31 décembre 2017

2018






« Une des actions les plus apaisantes et les plus agissantes que vous puissiez accomplir dans ce monde tourmenté, est de révéler votre âme.  »
Clarissa Pinkola Estes





Photo Pastelle





Choisissez un endroit idoine
Fuyez quand même les iguanes
Choisissez un endroit douillet
L'endroit que vous préfèrerez
Dans la moiteur d'un oreiller, sur une vague, sous la pluie, 
Une terrasse de café, un coin d'ombrée ou de soleil.
Choisissez un endroit secret 
En solo ou en compagnie
Une forêt, ou un taxi, le port de Saint-Brévin-les-Pins
Peu importera où le coeur décidera de se poser.
Pourvu que vous vous y sentiez 
Comme la mousse dans les prés 
Comme l'oiseau sur son rameau 
Comme le pied dans sa chaussette ou la tête près du bonnet.
Respirez donc profondément, ouvrez les yeux, ou fermez-les,  comme vous le désirerez.
Pensez très fort à ces souhaits que vous aimeriez exaucer
Au cours de l'année qui vient
Ah ! voilà, c'est parfait, c'est bien

Du travail ? de la joie ? des sous ?
Des jeux ? des bébés ? des voyages ?
Ou du bonheur tout simplement ?
Que tout le monde soit content 
Que vous ne soyez pas trop sage
Et que le monde soit moins fou
Et que l'amour existe encore
Prenez trois brins de mandragore  
Pour faire exploser vos souhaits en une gerbe d'étincelles 
Qui se verra jusqu'à Ussel
Et s'entendra jusqu'à Moscou
Vous n'en avez pas sous la main ? 
Prenez un peu de roquefort 
Additionné de fleurs de sel,
Ou encore un brin de folie, de poésie, de fantaisie
Et un petit verre de vin
Pour étoiler vos yeux surpris
Et n'oubliez pas, à minuit, de vous embrasser sous le gui
Vous n'en avez pas sous la main ?
Une poignée de spaghettis ou un bouquet de frais persil
Feront l'affaire assurément
Pour souhaiter à vos acolytes
A vos amis, à vos parents
Que l'année  201
Soit pour tous une symphonie !


Et n'oubliez pas: je vous aime...

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Musique: Roberto Aussel plays Scarlatti - Keyboard Sonatas

25 décembre 2017

J'ai pris par la main







Sur mon chemin de vie, j'ai pris tant d'enfants par la main que j'en ai oublié le nombre. Des centaines sans doute. Peut-être mille. 
Et aujourd'hui, sur mon chemin, il y a cette petite fille aux grands yeux étonnés, des yeux pleins de questions et de larmes qui roulent comme de petits cristaux de sel translucide sur le sable gris du temps qui court. 
Une petite fille que j'ai cru pouvoir un peu oublier. Pour faire l'adulte. 
Ça ne m'a pas réussi des masses. 
Il était temps que je la relève doucement, sans la brusquer, que je panse ses genoux écorchés, que j'ôte les brins de paille de ses cheveux en lui disant tout mon amour et toute ma compassion. Que je l'assure que je vais enfin m'arrêter à ce qu'elle veut me dire. L'écouter. La comprendre. Et la serrer fort dans mes bras.
Elle me dit des mots de crainte et de hantise, de cailloux noirs et de forêts sombres.
Mais aussi des mots de cascade qui ruissellent sur mon coeur. De ceux que l'on aime entendre, un jour de noël scintillant de givre et de flammes. 
Elle me parle d'espoir, de paix. Que les guerres, les crimes et les folies des hommes finiront un jour. Que plus jamais l'on ne verra des gens seuls et malades, pauvres, tristes et fatigués, sans qu'une main ne vienne les secourir. Que les hommes embrasseront les arbres et les agneaux, que les richesses couleront comme le miel et que l'amour règnera sur la terre dans une  délicate et subtile harmonie.
Elle s'indigne et s'émerveille,  dans son coeur de cristal, tout jaillit et tout perle.
Elle me parle et me fait du bien.

Plus jamais je n'accepterai que l'on se moque de cette petite fille. Qu'on la néglige. Qu'on l'humilie. Qu'on l'utilise et qu'on l'oublie.
Elle est en moi à jamais. S'en défendre est inutile.
Aujourd'hui je ressens un apaisement étrange et bienfaisant.
Je n'ai besoin de rien, je me sens comblée de grâces.
Et en chacun de vous, il y a un enfant qui connaît la beauté des lunes et le goût sucré d'un sourire. Un enfant qui sait, et se souvient de tout. 
Ecoutez-le. Il mérite que vous en preniez grand soin.
Je vous le souhaite, en ce jour particulier, lecteurs adorés.



