poussés, encouragés. Non sans heurts ni difficultés. Mais toujours avec jubilation.
Ils ont atteint le meilleur du fruit de l'éducation : l'émancipation, le sésame d'une vie épanouie d'adultes autonomes et de citoyens éclairés. 
Un de ces quatre, si vous voulez, je vous reparlerai de chacun d'eux. C'est un sujet que j'affectionne assez...


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12 septembre 2017

Lettre au poète








Cher poète,




C'est vrai, tu as un don. Tu sais attraper les mots au lasso,  les accrocher comme des mouchoirs de batiste blanche sur un fil tendu de soie, entre les êtres. 
Chacun se retrouve en eux, car tu prends le miel et le vent au coeur de chacun, pour les nouer en échelles au-dessus des précipices. Et tu trempes ta plume de générosité pour balayer les évidences et les malheurs sans nom. Quand tu t'écries, tu écris le monde. De ton pinceau tu le peins. En couleurs qui cerisent, qui abricotent, qui citronnent. 
C'est vrai, tu as un regard doux de faon, les ailes d'un géant et le coeur en dentelle. Mais la force des haubans pliés, torturés, hurle dans tes émois quand tu passes le cap Horn.
Je t'écrirai mes hésitations, mes maux de coeur, mes peines de trèfle et de carreau.
Et toujours tu les tisseras de songes nacrés pour me les offrir au réveil.
J'aime plonger dans tes eaux glauques ou transparentes, laver mon sang séché aux cicatrices de tes épreuves, oublier mes tracas et mes trébuchements d'albatros, parfois malade de ne pas comprendre.
Tu me rassures.
Quand le jour se fait sombre, tu cueilles la lumière.
Quand la nuit s'éternise, tu viens secouer mon cocotier de mille façons. Mes feuilles s'envolent. Mes étoiles froufroutent.  Et la lune triomphe des nuages. Et l'aurore triomphe de la peur.
Toujours, je te reconnaîtrai, entre mille. Tu as le front tremblant de ceux qui savent.
Les écrans de fumée, tu les effaces. Tu connais le secret des larmes.
J'ai besoin de toi, comme le monde a besoin d'air et d'eau. Et de la course du soleil.
Sans toi, tout s'effondre dans le cratère béant d'un gouffre d'absurdité.
Ne t'en va pas. Reste toujours assis sur le rebord du monde. La musique qui sort de ton chant, c'est de l'amour en barre.


A mon ami Bizak
Et à tous les poètes qui enchantent le monde.

Musique: Drive the cold winter away.

08 septembre 2017

Comme un ouragan































Il y a un an, presque jour pour jour, on était le neuf, je m'apprêtais à partir voir mon père qui était à l'hôpital.
J'avais à peine passé les portes de ma ville que je reçus un coup de téléphone m'annonçant qu'il n'était plus. Il avait quitté cette vallée de larmes après son petit déjeuner, demandant aux infirmières de le laisser seul. Ainsi font les vieux éléphants quand ils sentent leur heure arriver.
Je n'oublierai jamais ce trajet long de quatre cents kilomètres, seule dans ma cage de farfadet *, le coeur baigné de tristesse et le visage bouffi de larmes. 
Je n'oublierai jamais les pensées qui me traversèrent comme des aiguilles durant ces longues heures qui me rapprochaient de mon père, endormi à jamais, parti, disparu, envolé, je n'arrivais pas à prononcer le mot « mort », pour moi c'était inconcevable. Je n'oublierai jamais son dernier visage, apaisé, avec ce petit sourire caustique qu'il a toujours eu...
Ni l'enchaînement implacable des événements qui devaient se succéder le jour de l'enterrement, mais aussi durant les longs mois suivants. De longs mois de difficultés et surtout d'emmerdements tous azimuts. Délices administratives que vous connaissez déjà ou que vous connaîtrez un jour, venant enfoncer leur dard dans le chagrin, comme s'il y avait besoin de ça pour « faire le deuil »...

