30 août 2013

Ado...rables?



 Et voilà, chère Asphodèle  , tu nous as régalés avec les Plumes de l'Eté, et maintenant, il est temps de raccrocher le porte-plume...Je garderai un souvenir inoubliable de ces rendez-vous hebdomadaires...

ados.jpg
photo du net




Gens, survivre, univers, découverte, terre, partage, bonheur, macrocéphale, cultures, tour, astral, grandeur, mer, extraterrestre, envahisseur, animal, mappemonde,  journal, pluriel, couleur, parallèle, fin, guerre, nymphe, néant, négliger.
***

Cet été, par un temps de chaude langueur où je lézardais mollement au bord de la mer, avec cet entrain de bulot macrocéphale et anémique que confère l'oisiveté prolongée en position parallèle au sol, toute velléité de bouger anéantie sous une couche d'écran total indice soixante-cinq, j'ai longtemps regardé s'ébattre quelques jeunes gens aux couleurs assorties, purs produits de nos cultures cosmopolites, tapant chacun à son tour dans un ballon mou avec des grâces animales, poussant des hurlements d'envahisseurs extraterrestres qui se livreraient une guerre astrale et sans merci pour survivre dans un univers hostile avant d' être aspirés dans le néant sidéral, alors qu'ils étaient tout simplement en train de faire une partie de beach-volley, je vous le rappelle...

Et là, mue à la fois par une noire pulsion métaphysique et une association d'idées saugrenue, et agacée par leurs cris de sauvages réduisant à néant mes espoirs de sieste, je me suis prise à rêver d'un monde sans ados! Ah, quelle tristesse sans nom ce serait, de rayer de la surface de la terre ces êtres délicieux pratiquant avec un bonheur sans partage le borborygme matinal et la monosyllabe intempestive, la moue  expressive et le haussement d'épaules exaspéré, tout en déversant dans leur journal intime une haine logorrhéique des adultes, tous devenus des vieux cons sous leur plume intransigeante, écriture script et  points sur les i n'allant pas sans rappeler les comédons séborrhéiques dont ils sont affligés, certes moins qu'avant, grâce aux progrès certains de la cosmétique.

Comment concevoir de supprimer de la mappemonde ces êtres étranges  dont  la voix qui mue évoque toujours, chez les spécimens de type mâle, dans les aigus, le doux timbre indicible du  frein humide qui crisse et, dans les basses, le grognement délicat  du gnou en rut...
Comment ne pas déplorer la fin de la mèche  revenant gracilement sur l'œil (torve de préférence), du slip dépassant généreusement du jean débraillé, et de cette nouvelle prothèse prolongeant le bras de l'ado et lui servant à communiquer au moyen de Signes Méchamment Secrets? 

Comment se passer de cette douce nonchalance négligée et indolente des garçons, alliant le charme et l'élégance aérienne d'un éléphant égaré dans le rayon vaisselle d'Ikea et de celle, plus affectée, des Lolitas partant à la découverte fébrile de leur séduction, cuisses de nymphes, mini-shorts et bustiers ravageurs, petits seins qui piquent et qui mordent, œillades encharbonnées par trois tonnes de mascara chouré à la supérette du coin, mines alanguies et  textos sibyllins où l'on se console au féminin pluriel d'avoir peur du masculin singulier.
"-T'es trop belle!
-Nan, chuis moche, Kevin m'a même pas regardée!
-Nan, sérieux t'es trop la classe, c'est lui qui est trop moche!"

Eh, les gens, sérieusement, vous voyez d'ici l'immense perte que ce serait pour  la grandeur de l'Humanité et de Facebook réunis? Non mais allo, quoi...
Un monde sans ados ? Tout simplement inimaginable.













