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31 janvier 2019

Derrière la jalousie





 « Compersion :  n.f.   sentiment éprouvé lorsqu'on se réjouit du bonheur d'autrui. (L'adjectif est compersif.) La compersion peut être rapprochée du concept bouddhiste de Muditā. »

« Muditā : (Pāli et Sanskrit: मुदिता) signifie la joie dans la philosophie bouddhiste ainsi que dans la philosophie hindoue. C'est plus précisément une joie sympathique, une joie bienveillante et altruiste qui se réjouit du bonheur et des succès des autres. C'est une joie sacrée qui trouve son délice dans le bien-être de son prochain plutôt que de nourrir des pensées envieuses et jalouses à son égard. On donne traditionnellement l'exemple des parents qui se réjouissent des progrès et du bonheur de leurs enfants pour illustrer ce qu'est Muditā. »










Derrière la jalousie et ses lattes orientables 
Rôdent, dans la pénombre, l'amertume et l'envie.
Le soleil incommode, par sa clarté superbe, 
Le jaloux ténébreux. La jalouse assombrie.
Derrière leurs persiennes, ils voient sans être vus 
Et ce qu'ils voient les blesse, et les met en colère. 
Et ils serrent les poings. 
Ils fomentent leur fiel.

Comme des prisonniers enserrés de murs clos, 
Les envieux étouffent. Ils pleurent mille morts.
Dehors, joyeux, solaires, des gens heureux s'émeuvent
Vivent, sourient, s'exclament 
Courent sur le gazon
Et du bonheur d'autrui se réjouissent fort
Et cette compersion rend les jaloux furieux.

Comme un tison brûlant 
Ou comme une araignée tapie dans leur poitrine
La venimeuse envie détruit leur coeur.
Ils meurent.
A petit feu, à coup de venin acéré,
Derrière la jalousie se terre une souffrance.

Je ne les envie pas. Je les plaindrais plutôt...
Je préfère en sourire comme Emily Loizeau. ;-)


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28 janvier 2019

Mariages pour tous







« Aujourd'hui, en la Maison Commune, il a été procédé au mariage de
 d'une part, Mademoiselle Annabelle, Julie, Cunégonde CIGALE, née au soleil le 14 juillet 1988, intermittente du spectacle, demeurant au 2 rue des Alouettes, et de, 
d'autre part,  Monsieur Jonathan, Gédéon, Ursule FOURMI, né sous la pluie  le 2 novembre 1987, expert comptable, demeurant au 2 rue de la Cour des Comptes.
Les époux ont déclaré qu'ils n'avaient pas établi de contrat de mariage. Ils sont donc sous le régime de la communauté réduite aux acquêts de mouches et de vermisseaux »


***

- Bon, eh bien, mon vieux Raymond, c'était une belle cérémonie aujourd'hui... très émouvante. Un mariage d'élytre...
- Oh mais dis donc, Albert, il était prévu ce mariage ? Je croyais me souvenir d'une histoire qui se terminait autrement... Non parce que c'est pas pour dire, mais c'est un peu l'alliance de la cimaise et de la fraction, cette histoire... Enfin, je veux dire... de la carpe et du lapin !
- Ah non, Isabelle CARPE et Lucien LAPIN, je m'en souviens, je les ai mariés samedi dernier... Et il y a quinze jours, c'était une certaine mademoiselle Emilie PETITPOISSON avec un certain Johnny PETITOISEAU. Ils avaient l'air de s'aimer d'amour tendre, ces deux-là...
- C'est la série ! Et après on viendra nous dire « qui se ressemble s'assemble »... 
- Oui mais on dira aussi « les contraires s'attirent »...
- On dit n'importe quoi, en fait...
- Oui je l'ai remarqué souvent, mais il faut reconnaître qu'une chanteuse de blues ...avec un fonctionnaire du ministère des finances...je me demande si ça tiendra... Un couple aussi hétéroclite, ce n'est pas forcément soudé à la sécotine...
- A la sé' chitine, plutôt, en l'occurrence...Ha ha ! mais, mon gros, les mystères de l'Amour sont impénétrables...comme un mode d'emploi en taïwanais, ou le périph' aux heures de pointe...
- Ah ! tu sais que j'ai toujours aimé ton romantisme exacerbé, toi ?
- Tu n'as qu'à me demander en mariage, mon vieux...
- Et si je te prenais homo ? Ça aurait du chien, non,  l'union surprise d'Albert LION et de Raymond RAT...
- C'est vrai,  on a toujours besoin d'un plus petit que soi. Mais une question me turlupine: Qui marie le Maire quand il ne peut pas se marier parce qu'il se marie ?