Mais fait-on jamais complètement le deuil d'une part de soi aussi importante ?
Peu à peu, quand même, j'ai remonté la pente. J'ai passé les sept étapes dont parlent les psychologues, une à une. Choc, déni, colère, tristesse, résignation, acceptation, reconstruction...
L'onde de choc s'est ralentie, espacée. J'ai recommencé à sourire, puis à rire, bien que la tristesse soit quand même quelque chose de terriblement prégnant, comme un truc qui colle au fond de la casserole...Mais souvent, je parle à mon père, et souvent on se marre, connectés en wifi céleste. Parfois je sens même ses grosses mains me frôler.
Pour autant, depuis quelque jours, je ne vous cache pas que je ne vais pas trop bien. Comme si ce premier anniversaire ressemblait à une sorte de « réplique » selon le vocabulaire des séismes.
Je me sens fragile, faible, comme amoindrie, avec un besoin immense de douceur, de chaleur, d'amitié, d'amour...En recherche incessante d'une épaule compatissante, d'une oreille attentive pour endiguer ces débordements émotionnels, ces flots, ces vagues qui me dévastent. En demande de caresses d'âme. Je pleure pour un rien...Je suis à fleur de peau.
L'ouragan antillais, étrange coïncidence, percute douloureusement mon coeur depuis hier. Sans parler de mon lot de petites contrariétés ordinaires et  de gros remue-méninges existentiels qui accompagnent constamment cette satanée hypersensibilité si handicapante parfois...Je crois qu'il me manque, tout simplement. Et tout douloureusement.
Il est probable que désormais, chaque année, à la même époque, je traverse longtemps un champ d'astéroïdes perturbants. Mais il paraît que le temps adoucit tout...


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* J'avais expliqué dans un billet que c'est ainsi que je nomme ma voiture...
Musique : You're just a ghost, Thomas Enhco.

04 septembre 2017

A bicyclette


« On était tous amoureux d'elle 
On se sentait pousser des ailes 
A bicycletteeeeuh...»




Alceste à Bicyclette, excellent film...











Je vous ai déjà dit mon bonheur d'aller à bicyclette, la jambe légère et l'oeil polisson ? Ah...la campagne à bicyclette ! 

Cheveux au vent, comme dans les films de Rohmer ou de Claude Sautet, pas de casque surtout, c'est trop moche, ça fait une tête de martien globicéphale, horrible ! Tant pis, je mourrai d'une affreuse fracture du crâne, les os pilés, fauchée dans la beauté tragique de ma jeunesse ensanglantée...
Mais...ah ! Suivre de petits chemins herbeux le long des étangs vaporeux, comme ceux de l'île de Ré, bordés d'oyats et de roseaux, croiser Alceste sur son vélo un peu amoureux de  Lucia. Ou Francesca. J'ai oublié. 
Sentir le vent dans la cotonnade légère de mon corsage, et le soleil brûler mes cuisses...
 Chanter Paulette avec Montand, suivre Catherine, Jules et Jim dans la fraîcheur des fougères d'une forêt de hêtres ou encore Antonella Lualdi au crépuscule flambant d'une falaise noyée de brume rose.
Aller à un rendez-vous secret, sur une plage déserte...Poser son vélo contre une cabane en bois peint, le coeur ivre de promesses.
Que voulez-vous, j'ai le vélo cinématographique et la pédale romantique...

Mais en ville, c'est une autre histoire, une quête du graal, un parcours de santé, un chemin de Damas...
En fait, je cherche une ville dont la bicyclette serait vraiment la petite reine, voyez-vous. On est en deux mille dix-sept. Il serait temps que les bouffis qui nous administrent sortent de leurs 4X4 et réalisent que c'est notre tour : après des siècles juchés sur des vélos, les Chinois nous ont refilé le guidon. S'ils découvrent la bagnole, cela signifie que nous devons impérativement redécouvrir le biclou. Sous peine de mourir peu ou prou dans d'atroces souffrances, asphyxiés par nos déjections atmosphériques carbonifères.
Je cherche une ville où je pourrais relier un point A et un point B sans risquer de me faire couper en rondelles comme un saucisson d'apéritif ou tailler un mini-short à chaque carrefour.
Une ville idyllique où les pistes cyclables seraient de beaux rubans verts dignes de ce nom, où les autorités compétentes prendraient au sérieux les considérables avantages de cette magnifique invention vélocipédique, en matière d'écologie, de santé publique et d'économie. Où les lobbyistes de l'automobile seraient sommés de se rendre sine-die sur l'île de Mykonos pour y être admirés par les gens du cru, voire plus si affinités...