26 août 2013

Admireuse

 Je suis une admireuse. Je suis étonnée que ce mot n'ait pas une petite place dans le dictionnaire. Certes on y trouve  "admiratif" mais celui-ci ne traduit qu'un état, ponctuel, passager, alors qu' "admireur" donnerait l' idée précise d'une action, une activité continuelle, comme le métier de celui qui passerait son temps à admirer. Une sorte de vocation, sous-tendue par une volonté de porter son regard ici plutôt que là... 
Chaque jour de la vie est un nouveau cadeau, et chaque jour l'on peut admirer quelque chose. (Tiens, deux alexandrins! Ils sont involontaires...)
 La nature est le réservoir infini par excellence, la mine d'émerveillement. Difficile d'éviter d'être banal pour parler des fleurs ou des couchers de soleil, tant ils suscitent l'admiration depuis toujours par leur éternelle magnificence. Mais...ah! les perles d'eau luisant sur les fils de soie des araignées,  les moustaches d'un chat aux aguets dans un rai de lumière, comme un petit buisson d'oyats scintillant au soleil, le parfum du jasmin, le  galop d'un cheval dans une gerbe d'écume en Camargue, l'extraordinaire bond d'une sauterelle dans l'herbe chaude, le passage de Venus dans la constellation du Scorpion, tiens, voilà des exemples de tableaux du plus grand, du plus beau, du plus gratuit musée du monde. Les collections y sont permanentes et constamment ouvertes, de jour comme de nuit. 

J'aime que l'on m'admire, Moâ, que voulez-vous...
Et mes semblables... combien grandes sont les joies qu'ils me donnent!
 Oui, j'admire constamment les trouvailles quotidiennes, les bons mots des uns, les idées originales, farfelues, géniales des autres. Tout ce qui me fait dire" Mais pourquoi n'y ai-je pas pensé? " L'inventivité est une fontaine de Versailles jaillissante et somptueuse. Et jamais tarie. 

 J'admire les lieux inventés par les hommes, les flèches des cathédrales , longs doigts dressés dans le fol espoir de toucher le ciel, les marchés colorés de Provence, où l'on se sent quelqu'un d'important rien qu'en achetant une pastèque, les ponts enjambant le monde comme de fins oiseaux migrateurs, les théâtres d'ombre et de lumière ...

Merci Monsieur Alain M.  pour cette belle photo colorée
 J'admire que fusent des mélodies toujours nouvelles à partir de si peu de notes...
 J'admire les sentiments vaillants, nobles, courageux, impétueux, le panache, la gentillesse, l'audace, la générosité, la largesse d'esprit et de cœur.
 J'admire le savoir-faire du plombier, de l'électricien, du menuisier. 
J'admire tous les talents que je n'ai pas. Et mes parents de m'avoir donné ceux que j'ai. 
J'admire les pieds des danseuses, les mains des pianistes, les ventres des femmes enceintes, les yeux des enfants. Et accessoirement le cul de ma crémière, qu'elle a fort joli d'ailleurs.
 J'admire sans cesse, je m'émerveille, j'applaudis. La liste est trop longue!

 Je vous admire, oui, vous qui me lisez avec constance, avec bonhomie, avec compassion, avec exultation, avec tendresse, avec humour, et même parfois, avec un certain agacement, je le sais. Tss... tss..., ne le niez pas! J'admire tout ce qui fait vous, votre personnalité unique et qui n'est pas moi, et qui me comble et m'enrichit de jour en jour. Parce que je vous sens admireurs comme moi.   Cela n'empêche pas de voir les horribles affreusités de ce bas monde, n'est-ce pas? Au contraire, cela rend plus fort pour les affronter, pour les combattre ou s'en protéger.

O combien de marins, combien de capitaines...


 C'est qu'admirer est un  médicament anti-morosité. Puissant.  Un anti-dépresseur de suprême génération. Aucune contre-indication, aucun effet indésirable. Aucun danger d'overdose. (ou si rarement...)
Regardez autour de vous. Chaque objet, chaque être, portent en eux quelque chose d'admirable. Une histoire, une somme de passions, d'efforts, de renoncements et de pugnacité. Combien de gestes a-t-il fallu, combien de litres de sueur, de larmes, combien de nuits blanches, d'espoirs déçus, de vies gâchées, de papiers écrits puis froissés rageusement, de muscles endoloris, de conquêtes et de luttes intestines, de migraines et de victoires, de marches forcées, de trains, de bateaux et d'avions, pour que votre café et son morceau de sucre arrivent brûlants dans votre tasse?


 Etre un admireur, une admireuse,  c'est se laisser pénétrer, inonder par la beauté intrinsèque des choses. Et en éprouver une joie simple, une sorte de réjouissement intense.

Vous avez vu ma beauté "intrinsecte"?


Photos admirables prises sur le net



23 août 2013

Embruns

Les Plumes de l'été amorcent leur lente décélération,  Asphodèle nous emmène à la dérive...Profitons-en, le soleil décroît lui aussi, c'est la fin août...



