Pages

31 mars 2011

Racines

J'aime les landes battues par le vent, les paysages tourmentés de vagues et de sel.
J'aime les prés verts et humides de l'Irlande, les châteaux écossais, les tavernes galloises. 
Mon cœur arpente ces bruyères échevelées , ces collines sous un ciel d'encre violette aux nuages effrénés.
Mon esprit vagabonde sur ces collines arrondies sous le poids des moutons à la laine grasse, longe les falaises dominant une mer grise et froide. 
Les cornemuses miaulent au loin, et leur plainte éveille en moi la fibre d'une lointaine ascendance.
Il ne m'en reste que quelques taches de rousseur sur le nez, mais il y a des jours 
où je me sens gaélique jusqu'au bout des ongles.

27 mars 2011

On peut rêver!


J'ai écrit un roman il y a quelque temps.
J'en avais déjà un  peu parlé
 ici   et  là.
Il dormait dans un coin de ma mémoire comme  un petit ours engourdi par l'hibernation. A dire vrai, je n'y pensais plus, tant de réponses négatives m'ayant un peu refroidie dans mon élan.
Et puis , voilà quelques jours, apportée par le vent comme les effluves des fleurs d'amandier, la bonne nouvelle est arrivée: un éditeur a accepté mon manuscrit.
Il m'a fallu une bonne semaine pour redescendre de mon  nuage rose. A dire vrai, je n'y croyais pas. J'ai dû, pour me pincer, écrire vite un mail à mes deux " marraines", les deux bonnes fées qui se sont penchées sur mon berceau de " bébé auteur"...Remercier Coumarine et Edmée  me semblait la meilleure façon de me convaincre que je ne rêvais plus, que la réalité était bien là, dans ce contrat, ce manuscrit précieusement annoté. Ce sont elles qui m'ont soutenue, qui m'ont montré la voie, qui m'ont donné l'envie de croire à tous les possibles. Je ne les remercierai jamais assez. 

Mais j'ai aussi une pensée très particulière pour Cathy et Jean-Pierre auteurs de romans confirmés et talentueux, Damien, l'homme des terres lointaines qui embarque ses lecteurs au bout du bout du monde, AlainX qui vient de publier un formidable  premier livre d'introspection, et Petit Belge, qui n'en est pas à son coup d'essai, puisqu'il a publié une demi-douzaine d'ouvrages sur l'histoire de son beau pays...Vous aussi,par vos écrits, vous m'avez donné l'envie d'y croire.

Vous connaissez  le sentiment de plénitude qui m'a envahie, comment le décrire? Voir se réaliser un rêve que l'on poursuit depuis l'adolescence donne des ailes. Je tiens dans mes mains une clé précieuse, l'écriture, et l'on m'a donné la permission de m'en servir pour partager mes émotions avec mes contemporains. C'est merveilleux. Derrière la porte, des contrées infiniment nouvelles s'offrent à moi . Même si ce n'est qu'une toute petite clé, maintenant, je sais que , quand on le veut très fort, les rêves se réalisent.(Mon côté Alice, sans doute)...

Je voudrais dire à tous ceux d'entre vous, les autres, ceux qui n'ont pas encore publié mais qui en ont peut-être caressé le projet, ceux  qui possèdent ce beau brin de plume si prisé par les amateurs de mots comme moi,  oui, c'est possible. Le rêve est un moteur puissant, alors, si vous en avez le désir, lancez-vous! On peut rêver, c'est permis.

Je voudrais dédier particulièrement ce billet à Delphine, qui a posé le premier commentaire sur mon blog un beau jour de février 2009. Sans elle,les choses auraient pris une toute autre tournure. Magie du hasard...