Vous me le diriez, lecteurs adorés, si cette ville existait, hein ? Vous ne laisseriez pas votre pauvre Céleste dans l'ignorance, quand même... 


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Musique: Jef Neve, Home session





02 septembre 2017

Rêves en stock

A Pierre, dont le titre « Rêveur en panne »  est beau comme une chanson de Bashung, et m'inspire quelques réflexions en vrac. Vous trierez.












Les rêves sont d'étranges oiseaux qui naissent d'un regard, d'un tremblement de cil, d'un bruit de cascade. Ils se nichent en ton coeur tels des souffles d'air frais. Ils frémissent sur les filles électriques, dans les plumes des hirondelles, ils courent dans les rues, sur les pierres brûlées de soleil, sur les feuillages luisant d'orage. Ils éclosent dans les fleurs des champs, ou dans un morceau de guitare. Tout est bon pour faire le nid d'un rêve.
Une parole entendue à la radio, un livre lu sur un banc, une phrase griffonnée à la hâte sur un mur d'usine. Et comme le quartz d'une pendule, quelque chose d'unique se met à vibrer en nous. Irrésistiblement.
Vivre sans rêves est impossible. Ce serait comme t'écraser sur le sol, avion anéanti par la pesanteur d'une tonne de glaise, figé. Vivant et mort à la fois comme le chat de Schrödinger...

Ce monde n'est qu'un songe où tout n'est qu'illusion, j'en suis intimement, définitivement et inexorablement persuadée. Un reflet dans un miroir, une caverne de Platon aux ombres dansantes. Un jeu de scrabble absurde où oxygène et asphyxie rapportent le même nombre de points, sur un plateau géant où les maux comptent triple. Une convulsion permanente.

Alors rêver, c'est survivre à toute cette incohérence. C'est donner du sens, du désir, cette énergie vitale qui te meut et t'émeut au plus profond. Tu ne sais pas pourquoi. Tu te mets à suivre une inconnue dans la rue, tu décides de partir, ou tu fais une chose que tu n'avais jamais faite, parce que tu ne t'en savais pas capable. Rêver, c'est vivre au carré, au cube, c'est vivre des dizaines de vies au lieu d'une seule, c'est mettre du technicolor dans le sépia, du panoramique dans le raplapla. 

Projette-toi par la pensée et ressens les bienfaits immédiats de ce plongeon en toi-même : sens comme cette incroyable force te pousse sans cesse vers ton ailleurs, tes découvertes, ton mieux-être. Voilà ce qui te rend vivant, qui t'accomplit, tel un Aborigène à la recherche de son «  Temps du Rêve » uchronique et mystérieux.
Ne renonce pas. Ne te décourage pas. 
Il n'est rien de plus réel que le rêve. Sans lui, sans ces projets fous, ces échafaudages de la pensée, ces échappatoires précieuses, tu ne serais pas vraiment toi. Juste un pantin désarticulé posé sur des rails rouillés.

Tes rêves ne sont pas en panne. Ils sont simplement en train de naître, avec ce petit bruit délicat de coque qui se fendille dans la chaleur de l'éclosoir. 
Ecoute. Tu as tout ce qu'il te faut en kit. Un coeur, des poumons, de l'énergie qui circule. Sois pour toi-même un soleil qui réchauffe tes aspirations les plus secrètes. Décroche tes étoiles. 
 La vie est une muse qui nous inspire à chaque instant nos plus belles pages. 

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A Chinou, aussi, ma belle rêveuse.
Et à tous les rêveurs qui fréquentent ce blog mal famé... 

Musique: Debussy, rêverie.