Merci à Andiamo pour ce Corto plus vrai que le vrai





espérer, flotter, perdition, cap, sillage, bouteille, iceberg, vent, déambuler, bateau, continent, flots, amiral, génétique, sentiment, débarquer, faille et myrte, malhabile, muraille.


***






" Il n'importe que vous soyez malhabile si vous êtes sincère". 
Tels  furent les premiers mots que prononça le directeur de l'Ecole  Normale, où j'entrai après avoir obtenu ce qu'il appelait évidemment par son nom complet  le "Baccalauréat" avec une grande émotion dans la voix. Je garde encore en mémoire les accents vibrants de son discours de bienvenue dans "La Grande Maison" ...
Ses mots m'ont marquée profondément comme on peut l'être lorsque l'on a dix-sept ans et la fièvre au front. Oui déjà. Des mots qui s'adressaient à notre coeur bien plus qu'à notre cerveau. Qu'il en soit remercié à jamais!
Pour lui, le talent d'enseigner était  celui d'espérer. Pas de problème qui fût insoluble, pas de bouteille à l'encre. Nous n'avions pas besoin de grandes théories. Juste d'une foi inébranlable et quasi génétique en l'homme et en sa faculté de s'améliorer. Un discours qui aurait dénoté de nos jours, où certaines valeurs sont en perdition, et où l'on a bien du mal à les maintenir à flot dans la fameuse "Grande Maison".  
Cet homme sans faille, que tout le monde appelait  l'Amiral, déambulait dans les couloirs et les jardins, parmi les massifs de myrtes, sous les magnolias qui entouraient l’édifice bicentenaire. D'un pas tranquille. Sans jamais perdre jamais le cap, les yeux rivés sur quelque mystérieuse ligne bleue imaginaire, un horizon idéal ...C'est sans doute lui qui sans le savoir, m'a donné le goût des métaphores marines. Oui, comme vous le savez, j'aime parler de mon école comme d'un bateau dont les  élèves seraient les moussaillons...
Parfois, l'immensité de ma tâche m'apparaît comme une de ces vagues gigantesques, qui se transforment en véritables murailles d'eau. C'est très effrayant.  Je me demande si je vais réussir à faire flotter ce rafiot, ou s'il va sombrer en entraînant dans son sillage près de trois cents élèves. Je sens des vents contraires faire trembler la coque de toutes parts, je redoute quelque iceberg imprévu. Ce n'est pas toujours facile, ce poids sur les épaules. Ça me donne une sorte de vertige, aux alentours de la fin des vacances...Et des nuits un peu agitées. Les fameux cauchemars que font peu ou prou tous les enseignants avant la rentrée... Et cette impression (fausse bien sûr) de ne pouvoir compter que sur moi-même...
Ce soir je repense à mon directeur et à son regard bleu, à sa tranquille assurance  de loup de mer. Je me dis qu'il devait avoir, lui aussi, ses moments de doute.
 Et puis comme chaque année, je serre les poings et je  décide que je réussirai à emmener ce bâtiment d'une rive à l'autre, pour débarquer sur le nouveau continent avec le sentiment apaisant du devoir accompli.
Incorrigible optimiste moi? A ce niveau-là, c'est carrément irrécupérable!