23 mars 2011

Un enfant

Il n'est pas comme les autres. Il est haut comme trois pommes, de grands yeux bleus et des cheveux bouclés d'angelot. Pourtant, quelque chose dans son regard se voile parfois, laissant entrevoir des vertiges qui glacent. L'angelot cache des démons. Il a bien essayé, pourtant, quelque temps, de se conformer aux règles de vie commune. Il a essayé d'oublier. Mais c'est un enfant en colère. En colère perpétuelle contre tout. La vie qui ne l'a pas épargné, et pourtant il n'a que neuf ans. Les adultes qu'il assimile à des ennemis, les autres enfants qui ne peuvent pas comprendre sa souffrance. Des enfants policés, naïfs, trop bien habillés, trop polis, insupportables pour lui. Et  ce cri coincé en travers de sa gorge qui s'échappe parfois en une plainte. Il jure, alors, il peste comme un charretier, horrifiant l'assistance,  il balance ses bras et ses jambes avec la force de son désespoir. Il voudrait partir, très loin, se sauver et ne plus voir personne. Il voudrait qu'on lui extirpe sa douleur, il voudrait comprendre pourquoi sa mère l'a laissé, pourquoi la violence lui a tenu lieu de berceau, de langes et de doudou. N'y a-t-il pas quelqu'un ici qui le verra comme il est?  Un être déchiré par le non-sens de l'existence.
Apprendre, travailler sont des mots étrangers. Ils ne servent à rien. Obéir à des règles? Comment le pourrait-il? Le monde n'est qu'un infâme cloaque où il se débat. Tous les coups sont permis dans cet univers vénéneux où il  tente de survivre . Les adultes se battent et se poignardent, les femmes s'insultent et se prostituent, les enfants sont des paquets de chiffons encombrants . On les laisse errer seuls dans la rue pour aiguiser leurs griffes. Car leur avenir sombre d'avance dans la violence. Le punir? Mais la vie chaque jour le punit bien assez, et depuis trop longtemps. Alors on entreprend des démarches administratives, signalement, information préoccupante, (doux euphémisme) assistante sociale, parquet, procureur, placement, et la mort dans l'âme, on va regarder s'éloigner cet être écorché vif qui "se met en danger ainsi que ses camarades" avec un drôle de goût amer au fond de la bouche. Un mélange de soulagement, de défaite et d'impuissance.
Je ne pourrai pas t'oublier, ténébreux petit prince. J'ai encore mal aux bras de t'avoir empêché de te jeter par la fenêtre.

20 mars 2011

C'est le Printemps

 Hutte des Bois nous fait partager sa promenade fleurie à travers une ville
 qui a revêtu de somptueux appâts pour  faire basculer les passants dans sa magie.
Les fleurs et les oiseaux correspondent secrètement pour mêler dans une symphonie
les parfums, les couleurs et les sons.Les coeurs exultent et les corps se gonflent
de turgescents désirs.
C'est le printemps.

17 mars 2011

我々はあなた達と共にあります

Nous sommes avec vous
Parce que nous sommes comme vous
Peuple du bout de la terre

地の果てからの人々


La Terre vous a meurtris
La mer vous a blessés
Et notre cœur entend votre peine

私たちの心はあなたの痛みを聞く


Un jour viendra, d'ambre et de miel,
où vous retrouverez la paix
les cerisiers refleuriront

桜の木が再び開花する

14 mars 2011

Tatie, raconte moi une histoire...