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Musique: Choirs for Christmas-Once in Royal David's City performed by Trinity Singers

21 décembre 2017

Altitude




Viens. Prends le temps. Ajuste ton pas au mien. Laisse-toi  pénétrer par les effluves bienfaisantes que l'air pur transporte sur l'aile des graminées sauvages, des pins cembros, cette fois à leur juste place,  et par la douce mélodie des torrents apaisés baignant les pâtures.
Prendre de l'altitude, bien sûr, tu sauras le faire littéralement, de ton pas de marcheur attentif. Tu graviras les adrets lumineux et les ubacs d'ombre et de givre. Tu écouteras le vol puissant d'un rapace trouer le silence. Tu sentiras tes pupilles trouées au laser par le scintillement des névés, et le chaos grandiose des séracs gonflera tes poumons.
Là-haut, tout là-haut, le monde t'apparaîtra comme neuf, lavé, dans sa prodigieuse lumière baignée de paix bleue et de joie ineffable.
Mais sais-tu prendre de l'altitude sans bouger, même au fond de la plaine la plus grise, juste par le pouvoir de ton âme ? De ton esprit en éveil, de ta conscience en pleine aptitude ?
Ecoute battre le coeur de tes paumes ouvertes vers le soleil, tels ces gypaètes sur le rebord du temps, prêts à l'envol. Observe comme tes petits soucis matériels, qui te paraissaient si grands, ne sont en fait que des rognures d'ongle, des taillures de crayon, des chiures de mouches. Même pas des cailloux. Plus tu t'élèves et plus les rochers de tes essentiels t'apparaissent, brillants et droits vers le ciel, couronnés de blancheur et de force. Ta respiration ralentit. Ton souffle s'évase en corolle. Ample et profond comme un manteau d'étoiles. Comme pour mieux goûter l'air neuf de tes cellules. Comme pour mieux te dire que ta vie est un somptueux paysage, et que rien ne saurait l'altérer quand tu connais enfin la beauté des chemins escarpés et rugueux qui la traversent.
Ne laisse plus personne l'abîmer. Elle est ton bien. Ta source. Ton trésor.


Viens, écoute, si tu le peux, cette musique. Tu la trouveras, peut-être, aussi belle que moi.
Je suis heureuse d'avoir pris de l'altitude avec toi ce matin, dans la magnificence de l'aube.



15 décembre 2017

Anne, avec un E






J'ai couru longtemps, les yeux noyés de larmes, de ne point être comprise d'aucun de mes semblables...Sur la lande battue de bruyères et de vent, Cordelia, ô Cordelia, princesse des nuées océanes, pourquoi ton cheval s'est-il enfui sur cette falaise noire à l'approche des tourments de mauvais augure ? 
Comme j'aimerais être une mouette ! Leur vol gracile et impétueux rase les rochers avec une telle élégance !
Regardez donc cet étang plus lisse qu'un miroir, et avec quelle délicate attention ces fleurs de cerisiers accueillent le lever du soleil, en l'agrémentant de leur neige parfumée...
Je m'exprime beaucoup trop bien pour une enfant de mon âge. Mais il faut de grands mots pour exprimer de grandes idées, n'est-ce pas ?

Diana est ma première vraie amie et mon coeur est empli de joie à cette idée. A l'orphelinat, les filles étaient méchantes et voulaient me faire manger des souris.
« Si le monde entier vous haïssait et vous croyait coupable, mais que votre conscience vous approuvât, et qu'en interrogeant votre cœur il vous parût pur de toute faute, alors vous ne seriez pas sans amie. » (Jane Eyre)
Oui, je lis Jane Eyre, et j'aime dormir dans un arbre immaculé plongé dans la lumière de la lune. Incorrigible et tempétueuse romanesque...

Oui, je suis rousse, d'une rousseur si épouvantablement rousse, et j'ai le visage si plein d'éphélides comme autant de marques de ma singularité, que je pourrais être brûlée vive sur le champ.  Des jambes maigres et des bras qui le seraient moins avec une robe bleue splendide aux manches bouffantes. 

Et pourtant je souris, continuellement, même quand la vie m'oppresse,  je ne sais pas prier mais je déclame des poèmes avec fougue pour effacer la brume grise de mes blessures cachées, et le cimetière de mes espoirs enfouis.
Je déteste l'injustice de ce monde glaçant et impitoyable, et je n'ai pour tout bagage que le refuge de mes rêves.
Je m'appelle Anne. Avec un E. 