20 août 2013

Concert d'été






Le saxophone a déchiré l'air du soir d'une première plainte. Un son chaud, une longue note tenue. 
Je laisse exhaler un "wouaou" admiratif. La soirée va être sublime. Un air doux souffle sur la ville,le vent est à la mer et le spectacle va tenir les promesses de l'affiche. Qui annonçait un vrai concert. Pas une simple musique d'ambiance que les gens subissent d'une fourchette distraite. La mienne est restée suspendue en l'air, suspendue à cette note magique, entre mon assiette et mes lèvres entrouvertes. 
Les musicos sont juste devant moi, j'ai évidemment l'impression qu'ils ne sont là que pour moi. J'ai toujours cette impression là. Où que j'aille. Depuis toujours. Par une sorte d'égocentrisme musical surdimensionné. Je suis comme ça. Je vis la musique intensément. Pas vous? Le monde disparaît dans une espèce de brume fade, les serveurs ne sont plus que des ombres glissant entre les tables, sans épaisseur. C'est comme si les notes de musique envahissaient complètement mon espace intérieur. 
Dans la bande, il y en a toujours un qui joue encore plus particulièrement pour moi. C'est celui qui a repéré que je connais certaines chansons par cœur, il doit savoir lire sur les lèvres...Bon, tant qu'à faire, c'est le plus mignon. Il a de petites lunettes rondes, une mèche qui revient constamment dans son œil vert ou marron, je ne vois pas bien, (vous pensez bien que par coquetterie je ne vais pas mettre mes lunettes) et un faux air de chanteur de Police sous son tee-shirt noir et la lumière des projecteurs. Il joue sublimement bien de la guitare (oui, tant qu'à faire (bis) j'ai choisi  le guitariste) et je suis intimement persuadée, au moment où il attaque un standard de blues, Traveling Riverside version Eric Clapton, avec une voix veloutée comme un arabica, qu'il ne doit pas être du genre à s'inquiéter d'être sur la scène pendant que d'autres font danser les filles. Depuis la nuit des temps, le piège à filles fonctionne. La magie opère. 
Je m'aperçois que je n'ai rien avalé depuis dix bonnes minutes, plongée dans ma contemplation béate. Entre deux chansons, de Johnny Cash à Chuck Berry en passant par les Wings et Chet Baker, je jette un sort à ma nage de noix de Saint Jacques.Et à la daurade qui me regarde avec des yeux de merlan frit. Histoire de parfaire ce moment de pure fête des sens, où les saveurs, les images et les sons se répondent avec une précision baudelairienne. Comme toujours. 
Every breathe you take, I'll be watching you. Alors, là, je frôle l'apothéose ataraxique. L'orgasme diatonique et même chromatique, ne lésinons pas! Une chanson de mon idole, n'en jetez plus, mon ami. Je vous l'avais dit, que le binoclard sexy se la jouait  Sting. Et il la chante divinement, en plus l'animal. Il me regarde derrière sa mèche fatale. Je respire plus fort.

Les concerts d'été, c'est tout ou rien. Parfois, on a des Nique Jagger qui se prennent pour Mick, et ça énerve les nerfs...mais parfois, parfois, on a de la chance, le chanteur tutoie les anges. 



16 août 2013

Aérolithes



 Chez Asphodèle  , cette semaine, je suis servie: le thème du mystère m'apporte sur un plateau des mots superbes , je ne vous dis que ça!



Image du Blog leylana2.centerblog.net
photo du net



Silence, secret, regard, brume, cacher, dessert, chambre, hibou, résoudre, gomme, œuf, intrigue, divin, oppressant, baigner, ésotérique, magie, luire, langueur, lanterne.




***







Evidemment, je sais ce qu’il en est des étoiles filantes. De simples fragments de roches errant en silence dans la Voie Lactée. Des météorites qui frôlent soudain l’atmosphère terrestre et s’enflamment... Cette brume de songe, cette magie sidérante ne serait donc qu’une banale excitation thermique d’atomes et de molécules ?
 Et pourtant, comme j’aimerais croire aux légendes ésotériques qui entourent les Perséides ! Cette explication rationnelle n'est-elle pas un complot scientifique? Quel oppressant mystère, quel éternel secret étouffé dans l’œuf veut-on me cacher? Pourquoi rit-on lorsque, devant mon regard éberlué de hibou, vient luire soudain l'une de ces divines et fugaces guirlandes d’étincelles ?


Je ne puis me résoudre à la pensée que mes vœux les plus chers ne se réaliseront jamais. Déjà, dans ma chambre d’enfant, puis, plus tard, au fond de mes langueurs adolescentes,   j’aimais la pâle clarté des lanternes stellaires, et je m’inventais des mondes doux, baignés du tendre frou-frou des étoiles.
Déjà je lisais Rimbaud sous la Grande Ourse.  
Je n’ai pas changé. Je rêve toujours d’un monde sans intrigues et sans calculs. Je brûle d’envoyer paître dans les champs magnétiques les sceptiques à la gomme. Ou même carrément de les priver de dessert.