Tatie, raconte moi une histoire avant de dormir, s'il te plaît, Tatie !
-Oui mais pas trop longue alors, hein, parce que Tatie est fatiguée, si tu savais...iI faut dire que cet après midi, il m'est arrivé un truc peu commun.
-Ah bon? C'est quoi, commun?
-Ça veut dire...que ça n'arrive pas à tout le monde. J'étais sur ma chaise longue, je savourais le soleil de printemps...
-C'est quoi, savourais ?
-Ça veut dire que je me sentais bien, là, j'avais chaud, mais à force d'avoir chaud, eh bien, vois-tu, j'ai eu soif. Alors je me suis dit: « il doit y avoir des cannettes bien fraîches dans le réfrigérateur..."Je m'évertuais à...
-C'est quoi, évertuais ?
-Bon, si tu m'interromps tout le temps, aussi! Ça veut dire que je faisais très attention à ne pas réveiller Tonton qui ronflait dans le canapé. J'ai ouvert le frigo, et là, je ne sais pas comment c'est arrivé...je suis tombée dedans.
-Dedans ?
-Oui, dans le bac à légumes. Et la porte s'est refermée. Les patates et les carottes m'ont regardée d'un drôle d'air. "Ça sent le pâté", a dit l'une. "Qu'est-ce qu'elle fait là, cette grande asperge ?"  a répondu l'autre.
-Et alors Tatie ? raconte, dis ! ...
-Alors j'ai réussi à me hisser à l'étage du dessus. Ah, ça, je n'avais plus chaud du tout! Je commençais même à me les geler sérieusement!
-Te geler quoi?
-Pfffff! C'est une expression ! Bon je ne te raconte pas l'odeur, à cet étage-là! J'étais tombée sur les fromages...Le cantal m'a dit d'un ton sentimental: "que faites-vous là, très chère?"
-C'est quoi, sentimental ?
-C'est pour la rime...Ensuite, il a fallu que je me tape l'étage des charcuteries, et des plats cuisinés, j'en avais le cœur tout retourné. Et il faisait six au-dessous de zéro. J'ai trébuché dans un pot de yaourt entamé: celui que tu n'as pas fini à midi, mademoiselle !
Copie_de_DSCF2943-J'avais plus faim...mais dis-moi, Tatie, dans les frigos, elle reste allumée alors, la lumière, quand la porte est fermée ?
-Ben oui, c'est bizarre, j'aurais juré le contraire. Enfin, je suis  arrivée tout en haut, complètement congelée, et dans le freezer...mon dieu, c'est affreux!
-Quoi ? Quoi ?
-Il y avait...un homme tout blanc, d'un blanc presque bleu de glacier boréal, qui m'a regardé, sans rien dire, d'un air triangulaire...
-Quelle horreur ! Et... ?
-...Ton oncle a ouvert le frigo pour se prendre une bière, et je suis sortie en courant , me remettre au soleil en claquant des dents. Tu comprends que cette aventure m'ait épuisée!
-Bon, alors maintenant ,Tatie, raconte moi une histoire, tu as promis!
-ENCORE!!!???


La consigne d'écriture était ici.

11 mars 2011

Petits et grands bonheurs **

 Inventaire des kifs de chaque jour.

Nonchalamment appuyée au rebord de ma fenêtre, en plein soleil, je repensais à ces petites vacances si pleines de bonheurs simples. Boucler une minuscule valise remplie d'essentiel, monter dans un train et regarder défiler les arbres et les champs de la France profonde, le corps alangui par le doux trémoussement des wagons sur les rails: voilà de quoi se mettre l'âme en joie. Observer le visage de mes compagnons de voyage,  et leur imaginer une vie, des passions,un but.
La mer et ses effluves,  Collioure et son port lové autour de sa tour, les mimosas en fleurs  et la majesté du Canigou couronné de neige, j'en ai déjà parlé dans un précédent billet. 
Puis , un peu plus tard dans la semaine, une journée particulière avec ma sœur unique et préférée,toute en délices et en fou-rires. Marcher à plein poumons, manger des quenelles frites,  acheter du chocolat bleu. (si, si!)  Cette chère Hutte des Bois m'a fait pour l'occasion découvrir un livre si proche de ma façon de concevoir l'existence que j'aurais pu l'écrire moi même...
Le week-end suivant, je partis pour Paris, où je rencontrai la délicieuse Marie Madeleine, qui m'a dédié un joli billet sur son blog. Nous passâmes un moment hors du temps, à découvrir nos complémentarités sous un soleil très généreux pour la Capitale, (surtout en cette saison) j'en étais la première étonnée, moi la fille du Sud...
Je passai aussi un excellent moment à rêver au fabuleux destin de Françoise , qui exposait ses calligrammes dans une galerie parisienne. Même si sa girafulle s'est un peu brûlé les ailes aux feux de l'indifférence médiatique, je suis sûre qu'elle va rebondir.
Une pièce de théâtre légère,  avec la grande Balasko, et un petit détour par le Centre Beaubourg furent les points d'orgue culturels de ce week-end hors norme avec mon grand fils pour moi toute seule. Entre temps, nous refîmes le monde durant des heures dans un petit restaurant italien de la rue Saint Martin.
Et puis, de retour au bercail, le sourire, l'odeur sucrée du petit Valentin, dans mes bras cet après-midi, un mois et demi, un paquet d'innocence gros comme le poing.  
Un thé aux fleurs de cerisier du Japon avec une amie dans un salon rose et vert fluo.
Un poulet rôti dégusté dehors, au soleil.
 Trois anniversaires,  une journée de la femme.
Deux films valant le détour: "les femmes du sixième étage " avec Fabrice Lucchini, émouvant et drôle, et "Le Discours d'un Roi" avec Colin Firth, déchirant et sublime.
 Un grand ménage de printemps, quand tout sent bon dans la maison et qu'on range enfin le placard à chaussures.
Et , en cherchant bien , dans le jardin, là bas, peut-être un raton laveur...