Pour le défi de Lakévio



24 janvier 2019

Histoire toute douce




Il y a deux façons de vivre sa vie : l'une en faisant comme si rien n'était un miracle, l'autre en faisant comme si tout était un miracle.
Albert Einstein.









 Une maman arrive à l'hôpital pour accoucher. C'est son premier enfant et l'infirmière se dit que ce n'est pas pour tout de suite. En l'installant dans une petit salle dite de « pré-travail » (ah le doux mot romantique en diable)...elle lui recommande de l'appeler s'il y a un problème.
Et puis, vous savez ce que c'est, on est débordé à l'hôpital public, l'infirmière ne pense plus à cette petite dame toute sage qui vit ses contractions toute seule dans un petit endroit tout calme de la maternité.
Quelques heures plus tard, la dame appelle tout tranquillement l'infirmière et lui dit : 
« J'aurais besoin d'une paire de ciseaux pour couper le cordon » Et là, en voyant le beau bébé tout rose posé sur la poitrine de sa petite maman toute apaisée,  l'infirmière toute affolée s'exclame et bafouille : 
« Mais je vous avais dit de m'appeler, pourquoi vous ne l'avez pas fait ? »
Alors la petite dame toute calme répond avec un sourire tout fondant et confondant : 
« Vous m'aviez dit d'appeler s'il y avait un problème. Or il n'y a pas eu de problème »...

J'adore cette histoire, sans doute parce qu'elle est vraie en plus d'être belle. Elle m'a mise en joie. Vous l'avez peut-être entendue sur France Inter, les chroniqueurs l'ont intitulée « Miracle à l'hôpital ». 
Mais où est le miracle ?

Le miracle, c'est la vie. Et la vie peut éclore sans problème dans quatre-vingt-dix-neuf pour cent des cas. C'est notre société frileuse et procédurière qui invente constamment des problèmes là où il n'y en a pas. 
J'ai un ami très cher qui dit : 
« Fuyons les gens négatifs : ils ont toujours un problème pour chaque solution. » 
Il a tellement raison...
Il est bon de se souvenir régulièrement que dans la confiance, ce joli mot un peu oublié,  les choses peuvent aussi se passer sans problème...

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19 janvier 2019

Juste après











On n’est pas bien, là, galinette, allongés dans le sens latitudinal du lit, comme deux traversins chiffonnés, encore ondulés de frissons ? Le vent d’été soulève la voilure du rideau comme une paupière. Dans un coin de la chambre assoupie dans la pénombre, Billie Holiday susurre I’ll be seeing you de sa voix moelleuse
Le drap déploie un océan de plis et de vagues molles, encore humides de nos ardeurs.
L’heure est au désert, à la vacance absolue, aux égarements de l’âme.
Pas un bruit ne monte de la rue, elle a embrumé ses rumeurs en un vague murmure d’asphalte lointain.
Mes doigts s’attardent à l’horizon de ton ventre, effleurant au passage ton triomphe encore doux et chaud,  mes jambes s’arrondissent, de leur propre volonté, en une passerelle alanguie par-dessus les tiennes. Joli bazar que ce méli-mélo de corps chauds à l’abandon, pris dans tes fils de salive et mes cheveux embrouillés…
Qu’est-ce qu’on fait ? On se lève ou on se love ?
En une enjambée on pourrait franchir le tapis constellé de ciel, jonché de mes dentelles disséminées au vent dans ma hâte…En deux enjambées on se retrouverait dans la cuisine, buvant du vin italien pour célébrer ce voyage du tendre qui nous a donné soif.
En trois enjambées…mais non, la flemme est entrée en nous comme un aiguillon, alors on va rester là, à regarder les étoiles, ces coquettes endiamantées qui ne vieillissent pas, jusqu’au petit matin.  Puis tu t’endormiras. Et je te regarderai dormir, le coeur amoncelé de bonheur.



***



Pour les Plumes d'Asphodèle, reprise avec brio par Emilie
Il fallait placer les mots :

océan, désert, enjambée, passerelle, traversin, rue, voyage, passage, franchir, horizon, vacance, voilure, vieillir. 