13 août 2013

La parenthèse attendue

Photo du net
Tu pars en te disant que parfois la vie est compliquée, absurde et sans issue. 
Et il aura suffi de quelques jours dans la montagne pour qu'une petite voix  vienne te chatouiller la conscience. Et que l'existence t'apparaisse désormais dans sa somptueuse et évidente simplicité. Comme ces constellations que tu frôles de la pointe de ton rayon laser. Dessinant pour l'auditoire ébahi les traits imaginaires qui relient les étoiles. 
Tu as médité,  repoussant doucement les pensées interlopes et toxiques, concentrant ton regard sur l'insignifiante splendeur d'une araignée d'eau et de son reflet sous l'eau. Ne pensant plus qu'à exister. Tu l'as regardée, la rivière, dénouer ses flots entre les herbes rousses. Tu as  écouté le chuintement doux du vent dans les pins, regardé ces rocs magistraux lancer leurs flèches vers le ciel comme des cathédrales. Appris des étoiles la pérennité des choses. Et en même temps leur tranquille fugacité. Rien ne dure, tout est là.
Tu as décidé de sentir couler la vraie vie dans tes veines, de goûter, toucher, respirer, jouir du temps qu'il fait, du temps qui passe, ils sont si étroitement mêlés! Tu as beaucoup ri, admiré des tableaux, savouré des mets, bu des vins généreux, beaucoup marché, et senti ton corps se remettre à vibrer...
C'était la parenthèse attendue,  celle des instants de pure joie, celle où les liens forts font vibrer les atomes qui se comprennent alors à demi-mot. Et même parfois sans mots du tout. Dans le plus parfait silence. Celui du coeur.
Mais celle des échanges, aussi, des fous-rires, des complicités.
Tu t'aperçois que depuis quelque temps tu te noyais dans le virtuel et l'éphémère, que ta voie, ton sens, ton chemin se perdaient dans une brume. Tu croyais que ta vie était ailleurs alors qu'elle était là. Parce que la vie c'est ça: jamais là où on l'attend, pleine de surprises et de détours.
La voix a repris, avec une clarté de source: "Ne te laisse pas dicter tes actions, aime les liens, recherche-les,  mais refuse les chaînes. Cesse de culpabiliser. Ne t'aliène à rien.  N'en fais qu'à ton coeur. Oublie ce qui n'est pas toi, ton sang, ta vie,  oublie ce qui n'est pas joie. Chéris ta liberté. Refuse les compromis et les à-peu-près. 
 Accepte de chialer comme un gosse et d'éclater de rire  même si on se moque de ta sensiblerie ou de ton  insouciance. Accepte de vieillir puisqu'on te  dit que  la beauté de l'âme est éternelle. Accepte d'être toi, et d'être fière de toi. Aime, puisque tu as fait d'aimer ta seule règle. Mais commence par t'aimer, toi."
Cette voix, qui donne le "la" au diapason de ta mélodie intérieure. Ce n'est ni dieu, ni ange ni démon. 

C'est la voix profonde de ton moi intime. Tu ne l'avais jamais entendue aussi distinctement. Tu en tires quelque leçon, sûrement. Et tu te dis qu'il te faudra désormais l'écouter plus souvent. Car elle t'apporte de la félicité. Et une grande paix énergique.



05 août 2013

Interdit aux hommes


 Avertissement: Les hommes entrant dans ce billet et/ou dans la zone des commentaires le font à leurs risques et périls.

Mercredi, j'ai rendez-vous avec Olga Laxie et Germaine Eloire pour partir quelques jours en randonnée dans mes montagnes préférées.Sentir l'odeur des pins, arpenter des petits sentiers pas trop pentus et bien ombragés,en faisant des haltes souvent. Eva Tfairfoutre dit qu'elle ne peut pas venir, elle fait sa bêcheuse, mais je sais bien qu'elle en crève d'envie. 
Bon, la randonnée, c'est officiellement, parce que, je peux bien vous le dire à vous, vu que cela restera entre nous, ce sera  surtout du pur délire entre filles.
A nous les séances d'onglothérapie, où l'on refait le monde à coup de dissolvant et de vernis. Les petits déj. au soleil, les papotages jusqu'à une heure indue..(indue à qui, on se le demande bien...) 
 La pancarte "interdit aux hommes" est déjà sortie, nettoyée, rutilante,  y a plus qu'à l'accrocher sur la porte avec un bout de sparadrap.
Bains de pieds, masques hydratants, manucure, on va se faire la totale, deux douches par jour minimum, farniente bronzette et pieds mouillés, bi, mono, mini ou même zerokini...
J'ai besoin de m'aérer la baguette magique. (oh! la joie de pouvoir sortir cette simple phrase de fée sans essuyer les sarcasmes et vos airs entendus, messieurs, toujours prompts à vous esbaudir dès que cela vous fait "peu ou prout" penser à votre flûte enchantée! Et ensuite, vous dites, avec une mine confondante "mais c'est toi qui as l'esprit mal tourné! Certes. Admettons.) 
J'ai quand même un furieux besoin de sentir le vent de la liberté me parcourir la glotte et me faire onduler le système pileux. De vivre à mon rythme...et de regarder les étoiles au fond des  yeux, dans un vrai ciel sans pollution lumineuse.
On va se raconter nos juillets, nos divagations, nos expériences de lévitation transcendantale, les derniers sortilèges à la mode, bref, l'actu des fées. Y aura des légumes dans le bac à bière, on dégustera du jus de tomate au sel de céleri, du poisson en papillotte et on se gorgera de vitamines pour entretenir nos teints de roses. Et péter des paillettes comme dit ma copine Stella Kilfaléalé, qui ne peut pas venir, mais elle, c'est pas parce qu'elle est bêcheuse...
  Ouh! que ça va faire du bien, cette parenthèse dans la parenthèse, ces vacances dans les vacances.
Mais rassurez-vous, messieurs, vous tiendrez quand même le haut du pavé dans la mare de nos conversations à bâtons rompus. Et nous respecterons le quart d'heure L.D.P*, selon la consigne syndicale. Le reste du temps, nous ne penserons que du bien de vous. Comme toujours.