Pour tout dire, ce sont des dizaines de kifs par jour auxquels j'ai eu droit durant ces vacances magnifiques.Oh la la, mais quelle chance j'ai, de vivre.

** Un autre kif facile à réaliser: savoir écouter les critiques (constructives) et faire plaisir à ceux qui les ont formulées en leur montrant combien on les respecte, c'est que du b...euh, c'est une grande félicité. (clin d'œil à Miss K et à Adrienne.)

08 mars 2011

J'aime les femmes...et les hommes aussi!

Lettre ouverte à Coumarine, une femme parmi tant d'autres.

Mais comme tu dis bien les femmes, Coumarine!
Prenons ton dernier opus, aiguisé comme un estomac qui gargouille et ciselé comme un oignon blanc: son parfum subtil fait couler les yeux et fouaille nos entrailles de filles d'Eve. 
Il y a nos peurs , celle de la chair violentée  qui se refuse, celle de la passion qui enivre, celle de la mère qui tremble pour son enfant.
Les doutes, les révoltes, les yeux grand fermés de la fillette qui ne veut pas voir ce qui ne se dit pas,  les émois de la fille facile ou de la vieille femme amère qui regarde partir sa jeunesse dans une volute de fumée. L'incompréhension, les bulles étanches d'incommunicabilité  entre les sexes, plus closes que des citadelles, parfois. La soumission mue en colère, l'admiration changée en haine.
Il y a l'amour plus grand, plus fort,  que tout, filial, adultère, maternel, passionnel, résigné, les mots trop dits, les mots cachés, les hontes, les tromperies, les joies, les hésitations, les routines et les découvertes.
Le vertige de la séduction , l'odeur de la peau, le croustillant d'une fesse ou d'un sein blanc , les improbables rendez-vous clandestins, l'implacable loi de l'attirance qui se rit du devoir et des convenances.
Les dégoûts, les trahisons,  les envies, les regrets, les chagrins, les douleurs muettes, tout ce qui rend les femmes uniques et éternelles,ces êtres compliqués et passionnants dont vous ne sauriez vous passer, vous les hommes, et qui vous le rendent bien. Je dirais même au centuple.
Il y a tout cela dans ton livre de rire  et de larmes, Coumarine, et bien plus encore. Venez tous  partager un repas à cette table, somptueuse, chatoyante et solaire comme la robe d'un Saint Emilion.
Les Dessous de Table, Nicole Versailles, Memory Press 2010

01 mars 2011

impression soleil levant

C'est dans ces moments de papier de soie que je me sens vivante. Des moments de vanille, de lait de bébé, de miel. C'est dans ces instants précieux d'ambre et de sel que mille couleurs plongent dans les veines, sensations contradictoires, sentiments diffus et bouleversants. Des abeilles qui vrombissent aux oreilles, des chants de merles, de petits sentiers dans la colline remplie d'odeurs et soudain une découverte inédite de la mer. Une mer plate comme un lac, dans une attitude ramassée, prête à bondir comme un chat au gré du ressac sur le sable des grèves blanches. Un ciel d'orage d'un bleu gris, et des rais de lumière fins et dorés traversant la mousse des nuages.Se sentir vivante, c'est ce coup de poing quelque part au-dessous du nombril, très exactement là où tout démarre. Une vague , une onde de feu catalan. Une force immense m'envahit, je me sens devenir toutes les aubes et tous les crépuscules. Je pourrais rester immobile des jours  à rêver ce vol de mouettes, et la parillada et le tintement doux des cloches au petit matin. Avec une incoercible envie de mourir, là, foudroyée par tant de beauté et d'évidente élégance du destin.