31 décembre 2022

2023


« Et ceux qui dansaient furent considérés comme fous 
par ceux qui ne pouvaient entendre la musique. »
Nietzsche











L'an s'achève. Un autre pointe le bout de son nez, trois-cent-soixante-cinq jours de mystère, dont on ne sait rien. Ils s'étalent devant nous comme un horizon marin, bouché par les brumes de l'aube.
Quel sera l'avenir, cette chose étrange et impalpable qui se dérobe aux projections les plus élaborées, les plus cartésiennes ? Qui le saura jamais ?
L'avenir fait couler des rivières d'encre, on imagine, on suppute, on tire des lignes de plans sur les comètes, de celles qui dansent leur macabre ballet prémonitoire à la une des journaux.
On croit toujours que les choses se passeront d'une certaine façon, et puis elles se déroulent autrement, nous bouleversent, nous surprennent. L'essence même de l'existence est là.
On peut choisir de se laisser envahir le mental par les porteurs de malheur, qui agitent leurs noires oriflammes au-dessus de nos têtes apeurées. 
On peut choisir de se dire bien malheureux. De s'en persuader. De s'en accabler.
Ou décider que la vie est simple : à portée de coeur. La main en visière sur l'horizon, et l'âme gonflée d'espoir, en cultivant comme des roses ces forces qui nous aident à sortir de presque tout. 
C'est tout le bien que je vous souhaite en ce Nouvel An, chers lecteurs que j'aime. 
Soyez vrais. Soyez fermes sans être définitifs. Soyez joyeux, entreprenants, déconcertants. 
Emerveillez-vous. Dansez sur le fil du temps.
Que la douceur de la bienveillance baigne vos plages intérieures comme des lacs paisibles. 
Le reste viendra de surcroît.


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 ˛°*      Bonne année 202!









19 décembre 2022

Hiberner




« Rome ne s'est pas faite en un jour »
        Luca Manzoli (1331- 1411)





 


Je n'ai rien oublié de mon voyage à Rome, il y a un an. Serrée contre toi sur notre vespa d'occasion, cheveux au vent, je sentais couler sur moi des millénaires d'histoire, chargés de drames, de conspirations et de beauté figée. Je sentais ton amour se mêler à celui de ces vieilles pierres étonnées.
L'air doux du Lazio, la transparence céruléenne de ce ciel incroyable, m'accompagnent agréablement,  en ce jour où le plomb qui bouchait l'horizon de décembre fait place à un rayon de soleil, et où le givre sur mon coeur fond peu à peu. Je me surprends même à sourire aux anges.
Il en faut du temps, pour avaler, digérer et que se tiennent à carreau les as de trèfle qui piquent notre coeur.
Ma délicieuse prof de yoga, petit bout de femme souple au-dehors comme au-dedans, fait entrer la sagesse chinoise au coeur de ses cours. Je l'adore. C'est elle qui nous a parlé de la vertu de l'hibernation. Ce moment où le yin prime sur le yang, cette période où l'on a crucialement besoin de chaleur, de moelleux, de calme et de clémence envers soi-même. 
Notre folie occidentale oublie que notre corps doit se poser, annuellement, et n'être point trop sollicité. Or, au solstice d'hiver, on court en tout sens, on s'agite, on se frite, on s'étripe le coeur au nom de la tradition...On se maltraite. C'est pas bon, tout ça.
Et bizarrement, on prend des vacances en été, le moment où le corps serait le plus apte à l'action, et à l'entreprise d'un renouveau...
J'ai la chance de savoir rebondir sur les difficultés, et une belle aptitude à prendre du recul. Ce temps hiémal s'y prête. La nature donne l'exemple. Mon âme est comme le jardin, ce matin : en sommeil. Mais riche de promesses d'un printemps qui reviendra. 
Et je repense à la belle maturité de ma fille qui, du haut de ses treize ans, me dit un jour avec une bouleversante candeur : 
« Mon plus beau cadeau de Noël, c'est de regarder un dessin animé de princesses avec toi, sous un plaid, avec un chocolat chaud et le sapin qui clignote ». 
Tout est dit en quelques mots. Cette belle jeune femme que j'ai enfantée a dû être un bonze dans une autre vie.




Pour l'atelier du Goût.

08 décembre 2022

Un peu de givre sur le coeur

 

Il faut que le noir s’accentue pour que la première étoile apparaisse. 
Christian Bobin




Photo empruntée à David Casartelli, photographe.




Il s'en est allé sans bruit, comme le tire d'aile d'un oiseau voyageur. Loin des saisons chaudes du monde. Au cloître de l'hiver. 
Ses mots parfumaient la vie de cannelle, d'orange. De ces parfums qui rendent gai. Il défaisait de ses rubans le cadeau qu'est l'existence, chaque jour, à chaque phrase, à chaque pas.
Devant l'immensité du vide de nos vanités humaines, il levait vers le ciel sa plume vagabonde, et le remplissait patiemment, de ses métaphores pétries au levain de son coeur. J'aimais le lire. Christian Bobin. L'homme-joie.

J'ai appris sa mort avec retard. J'apprends les choses avec retard, à l'ancienne, au hasard d'une conversation. Puisque je n'écoute plus les infos qui nous catapultent sur le temps réel. Comme quoi, on finit toujours par savoir les choses, surtout celles qui nous importent.

Aujourd'hui...
Est-ce l'hiver, qui accroche ses glaçons aux toitures et fait claquer l'air comme un fouet...
Est-ce mon âme trop sensible ?
 Je me sens triste, d'une tristesse de note bleue, de rêves enfuis, et pas seulement de la mort du poète. 
Triste de ne pouvoir vraiment dire pourquoi je le suis. Vous savez bien, ces difficiles relations humaines, et tous ces mots qui nous blessent, ces malentendus, ces rancoeurs, ces choses si lourdes que telle ou telle personne vous envoient parfois au visage et qui vous laissent sidéré d'incompréhension et de dépit.
J'ai sur le coeur un peu de givre, une brûlure froide qui fait mal.