^-^


*L.D.P = Langue de P...


02 août 2013

Irlandaise



Chez Asphodèle, le mot de la semaine est "racines". Ceux qui me connaissent bien savent que je vais me répéter...Mais ils me pardonneront car, comme on dit Bis repetita placent. Et vice versa. Dura lex sed lex. Alea jacta est. Errare humanum est.  Et caetera. ..Et toutes ces sortes de choses.



***

carotte, arbre, cheveux, famille, ancrer, arrachement, généalogie, ancêtre, souterrain, culture, terre, île, gingembre, planter, source, esclave,  jaillir, juvénile, joyau. 

***


Je rêverai encore longtemps de toi, avant de comprendre pourquoi, âpre terre de landes ébouriffées, égratignées par les vents du large, tu m'attires et me fascines. 

 Dans ma généalogie, je sais te devoir quelques gouttes de ce sang fier et abrupt que l'on retrouve dans ma famille, les cheveux carotte de mes cousins et mes quelques éphélides...

Je sentirai longtemps encore en moi ce bouillonnement souterrain qui me rend juvénile et qui relègue au rang de guimauve le gingembre et la mandragore, avant de comprendre ma fureur de vivre, ancrée en moi aussi sûrement que les pierres de granit des chemins de Cork ou de Galway, et dans mon corps, ô mon corps plein d'éclairs ruisselants, j'entends la rage des colons, leurs rêves de fortune et leurs arrachements d' esclaves.

Il me faudra traverser tes villages tout enluminés des lueurs laiteuses de ta pluie froide, m'imprégner de ta langue qui roule comme des rochers dévalant une pente, écouter jaillir de tes longs soirs ta musique d'opale et de sombre gaieté... 

Ô ta musique! en sentir le frisson imprimé à mes jambes, de bas en haut, de haut en bas, telle une houle. N'être plus que harpe et violon et flûte celtiques avec des fourmis jusques au bout des orteils, mon cœur, dansant et riant et pleurant à la fois...

 Être pour une nuit une fille de Tipperary, opulente et chaude,  perdue au fond d'un pub suant de bruit et de fumée, d'amour brut et de hareng saur, m'enivrer de bière rousse et  de whiskey jusqu'à en oublier mes mots. Jusqu'au matin frileux, façades blêmes et cris de mouettes apeurées au-dessus des toits, enroulée dans un pull de laine. Le regard sur l'horizon.

Pays émeraude. Pays joyau, planté sans détour dans  l'écrin bleu d'un océan furieux, la mer qui ronge le noir des falaises de Moher, le blanc de l'écume, le gris du ciel, ta presqu'île de Dingle, tes lacs du Connemara sont comme des yeux brillants de fièvre. Je pourrais faire miens ta culture millénaire, ton trop peu d'arbres, ton trop d'eau, tes murets arrachés au roc, et le bruit patient des charrettes, et des chevaux, et puis la tourbe, et le parfum meurtri de tes bruyères en fleurs, et l'herbe plus verte que dans un chromo saturé.
Je rêverai encore longtemps de l'Irlande.
Et quand j'aurai assez rêvé, j'irai boire à la source de mon rêve.