26 septembre 2015

Un cahier bleu

















Comme je suis contente d’avoir acheté ce cahier bleu ! 
Un de ces gestes instinctifs et fulgurants que l’on a parfois, sans que l’on puisse se les expliquer.
J’étais entrée dans la boutique du village pour lui acheter du chocolat, et j’ai vu ce cahier posé sur le comptoir.
Je n’ai pas réfléchi. Je l’ai pris. Il était joli.
C’est après que j’ai eu l’idée.

« Tu devrais écrire ta vie, regarde, comme il est beau ce cahier bleu. 
-Non, je ne saurais pas, je n’écris pas bien comme toi, tu sais, je ne me rappelle plus…
-Mais si, ne dis pas de bêtises, tu étais première en composition française, tu te souviens ?
-C’était…il y a si longtemps…oui, je me souviens…c'était...en 1942, je crois »
-Alors, écris.


Oh, maman, comme je suis heureuse que tu aies finalement accepté d’écrire, que tu oublies un peu tes idées noires…Et comme c’est bien que ton temps te semble couler plus vite, toi qui t’ennuies tant dans ta chambre d’hôpital ! J'étais tellement dépitée ces derniers temps, il me semblait que je ne pourrais plus rien faire pour toi.
Le passage où tu racontes ma naissance m'a étreint la gorge de larmes rentrées.
Je n’ose te dire combien ce cahier me sera précieux, plus tard, le jour où…
Mais pour l’instant, je te regarde tenir ce stylo entre tes doigts tremblants, et il me semble entrevoir l’enfant que tu as été, la fillette appliquée qui tirait la langue en composant ses rédactions de certificat d’études.

L’écriture prend soin des âmes, j'en suis convaincue. Les mots me relient à toi, après tous ces jours d'angoisses, d'incompréhension, d'impuissance, de chagrins, c'est comme si un fil ténu mais solide se resserrait entre nous. Comme si cela t'aidait à retrouver celui de ta mémoire.




20 septembre 2015

Une toute petite chapelle

photo moi
Tout en haut d'une toute petite colline, une toute petite chapelle. Soudain, le soleil couchant, par transparence, l’illumine de l’intérieur, c’est un spectacle émouvant et extraordinaire. Je ne parviens pas à en détacher mes yeux. On dirait une des lanternes magiques de mon enfance que l’on gagnait dans les fêtes foraines...
Si je suis émue, c’est parce qu’une somme de pensées me traversent, partant en tous sens comme des baguettes de mikado.
Je pense à la chanson de Cabrel, le chêne liège. « Regardons- nous vers le bon phare, ou le ciel est-il vide et creux ? On a dressé des cathédrales, des flèches à toucher les étoiles, qu’est-ce qu’on pouvait faire de mieux ? » 
Je pense à mon éducation contradictoire, mi-catholique mi-sceptique, qui explique sans doute certaines de mes complexités, et qui m’a ouverte à un choix, dans la bienveillance de mes parents: croire, ne pas croire…je pense au chemin que j’ai pris, fait de doute et de mystère se transformant en certitude.
Non, il n’y a personne, là-haut, que le vide solitaire et glacé des espaces intersidéraux. Nous ne sommes rien qu’un peu de poussière d’étoiles.
Je respecte ceux qui croient le contraire. Mais croire ne se décrète pas. Ne se décide pas. C’est une affaire personnelle, mystique. Trop de gens de nos jours en font une affaire d’état. Une machine de guerre.

Contre les éclats de verre et d’acier des folies guerrières, contre les malheurs qui s'abattent sur les gens depuis la nuit des temps, et qui épinglent les cœurs des hommes comme des papillons crucifiés, la petite chapelle ne peut rien. On dirait qu’elle le sait, et que c’est pour cela qu’elle brille de tous ses feux. Dérisoire et sublime.





Francis Cabrel, le chêne-liège

17 septembre 2015

C'est un fameux trois-mâts...