Musique: Billie Holiday
I'll be seeing you




15 janvier 2019

Cicatrices




« Ces sillons infinis de lueurs éphémères
Qui peut se dire un homme et ne les connaît pas ?
Quiconque aima jamais porte une cicatrice
Chacun l'a dans le sein, toujours prête à s'ouvrir...»
Alfred de Musset










Ma vie sera-t-elle jamais un lac immobile ? Je ne le crois pas. 
Un de mes amis très chers me répondit un jour, en mode boutade, alors que je lui évoquais une prochaine éventuelle meilleure stabilité de mon existence : « Seras-tu vraiment stable un jour ? »
C'est vrai, il n'avait pas tort. Je porte en moi une fêlure d'eau mouvante, une oscillation de quartz qui me propulse vers le mouvement perpétuel. 
« Tu es une grande blessure » me dit-il. 
Bien sûr. Et j'assume. Je porte en étole, en collier, la blessure originelle des femmes. J'ai été atteinte dans ma féminité, dans ma chair, dans mon intégrité. Je l'ai gardé longtemps dans un silence honteux au goût de cendre.
Cependant, depuis que j'ai osé me dire, me confier, m'extirper des tripes ce clou rouillé, je sens que les tissus font tout autour une belle cicatrice rose. 
Elle s'appelle reconquête de moi-même. Fierté. C'est comme nager là où je n'ai pas pied. Sentir que la confiance me porte sur les eaux salées d'un lac qui bouge parfois, mais toujours avec une infinie tendresse.
Nous avons tous des failles béantes, qui suintent doucement dans les noires profondeurs de nous-mêmes. Mais nous avons, au même endroit exactement, le pouvoir antidote de les transcender. J'en ai acquis l'intime certitude.
Il y a dans ces cicatrices la beauté étonnante de la fragilité et de la force mêlées. 
Et l'Amour, en vérité,  se fout des rides, des sillons, des balafres, des déchirures, des vergetures, des traces brunes,  des trous, des bosses et de toutes ces petites scories du passé qui traînent sur nos peaux et nos âmes mâchurées. 
Nous ressemblons à ces lanternes japonaises, appelées aussi « amour en cage ». 
Avec le temps,  la lumière de l'intérieur nous donne peu à peu un attrait magique, quand  l'eau et la couleur se sont retirées de leur surface, les changeant en translucides et délicates dentelles...
 Et aux yeux de qui sait nous aimer, notre coeur en filigrane apparaît plus beau et plus scintillant que jamais.




Musique 
Greg Maroney
Courage to fly

11 janvier 2019

Ton héritage











Il est revenu me voir en songe, à pas feutrés et agiles. Il portait toujours sa cape d'étoiles et son écharpe jaune au vent solaire. Il déchirait toujours la nuit de son rire de cristal...
Il m'a dit qu'il ne comprenait toujours rien à ce monde des hommes, sans tempérance ni sagesse. Vu de là-haut, il lui semblait même de plus en plus fou, ce ramassis bigarré de gilets jaunes, de casques bleus, de pull-overs rouges, de rayons verts, de septembres noirs et d'octobres violets, de luttes ancillaires et intestines, de violences larvées et d'atrocités affreuses, alors que les arcs-en-ciels sont si beaux, à l'automne, au-dessus des osiers et des étangs, lorsque l'arôme des sous-bois parfume l'air.
Une larme perlait à son regard puéril. 
Il semblait absorbé par des pensées moroses et opaques. 
« Les hommes ne voient donc toujours pas avec le coeur ? Pourquoi laissent-ils grimper la température de la terre, et la pollution la recouvrir comme un linceul ? Ne savent-ils pas que la terre est leur héritage, qu'ils sont coincés sur cette minuscule planète et que toute fuite leur sera impossible ? 
Moi-même, je n'en suis parti qu'au sacrifice de ma vie, grâce à la percussion terrible d'une morsure de serpent... »
Ses sanglots m'ont bouleversée.

J'avoue que, moi qui vois pourtant avec le coeur,  je n'ai pas su lui répondre. Je suis trop comme lui, sans doute. 










 Pour l'atelier Treize à la Douzaine

08 janvier 2019

A quoi penses-tu ?




