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26 février 2016

Le gentleman des plaines


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Flânerie, pacager, liberté, baguenauder, circonstance, enthousiasme, prisonnier, errance, prairie, libellule, céleste, nuage, délire, rencontre, bohème, paria, alouette, gironde, évanescent, agripper.



Pour les Plumes d'Asphodèle.


Ambiance musique.


***





En ce temps-là, j’étais un peu bohème, et je chantais le soir dans un pub sombre de  Little Italy, à l’angle de Mulbery et de Hester Street. Le cabaret s’appelait l’Alouette bleue.
J’avais la hanche gironde, et mes seins blancs, moulés dans des robes évanescentes à la Jean Harlow, transformaient la gent masculine en pauvres loups de Tex Avery, les yeux exophtalmés et la langue pendante. C’était du délire dans la salle quand j’attaquais une pole-dance lascive autour du pied de micro, tout en chantant « C’est si bon ».

J’apparaissais dans un nuage de fumée rose, et je baguenaudais sur des rythmes suaves de blues et de smoothy-jazz, cependant que les mâles du premier rang s’agrippaient à leur verre de old bourbon comme à des bouées de sauvetage. 
C’est à ce moment précis de mes incertaines errances américaines que je fis la rencontre du « Gentleman des plaines ». Nos flâneries noctambules nous avaient amenés sur la même rive de l’Hudson, à contempler les mêmes eaux noires, un soir de mai.

Lui, chien de prairie, prisonnier d’un passé nébuleux, ivre de route 66, de country music et de grands espaces, jaunis par la chaleur et le sel, où William Cody faisait pacager ses mythiques troupeaux de cornes.

Moi, libellule de comptoir, aux yeux de poupée agrandis par le rimmel fondu et les cernes des nuits sans sommeil. Deux parias de la vie. Nous nous payâmes un road movie en liberté digne de la MGM dans un remake de Kerouac. Il m’offrit avec enthousiasme un aller simple pour une love story céleste et unique, plaquant sur ma bouche un baiser de circonstance, mi-Bogart, mi-Brando. Je fondis comme un ice-cream hollywoodien.

Je ne l’ai jamais revu…Certains disent l’avoir aperçu un jour sur un trottoir de Brooklyn. D'autres affirment  qu'il tiendrait un blog. Mais rien n'est certain.
Peut-être se reconnaîtra-t-il dans ces lignes...

¸¸.•*¨*• ☆

311 mots


24 février 2016

La beauté


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Parfois, au hasard d'une persienne que l'on ouvre sur la nuit, la Beauté nous saisit, et avec elle, vient cet espèce d'immense sentiment fugace d'éternité. Tu ne t'y attends pas. 
Ça te fige, ça te prend à la gorge. 

A minuit, devant ce spectacle, je deviens, Hécate, Séléné 
Je deviens Desdémone. 
J'ai envie de danser. Je le ferais si je ne craignais d'être brûlée comme sorcière, ou épinglée sur la porte d'une grange telle une chouette.

La Lune...
«Sur l'oreiller du mal c'est Satan Trismégiste
Qui berce longuement notre esprit enchanté ...» (*)




Et toi, aimes-tu la Lune, comme je l'aime, ou la maudis-tu du fond de ta colère car elle t'empêche de dormir  ?





( *) Citation : Charles Baudelaire

20 février 2016

Au marché, ce matin

Sous-titre: véridique...