Il m’arrive parfois de me retrouver, le temps d’une traversée, sur un navire de forbans appelé le Blogborygmus.  Ces flibustiers de haute mer m’ont ramassée un jour que je traînais ma mélancolie dans quelque port sans attache, la mèche rebelle et le jupon fougueux battant mes bottes de cuir. J’avais envie d’en découdre avec leur style vigoureux et sans langue de bois. Pour tout dire, je bavais de faire partie de leur équipage mythique et néanmoins légendaire…
Ils m’ont reçue comme une princesse, toute nattée de fil de fer que j’étais, Fifi Brindacier des mers, égarée dans les sables émouvants de contrées périlleuses.
Ils ont accepté mes proses enrubannées et mes poses un peu frondeuses de Zazie aquatique. Ça n’est pas rien, d’être adoubée par ces drilles. Il faut montrer patte blanche, mais sans être une oie blanche. Etre plus Célestoche que Célestine. Quoique leurs coeurs de pirates sachent aussi s'émouvoir des faiblesses typiquement féminines...
Car sur ce rafiot, on chante la vie, ça sent le vin et l'amour, on aime la bonne chère, la bectance raffinée, la ripaille gourmande, le libertinage badin et la friponnerie égrillarde. La dive bouteille est toujours à l’honneur sur le pont, et la pudibonderie est priée d’aller se montrer dare-dare (ou plutôt dard-dard) chez les Héllènes, ou de bien vouloir ailleurs mesurer le fond de la mer. Quiconque leur cherche noise se retrouve pendu à une vergue avec les tripes à l'air, selon la tradition séculaire.
Leurs joutes verbales sont un régal, par Odin, et n'ont d'égales que leurs verges brutales.
Le capitaine est un vieux loup de mer tanné par les rugissants et les hurlants. Il s’installe souvent sur la dunette ou le gaillard, avec ses pinceaux et ses crayons, et croque au propre comme au figuré, les mignonnes qui louvoient et ondulent de la poupe sur le quai. 
Son second porte fièrement la barbe des marins au long cours, il a l’œil bleu ravageur, et cache dans sa cabine une bibliothèque d’où il tient son savoir quasi encyclopédique. Question savoir, le Bosco n’a rien à lui envier. C’est un italo-suisse à la verve confondante et dont la prolixité est inversement proportionnelle à la vitesse d’élocution. Mais il sait tout sur le cours du sel, la guerre des Malouines, ou la prise de la Smalah d'Abd-El-Kader par les troupes du duc D'Aumale en mil huit cent quarante-trois. C'est dire !
Quant au fin stratège répondant à un surnom évoquant irrésistiblement le cheval, c’est sans doute grâce à son esprit brillamment scientifique que le vaisseau s’est sorti des situations les plus épineuses. Rajoutons au tableau un oncle d’Amérique, toujours prompt à raconter ses souvenirs d'ancien con battant, et une charmante corsaire à la beauté ravageuse et à la tête aussi bien pleine que bien faite, avec qui je partage une certaine philosophie de l’existence…et je ne parle pas des compagnons d'infortune disparus dans les différents naufrages traversés par cette bougre de galère.


Blogborygmes, ça vous tient chaud les jours de grain, ça vous fait voyager loin, c’est beau comme une chanson de Georges : «  On est n’importe qui, on vient n’importe quand, et comme par miracle, par enchantement, on fait partie de la famille. »

14 septembre 2015

Exoconférence





Ah, lecteurs chéris, j’avais hâte de vous retrouver. Je rentre de deux jours ébouriffants. Vous me direz, comme toujours, lorsque je monte m’enivrer des plaisirs capiteux de la capitale. Oui, deux jours dont le summum fut, sans doute aucun, l’Exoconférence d’Alexandre Astier, à l’Olympia, samedi soir.

Alexandre Astier ça vous parle ?  C’est le Roi Arthur de Kaamelott.  On ne le présente plus. Si ? Vous ne vous êtes jamais laissé embarquer dans les délires jouissifs de la grande saga médiévale et tablerondesque ? C’est un tort. Oui, un grand tort. Vous avez loupé une des séries les plus drôles et les plus réussies des deux dernières décennies.
Mais bon, rien n’est perdu. Vous pouvez toujours vous offrir l’intégrale.  Et réparer cette grave lacune culturelle.








Mais revenons à l’Exoconférence, le dernier show de ce génie surdoué, musicien, scénariste, humoriste, comédien…Ah la la ! Il sait tout faire. Il est charmant et aimable avec son public. (c'est rare !) Et en plus je lui ai prêté mon stylo pour signer les autographes de tous ses fans. Mais il me l’a rendu, je vous rassure !
Si vous ne craignez pas d’assister à un démontage scientifique et caustique de toutes les théories fumeuses qui ont émaillé l’histoire de l’astronomie,  notamment les représentations farfelues du Cosmos et de ses hypothétiques habitants, forcément belliqueux à notre égard, les célèbres petits hommes verts et autre créature de Roswell, alors courez-y ! Vous serez emballés dans du papier d’argent. C’est génial. Visuel. Poétique. Musical. Drôle. 
Comment çà je suis partiale ? Ben quoi ? Pas plus que Télérama.
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10 septembre 2015

Bing ! Bang !

photo du net


C’était une petite planète bizarre, un petit grain bleu perdu dans le fin fond des fins fonds.
Un frêle esquif face aux énormes bâtiments battant pavillon cosmique.
En bas, à gauche, en haut, à droite, nul n’aurait pu le dire, rien de tout cela n’existait dans cet univers déployé comme la corolle d’une gigantesque matrice.
Dans leur jeune aise, les pétales s’en écartaient en rougissant, sous les ondes orgasmiques du premier cri primal : bing ! bang !
Partout ce n’était que fusion, fission et explosion de matière.
Un déploiement minéral et superbe de feu, de glace et de roc.
Le soleil, fringant comme une étoile neuve, pourtant, à vrai dire, s’ennuyait un peu à se faire reluire le nombril, ou les turgescences gelées des plissements hercyniens drapées dans de vaporeuses mousselines de nuages.

Mais soudain, sur le petit grain, émergèrent les coquelicots…


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Clin d'oeil aux jeudis en poésie chers à certains de mes amis blogueurs. Dont Soène.