"Le bonheur arrive quand ce que tu penses, 
ce que tu dis et ce que tu fais sont en harmonie" (Gandhi)















A quoi penses-tu ? Allez, rentre, tu vas prendre froid !
Mais je suis bien, là, les yeux un peu vagues, lointains, nappés d'une brume de songe... 
A quoi je pense ?
A quoi je pense quand le bruit s'est retiré pour se changer en murmure, quand la nuit se fait câline et velours, quand je me retrouve avec moi-même pour un moment de vraie solitude choisie ? Mais à moi, bien sûr, en tout premier. Je m'offre un cadeau somptueux, le monde à mes pieds, le vent dans mes cheveux, la paix dans mon âme.
Et le luxe suprême de ne penser à rien de négatif. 
Et je ne rentrerai que lorsque je l'aurai décidé. Et c'est bon, de ne pas obéir aux injonctions...
Je pense que des êtres chers, m'aiment et pensent à moi, et c'est doux comme un manteau de plumes.
Je pense à mon père, dans son nid d'étoiles, qui me regarde avec son sourire de vieux cow-boy buriné, de jardinier tranquille. 
Je pense à l'amour, à la liberté, à la joie, ces trois phares qui éclairent ma route quotidienne.
Je pense qu'il y a dix ans jour pour jour, j'étais aux urgences pliée en deux de douleur, et que la vie est pleine de surprises. Rien ne va jamais pareil d'un an sur l'autre, et c'est bien.
Je pense à Bételgeuse plus lumineuse que jamais.

Et toi, au fait,  à quoi penses-tu dans ces moments-là ?
As-tu, comme moi, de ces élans de souffle renversants qui te transportent sans bouger de l'autre côté des choses ? Mille pensées te traversent-elles, ou te laisses-tu simplement bercer par l'instant, sans chercher à le retenir ? 



Musique Kevin Kern
By my side





Et pour ceux qui aiment les images qui ne bougent pas...
Clic pour voir en grand

03 janvier 2019

2019






L'instant précis que l'on est en train de vivre est toujours un cadeau : 
C'est pour cela qu'on l'appelle le Présent.











- Hola Célestine ! Sors un peu de ta tanière !
Pendant que tu rêvassais à compter les étoiles dans la nuit glacée de janvier, ou à tirer des plans sur ta comète magique, le monde s'est pris un an dans la brioche, tu es au courant au moins ?
Et tous tes amis attendent tes voeux, figure-toi ! Qu'est-ce que tu fabriques ? Il y a même certains de tes lecteurs qui ont commencé à poser les leurs sur ton billet de Noël, ça fait désordre !
- Ah ? Oui, j'avoue que je traîne un peu, cette année. Toute à la joie d'être en vie, en bonne santé, et pleine de projets et d'enthousiasme, toute au bonheur de parcourir une campagne  poudrée de lune et de brume, et de contempler ma petite Prunelle à la peau si douce,  je pensais tout à coup, et à brûle-pourpoint à Joachim Du Bellay,  Sophie Daumier, Vincent Auriol, Fausto Coppi, Maurice Chevalier, Giani Esposito, Jean Bernoulli et quelques autres...
- Qui sont ces gens ? Des amis à toi qui habitent la région ?
- Mais non voyons, ce sont des célébrités plus ou moins connues des siècles passés (tu demanderas à monsieur Wiki, pédiatre) , et qui ont toutes un point commun assez troublant, bien que très mathématique. (Notre cerveau, tu le sais,  a tendance à voir des choses troublantes là où il n'est question que de hasard et de nombres rationnels)
- Ah bon, et quel point commun ?
- Eh bien imagine donc que ces braves gens, la veille de leur mort...
- ... étaient encore vivants ! comme disait notre cher Monsieur de La Palisse, qui ne loupait jamais une occasion de se faire brillamment remarquer.
- Bien sûr, ils étaient vivants, et même, très vivants, et même joyeux. Même qu'ils se sont embrassés sous le gui, tout comme toi et moi, qu'ils ont ri et chanté en se tapant le ventre et en sifflant une flûte de Veuve Cliquot. (Enfin, pour Du Bellay, je ne suis pas tout à fait sûre que le champagne existât déjà, mais bon, ne pinaillons pas, tu saisis l'idée) Ils se sont souhaité la bonne année avec force effusions comme il sied à chaque Saint Sylvestre en dansant devant le feu.
Et pouf, le lendemain, contre toute attente, ils sont morts. 
Etonnant non ?
Alors mes chers lecteurs et lectrices adorées, j'ai envie de ne vous souhaiter qu'une seule chose pour cette nouvelle année : celle d'apprécier à chaque instant ce cadeau fabuleux qui s'appelle la Vie. Faites-en le meilleur usage, car sa vieille compagne, la Faucheuse, ne demande jamais la permission avant de nous l'arracher des mains. 
Je vous embrasse du fond du coeur et du bout de mes yeux d'étoiles.


Belle année 2019 !



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