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Photo du net


-Bien l’bonjour, Mâme Truchot !
-Ah, Mâme Michu, donnez-moi donc une idée pour ce midi…
-Moi, je vais me faire griller une petite entrecôte, avec des frites.
-Vous n’y pensez pas ? J’ai lu une étude comme quoi que la viande serait très mauvaise pour la santé ! Et grillée en plus ! Vraiment, vous n'y pensez pas...
-Ah bon ? Alors faites seulement les frites…
-Que nenni, vous ne savez donc pas ? La friture est chargée en acide gras saturés, très très mauvais pour le cholestérol ! Et les patates, de nos jours…on ne sait plus trop ce qu’il y a dedans…
-Faites donc un bon plat de pâtes, avec du gruyère râpé…
-Et le gluten, malheureuse ! Non non, ni pizza, ni sandwiches, ni pâtes. Le blé est à proscrire ! Les autres céréales ne valent guère mieux…avec les pesticides...
-Alors une bonne salade de tomates ?
-Non…j’ai lu quelque part que les tomates sont beaucoup trop acides pour la paroi intestinale…et ça donnerait des aigreurs...un peu comme les fruits, d'ailleurs. Trop de potassium, trop de sucre...
-Des asperges à la vinaigrette,  ça c’est bon !
-Malheureuse, vous n’avez pas entendu parler des calculs rénaux ? Ni asperges, ni chocolat ! Ni choux, ni brocolis, à cause de leur action néfaste sur la circulation.
-Ah, je sais : une fondue savoyarde ! Que du bon fromage de Savoie bien naturel…
-Mâme Michu…votre ignorance me désole, vraiment. Vous ne regardez donc jamais le Jité ? Les produits laitiers sont la cause de toutes sortes de pathologies, tout le monde sait cela. Je les ai proscrits à tout jamais. Alors, le lait, les yaourts, les fromages à pâtes molles ou pas, les glaces à la crème, les entremets, même pas en rêve !
-Ouvrez-vous une boîte de sardines, au naturel !
-Naturel ? Souffrez que je m’esbaudisse ! Et les métaux lourds ? Vous y pensez à la concentration de métaux lourds…et je ne vous parle pas des colorants, conservateurs et autres joyeusetés que l’on trouve dans les aliments industriels… Non, ne me parlez pas de muffins, bagels, cookies, kebabs, couscous, paella, brownies…quelle horreur tous ces trucs étrangers ! Pleins de gras, de mauvais sucre et de sel...
-Grignotez quelques amandes, peut-être...
-Ah ciel, je voudrais bien ! Mais les fruits à coques donnent des migraines et des aphtes, je l'ai lu dans une revue spécialisée...et les cacahuètes, de l'urticaire...
-Allez au macDo...
-Vous voulez que j'attrape un oedème de Quick ?
-Eh bien,  vous savez quoi ? allez donc vous faire cuire un œuf !
-Hélas ! J’ai récemment lu les résultats d’un rapport alarmant sur la toxicité des œufs pour l’organisme…
- Mais enfin, vous voulez manger quoi, à la fin, Mâme Truchot ?
- Ben justement, je sais plus… C’est bien pour ça que je vous demandais une idée…
-Eh bien...Je ne vois plus qu’une solution.
-Ah oui ?
-Faites vous griller des sauterelles. J’ai vu une enquête avant-hier, il paraît que c’est l’aliment miracle du futur. Si, si…ils sont tous d’accord. Rien que des qualités nutritives. Bon c’est pas tout ça Mâme Truchot, mais c’est que vous mavez donné une de ces faims, avec tout ça, et moi, j’ai mon entrecôte qui m’attend…avec mes frites... Bien l’bonjour chez vous. 
Demain, je ferai des carottes pour équilibrer, il paraît que ça fait la cuisse rose.


17 février 2016

Escape room


Connaissez-vous ces nouveaux jeux de société qui font fureur dans les grandes villes, appelés « escape room » ? Il s'agit de trouver, en un temps donné,  la sortie d'un endroit où vous êtes enfermé. Chaque membre de l'équipe fait fonctionner son cerveau et ses compétences particulières pour trouver les solutions des énigmes qui permettent d'avancer. Amusant, mais un peu angoissant aussi.

La vie ressemble à cela, parfois. 
Oui, parfois, tu es coincé, tu t’affoles dans une pièce froide, aux parois lisses, pleine d'objets mystérieux résolument hermétiques.
 Tu étouffes, tu paniques, tu manques d’air.
Ça fait des lustres que tu tournes à la recherche d’un indice.
Et puis, soudain, tu trouves la clé. Avec l'aide d'un de tes amis. Elle était là sous ton nez, mais tu ne la voyais pas, occupé que tu étais à errer en toi-même, comme un astéroïde dérouté de son orbite. La difficulté t'abat. Ta propre faiblesse t'aveugle. Ou celle que tu t’es imaginée en baissant les bras. En perdant confiance en toi.
Tu ouvres fébrilement la porte, et tu accèdes au niveau suivant de ta connaissance. C’est comme un grand souffle d’air frais qui s’engouffre.
Tu sais que ce n’est pas le dernier niveau. Il y aura encore bien des renoncements, des reculs, des hésitations. Des moments de doute et de panique. D’autres clés à trouver.
Mais pour l’instant, tu respires. Profondément. Comme si plus rien n’existait que ce bonheur qui vibre au fond de toi. Et de toutes les choses que tu contemples.

Je viens de trouver une clé. Un rouage précieux qui me manquait pour comprendre un de mes fonctionnements. Une libération de centaines de petits blocages, et l’énergie qui s’épanche au dehors telles des gouttes d’eau rebondissant dans un bassin.
Tout à coup le souffle qui passe sur ma peau comme un sourire ressemble au clair de lune de Debussy. Une cascade de bulles légères.

J'avais un voile sur la voix. On me parlait déjà de nodules sur les cordes vocales. De chirurgie. Alors que c'était juste une porte fermée. Tant de choses m'ont laissée « sans voix » depuis deux ans...Tant de choses à avaler difficilement.
 Il a suffi d’une phrase, quelques simples mots qui sont venus percuter ma conscience pour libérer l’espace. Et en ouvrir un nouveau, sous mes yeux ébahis. Tout s'est mis en place.
Les deux dernières années de ma vie défilent et certains événements prennent sens. Tu sais, ces événements qui te malaxent, te brassent, te ballottent en coquille de noix, t’en mettent plein la tête, plein le dos, plein les dents, plein les oreilles...et t’obligent à réajuster tes réponses et tes stratégies de contournement. Les épreuves. Tout le monde en a. Des coups durs, des maladies, des décès. Quand les épreuves te permettent d’aller plus haut, c’est formidable. 
Quand tu t'aperçois que finalement, tu es quelqu'un de bien.