Dans son dernier billet, Coumarine s'interroge sur la sincérité de certains commentaires élogieux, qu'elle assimile plutôt à de la flatterie. Il est vrai que sur les blogs, la gentillesse, l'optimisme et la compassion sont de mise, j'en ai souvent été agréablement étonnée. Ce qui m'a fait parfois comparer la blogosphère à un village de bisounours. Certes.
Il faudrait être idiot pour ne pas apprécier toutes ces ondes positives, et j'en connais plus d'un qui "tiennent" moralement grâce à ce réseau serré d'amitié et de bonne humeur qui les sort un moment de leurs galères et leur maintient la tête hors de l'eau.
Comme je le disais dans mon précédent billet, je suis une adepte de la parole gentille, le matin, au boulot, avec les collègues. C'est bien beau de bannir la langue de bois et de se targuer de toujours dire la vérité, mais qui a envie, au sortir d'une nuit difficile, d'entendre la pétasse de service s'écrier avec son tact habituel:" putain , t'as une sale gueule toi, ce matin!" ? Voilà le type même de phrase sincère qui ne sert à rien, qui blesse et qui ne fait pas avancer la personne sur le chemin d'un mieux potentiel. D'un autre côté, inutile non plus de la flatter bassement en lui disant "Dis donc, t'as bonne mine toi!" Ce serait même pire. Autant lui offrir un café en se réfugiant momentanément sur des valeurs sûres comme la météo, une bonne blague ou les derniers potins du journal, et lui faire oublier qu'elle a une face de déterrée.
En revanche, dès qu'il s'agit d'écriture, qui est le substrat indispensable à tout blog, et la matière première ( parfois un peu brute) de son expression, il convient de garder la tête froide devant les compliments, car en la matière, seule la sincérité d'un certain milieu professionnel paye. Je m'explique: je ne me sentirai pour ma part autorisée à me réjouir que lorsqu'un auteur, ou un éditeur, ou un chroniqueur littéraire souligneront l'éventuelle prédisposition que j'aurais à écrire. Il en va de même pour la musique. Quand mon ami Fred, qui est une pointure en jazz, m'a dit que j'avais du talent pour l'improvisation, et l'oreille musicale, j'en ai rougi de plaisir jusqu'aux lobes.
Tout ceci ne remet nullement en doute la capacité de mon ami Petit Belge à reconnaître le talent, car je le considère comme un chroniqueur littéraire, d'ailleurs. Cathy, Edmée, Coumarine, Damien, vos remarques d'auteurs me touchent pour la même raison, car je sais que vous ne extasieriez pas sur une écriture sans talent. Ne vous méprenez pas, mes autres amis, vos compliments me touchent aussi (ouh la la, quel terrain glissant! tu avais raison, Coumarine!)
Mais il me faut garder humilité, comprenez-vous, car mon premier roman est toujours dans les cartons et je viens d'essuyer mon dixième refus d'édition. Il faut dire (à ma décharge? )que j'ai tenté d'abord les grands consortiums, les géants , Seuil, Gallimard, Grasset, etc et que de nos jours le talent n'est rien s'il n'est pas, au bas mot , doublé d'un solide patronyme susceptible d'émouvoir les portefeuilles...Ah! que ne me nommé-je Besson ou Halliday, que n'ai-je perpétré le casse du siècle, que n'ai-je fait l'amour dans une piscine en direct devant des millions de téléspectateurs?!
Mais je m'égare. Revenons au sujet. Alors quid des compliments sur internet? Bien sûr que quelque part, on les fait un peu pour soi. Pour se faire des amis, autant ne pas être un oursin d'entrée. Pour être reconnu, comme cette petite fille qui cherchait , en la flattant, à accrocher un sourire aux lèvres de sa mère pour quelques instants. Une histoire qui m'a glacé le sang par son implacable cruauté: comment la relation entre une mère et sa fille peut-elle en arriver à ce que la seconde utilise de tels subterfuges pour voler un peu de tendresse à la première?
Bien sûr, mais à ce moment là, on rejoint la théorie d'un de mes amis qui est persuadé que TOUT ce que l'on fait ici-bas, on le fait toujours et irrémédiablement pour SOI. A ce compte-là, même un compliment sincère devient flatterie, puisqu'il flatte...notre EGO.
Je n'entre pas dans ce système de pensée. Pour ma part, lorsque je m'extasie, c'est sans arrière-pensée, sans calcul saugrenu, sans intéressement. Juste parce que je suis fascinée par l'autre. Lorsque la magie n'opère pas, je passe gentiment mon chemin...
Est-ce en se posant sur un arbre que l'hirondelle rend cet arbre beau? Où est-ce parce qu'il est beau qu'elle s'y pose?