14 février 2024

Le chant des merles











Ils sont revenus. Tout à coup, les arbres se sont emplis de leurs chants mélodieux. La veille tout était encore silencieux. Et ce matin, c'est un concert qui ravit l'âme. Ils attendaient un mystérieux signal, la blancheur des amandiers, une caresse de soleil un peu plus appuyée, sans doute. Quelle étrange horloge régit donc le vivant ? La verdeur prend de l'audace par petites touches discrètes. La symphonie des verts va commencer. Veronese, émeraude, sapin, sauge, olivier, pomme, céladon. L'hiver perd du terrain.
Cette année, pour la première fois depuis que je vis sur la colline, le champ en contrebas est semé de blé. Exit le maïs et ses longues tiges craquantes, trop gourmandes en eau. 
A la place, un blé en herbe douce et tendre, aux sillons bien alignés, comme peignés. 
Sais-tu combien j'aime les blés, qui me rappellent mon père ? Je pense à lui, qui aimait tant leurs ondulations soyeuses, telle une chevelure d'or au vent de juin. 
C'est un paysage chargé de symboles. Un peu de Toscane en Drôme.
Au clocher du village, les heures s'envolent plus claires. 
Les écureuils s'activent dans les chênes. Tous mes gestes sont en vie. Tous ces petits riens qui font le sel et l'eau de la vie, le café qui fume, la mésange qui boit, les pinceaux des peupliers, la délicate offrande de la nature. Et l'amour toujours là, au creux de ton bras. 
L'air claque encore de la fraîcheur de la nuit. Mais l'horizon tremble de la buée qui monte du gazon étoilé de gouttes. Il fera doux. Je le sais. Je le sens.
C'est un jour de grande promesse. 


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05 février 2024

Pensées déroutantes




Eprouvez vous parfois cette sensation étourdissante de vous trouver au milieu d'un manège, d'un tourbillon ? Figée, vaguement nauséeuse, avec l'impression de ne plus rien contrôler ?
Ce n'est pas par hasard que j'ai eu envie d'écouter les valses de Chopin, ce matin. Sans doute cette musique brillante et tournoyante correspond-elle au tréfonds de mon état du jour. 
Dans ces moments là, mille pensées virevoltent dans mon esprit, sans que je puisse m'accrocher à aucune. Je lis une phrase ou deux, picorées ça et là, et mon cerveau s'envole dans des rêveries, des bribes de souvenirs, des rameaux de volonté oscillant au vent du hasard. Rien de construit ou de structuré. Des effilochages, des bouts de laine accrochés au barbelé du temps. Des regrets, de la nostalgie.
Je viens de terminer ma plongée dans les abysses de mes écrits. Mes Brins d'Etoiles sont là, devant moi, comme autant de témoins de papier de mes fièvres passées. Ils sont beaux. Très réussis. Ils concrétisent ce chemin sur lequel certains d'entre vous m'ont accompagnée depuis toujours. 
Etrangement, je ressens une sorte de vide. Mais est-ce si étrange, au fond ? Après toute création, comme après un accouchement, on se sent vidée. C'est là que le formidable ressort de l'énergie doit prendre le relais pour nous propulser vers ailleurs. Vers autre chose. Pour ne pas rester pétrifié dans une sorte d'engluement post-partum risquant de nous entraîner sur des pentes glissantes. Celle de l'habitude, du renoncement, de la résignation, de l'hésitation.
De nouveaux défis m'attendent, d'autres projets, d'autres paris fous, d'autres passages en funambule au-dessus de cataractes bouillonnantes, d'autres sentiers escarpés, pour continuer à me dérouter, aller plus loin, plus haut. Pour que je me dépasse. Que j'étende le champ de mes possibles. 
Comme si le but de la vie était de sortir de « ce personnage étriqué, limité, auquel on a appris à s'identifier, alors que ce que nous sommes déborde immensément de ce personnage ». Une très belle phrase de Kea, que je me permets de citer ici, parce qu'elle m'apparaît dans sa lumineuse évidence. Un véritable tremplin. 
Tel le soleil qui tente une percée à travers son bâillon de nuages. Signe que le gris vertige qui m'a saisie ce matin est en train de s'éloigner. Doucement. Dévoilant un paysage superbe.