¸¸.•*¨*• ☆


11 décembre 2017

François-René

 
Photo  Céleste (floue, mais authentique)

Photo Petrus


Ses belles mains aux doigts agiles et fins courent sur le clavier en virtuose depuis presque soixante ans. C'est un enfant chéri d'Euterpe. Un prodige de la musique.
Ce soir, il jouait dans une splendide abbatiale de province pleine à craquer, entouré d'un choeur d'hommes et d'un récitant qui faisait envoler des mots somptueux,  un texte de soie et d'or, dans ce silence d'écho que seule les églises possèdent, quand les souffles se suspendent au sublime. 
C'était beau, bon et doux. De l'émotion à l'état brut. De la joie en paillettes.
Ça sentait Noël jusque dans le coeur des gens, des mandarines et des bûches pâtissières qui ont suivi le spectacle.
Il est venu rencontrer son public, en toute simplicité.
Un verre de clairette à la main, je suis allée discuter avec lui. Il est humain,  enjoué, passionné. Un peu timide aussi. Un peu mélancolique par moment, j'ai senti, comme si Chopin habitait encore tout un pan de son âme.
Au fil de la conversation, ce qu'il me raconte de son parcours me rappelle de plus en plus quelque chose...
Et puis soudain, bon sang mais c'est bien sûr...Ce pianiste, brillant qui, en pleine gloire internationale, laisse tout tomber, les honneurs, les hôtels de luxe, le fric, les fracs et les queues de pies...pour aller jouer dans les prisons, les hôpitaux, les maisons de retraite, sur les lacs et les plages et même sur un glacier...Ce « pianiste social », ce pianiste du coeur...c'est Albert Dupontel dans « Fauteuil d'Orchestre ». Ah...la scène où il se met en tee-shirt en plein concerto de Schumann...C'est un pur délice. J'ai toujours aimé quand le héros pète un plomb salutaire au cinéma.

François-René confirme: dans le film, ce sont ses mains qui sont filmées. Et c'est bien son histoire. Il a « coaché » l'acteur tout au long du tournage. C'est fascinant, les parcours atypiques. Les gens qui renoncent à la gloire, qui lâchent tout du jour au lendemain. J'aime ça. J'aime l'idée que la sobriété heureuse prime sur le faste et l'argent. J'aime cette humanité-là.
Je vous le laisse découvrir sur son site, ou ci-dessous, pour une valse étourdissante. 
Moi j'ai les yeux encore tout piquetés d'étoiles.


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Merci à mon ami Pétrus qui m'a invitée à cette soirée hors-norme.

07 décembre 2017

Au Bonheur du Blues





















Hier j'ai écrit une lettre pour dire mon admiration à Jean d'Ormesson. Je comptais la publier ici ce soir.
Et aujourd'hui... Bang ! La déflagration. La mort de Johnny. C'est malin, de mourir d'aussi près, et comment je fais moi, pour mon hommage à l'une et l'autre de ces icônes ?

Je les aimais l'un et l'autre.
- Ah bon, tu les aimais ? 
- Oui, beaucoup.
- Mais enfin...ils étaient... de droite.

J'ai regardé ma main gauche et ma main droite. Je les ai trouvées étonnamment semblables, qu'elles caressent une peau avec gourmandise ou qu'elles essaient de tirer des sons de ma guitare.
 - Ce qui m'importe, vois-tu, c' est juste cette trace de givre et de feu mêlés qu'ils laissent sur les coeurs,  et qui s'appelle l' émotion. 
Tu sais, j'ai grandi en amour entre Peppone et Don Camillo. Entre la lecture de La Vie Catholique et celle de L'Humanité.
 Il m'a bien fallu trouver une stratégie pour éviter le conflit de canards... Par loyauté envers mes géniteurs. Alors tout naturellement, j'ai choisi de m'en foutre royalement que les gens que j'aime soient de gauche, de droite ou du milieu. Qu'ils aient des vies parallèles ou perpendiculaires. Qu'ils bouffent du lion ou du mouton. 
 Je ne vois que des tableaux qui me font vibrer intensément ou me révulsent, des livres qui m'éblouissent ou me tombent des mains, des chansons qui me donnent des frissons ou m'horripilent, des images qui m'effraient ou me font rêver.
J'ai choisi de n'écouter, en toute chose, que la musique de mon coeur qui bat. 
Et les griffures que l'amour et la mort lui inflige.
Et ce soir, mon coeur est griffé.
Je les aimais.



04 décembre 2017

Mille plumes au vent de Göttingen


















Mille plumes au vent,
 fragiles et futiles
Mille aiguilles dans mille bottes de foin, 
Mille flocons, dérisoires et anodins
Mille bouteilles à la flotte, mille moments perdus
Mille cris émerveillés
Mille coups de gueule ou de blues
Mille coups de coeur.

Mille billets.
C'est un peu fou.


Et un cadeau. Pour vous.
Qui supportez ou qui aimez depuis si longtemps
mes celestineries, 
mes célestes âneries...







(Rassurez-vous. J'ai reçu un message de « la longue dame brune ». 
Elle dit qu'elle me pardonne mon outrecuidance de salon. 
Elle est merveilleuse.)



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